Chong’an 
					虫安
					
					
					Présentation
					
					par 
					Brigitte Duzan, 24 août 2025
					 
					
					Chong’an (虫安) 
					est le nom de plume de Xia Longlong (夏龙龙), 
					écrivain né en 1989 dans le district de Gaochun, à Nankin (南京高淳). 
					Il est devenu célèbre pour avoir collaboré à l’écriture du 
					scénario du film de 
					
					
					Feng Xiaogang (冯小刚) 
					sorti en 2025 : « We Girls » (《向阳•花》). 
					Or le scénario est adapté de sa nouvelle « Tournesols dans 
					une prison de femmes, floraison hors des hauts murs 
					d’enceinte » (《女监里的向阳花,开出高墙外》) 
					qui est fondée sur son expérience personnelle d’ancien 
					détenu.
					
					 
					
						
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							Xia 
							Longlong, alias Chong’an |  | 
					
					 
					
					Un 
					hooligan réformé
					
					 
					
					À 18 ans, 
					en effet, il a arrêté ses études et a fréquenté un groupe de 
					jeunes hooligans que l’on appelle huó nàoguǐ (活闹鬼), 
					des « revenants », dans le dialecte de Nankin : ils ont la 
					tête rasée, portent des boucles d’oreilles et un collier en 
					or, des T-shirts sport de la marque Nike, Kappa ou Li Ning, 
					ou des imitations. Xia Longlong a traîné avec eux dans les 
					bars et les discothèques. Il avait un ami qui était chef des 
					agents de sécurité d’un hôtel et qui y emmenait souvent ses 
					copains boire. Or, un jour qu’ils volaient de l’alcool dans 
					la réserve de l’hôtel, ils se sont fait prendre par le 
					directeur de l’hôtel. Pour se venger, Xia Longlong est allé 
					cambrioler la famille du directeur et a écopé d’une peine de 
					prison de dix ans et six mois, réduite au bout du compte à 
					sept ans.
					
					 
					
					Pendant 
					cette période, en raison de ses talents artistiques et 
					littéraires, il a été affecté au secteur culturel et 
					éducatif de la prison (文教监区). 
					Il a préparé un master, mais surtout il a rencontré les 
					détenus les plus divers et noté leurs histoires. Écrire est 
					devenu un exutoire à son besoin de s’exprimer. Mais il a 
					traversé une période très difficile quand il a été libéré, 
					au bout de sept ans, en 2014. Il a travaillé comme serveur 
					dans un café en essayant de se faire engager par le « Big 
					Brother » qu’il avait rencontré en prison et qui disait 
					avoir une affaire de légumes à Wuxi, dans le Jiangsu. Mais 
					en vain. Or le café où il travaillait était un tripot où les 
					gens venaient jouer. Pour ne pas retomber dans ce genre 
					d’environnement, il a démissionné et s’est mis à peindre des 
					T-shirts à la main pour les vendre sur internet. 
					
					
					 
					
					Alors qu’il 
					commençait à avoir du succès, la plateforme Renjian de 
					NetEase (网易人间写作平台) 
					lui a offert de devenir écrivain. Il a ainsi commencé dès 
					2016 à y publier des récits, sur la base des histoires qu’il 
					avait glanées en prison.
					
					 
					
					Le 
					salut par l’écriture
					
					 
					
					Son œuvre 
					représentative est la nouvelle « Tournesols dans une prison 
					de femmes 
					
					, 
					floraison hors des hauts murs d’enceinte » (《女监里的向阳花,开出高墙外》) 
					initialement publiée en ligne en 2019. C’est le reflet de 
					son expérience personnelle en prison, mais les deux 
					personnages principaux sont des femmes : l’une, Gao Yuexiang 
					(高月香), 
					mariée par sa famille à un estropié dont elle a eu une 
					petite fille sourde qu’elle se bat pour garder et faire 
					soigner, l’autre, Hei Mei (黑妹), 
					sourde-muette, élevée par un chef de gang qui l’a formée à 
					voler, jusqu’à ce qu’elle se fasse prendre et envoyer en 
					prison. La nouvelle dépeint l’univers carcéral, la violence 
					toujours latente, mais aussi la chaleur humaine et l’aide de 
					la gardienne responsable d’elles, Deng Hong (邓虹). 
					Cependant, les pires difficultés les attendent à la sortie : 
					pour l’une, comment trouver l’argent pour récupérer sa fille 
					que son mari a abandonnée dans un orphelinat et pour 
					l’autre, éviter de retomber dans le cercle des voleurs qui 
					la traquent à sa sortie…
					
					 
					
					C’est ce 
					thème de la difficile réinsertion sociale des détenus 
					libérés de prison qui a attiré Feng Xiaogang, surtout 
					s’agissant de femmes. La nouvelle a été publiée en mars 2024 
					dans un recueil de neuf récits à caractère documentaire 
					intitulé « Histoires de réforme éducative » (《教改往事》), 
					suivi d’un deuxième recueil publié en novembre sous le titre 
					« La meurtrière en robe de mariée » (《穿婚纱的杀人少女》). 
					Il s’agit de réflexions sur le système carcéral, sur les 
					profils des détenu.e.s dont beaucoup sont victimes de 
					violence domestique, sur le mécanisme de rédemption que peut 
					offrir la prison, mais aussi sur les difficultés de 
					réinsertion ensuite.
					
					 
					
						
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							La meurtrière en robe de 
							mariée |  | 
					
					
					 
					
					Le recueil 
					a eu un certain retentissement. Parmi ces histoires, il en 
					est une autre qui a été adaptée au cinéma,  c’est « Nuages 
					du matin et pluie du soir » (《朝云暮雨》), 
					adaptée en un très beau film tourné en 2021 mais sorti en 
					mai 2024 : « Strangers 
					When We Meet » (《朝云暮雨》), 
					réalisé par 
					
					
					Zhang Guoli (张国立), 
					avec 
					
					
					Fan Wei (范伟) 
					et 
					
					
					Zhou Dongyu (周冬雨).
					
					
					 
					
					Peu à peu, 
					Chong’an est passé de la non-fiction à la fiction. En avril 
					2025, il a encore publié un recueil de nouvelles qui reprend 
					l’histoire initiale : « Tournesols » (《向阳花》). 
					Comme une manière d’apprivoiser le temps et ce qu’il 
					comporte de douloureux. 
					
					 
					
						
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							Tournesols |  | 
					
					
					
					 
					
					Il s’est 
					retiré à la campagne, près de Nankin, mène une vie 
					tranquille et prépare un roman qui sera, forcément, un roman 
					policier. Comme l’a dit Haruki Murakami : écrire un roman, 
					c’est apprendre à se faire un ami du temps. Lutter contre le 
					temps, c’est lutter contre l’ennui, dit Chong’an.