Auteurs de a à z

 
 
 
              

 

 

Jiang Zilong 蒋子龙

Présentation

par Brigitte Duzan, 31 mars 2014

     

La Révolution culturelle n’a pas eu que des conséquences négatives. Dans le domaine littéraire, elle a eu entre autre effet de favoriser l’émergence de jeunes auteurs amateurs dont la plupart n’ont pas survécu après 1976 ; mais un petit groupe de jeunes écrivains apparus au début des années 1970 sont devenus écrivains professionnels à la fin de la décennie et au début de la suivante ; parmi eux,une voix originale : celle de Jiang Zilong (蒋子龙), qui se distingue en prenant pour thème principal de ses récits le monde ouvrier et les premiers développements industriels des années 1980 auxquels il a participé.

      

Un petit paysan devenu ouvrier rêvant d’être écrivain

      

Né en 1941 dans une famille paysanne à Cangxian (沧县) dans le Hebei, Jiang Zilong a passé son enfance à garder les moutons pour aider ses parents. En 1950, cependant, son

 

Jiang Zilong

frère s’étant installé à Tianjin, c’est là qu’il va pouvoir faire ses études secondaires, en rêvant déjà de devenir écrivain.

       

De l’usine à la marine…

      

En 1958, à la fin du collège, il entre en apprentissage dans une usine de machines-outils. Il termine sa formation en 1960, mais, cette même année, est admis dans l’école de cartographie de la marine. Il y reste deux ans, pendant lesquelles, à ses heures de loisir, il met sa plume au service du groupe littéraire et artistique de propagande, ce qui lui fournit une première occasion de fourbir ses armes d’écrivain.

      

En 1962, il est affecté à une unité active où il reste jusqu’en 1965, mais il continue à écrire. Il réalise en 1962 un reportage sur un marin modèle qui est publié dans le Quotidien de la Marine.

      

…et retour à l’usine

      

En 1965, cependant, il est démobilisé et doit revenir travailler à l’usine initiale, à Tianjin. C’est cette année-là qu’il publie sa première nouvelle, « Le nouveau chef de station » (《新站长》), sur le responsable d’une station météo.

      

Il va rester à l’usine jusqu’en 1982.Il finit par être promu chef d’atelier, et nommé secrétaire adjoint du comité du Parti de son atelier. En même temps, il devient responsable du journal de l’usine. Et il continue d’écrire en s’inspirant du monde du travail autour de lui.

      

Ecrivain amateur avant et après Mao

      

En 1972, il devient écrivain amateur. Il publie des nouvelles inspirées de la vie de l’usine, dont, par exemple, « Trois grutiers » (《三个起重工》). Mais, en 1975, une de ces nouvelles lui vaut d’être critiqué pour ne pas suivre la ligne politique du moment ; elle estclassée parmi les « herbes vénéneuses ». Jiang Zilong fait son autocritique et essaie de se rattraper en écrivant une nouvelle plus conforme aux directives de l’heure, mais devient une cible facile de critiques après la mort de Mao.

 

Le directeur Qiao prend ses fonctions

                   

Pages du bloc-note du secrétaire de l’usine, édition 1982

 

Il ne revient en grâce qu’en 1979. Cette année-là, hospitalisé, il écrit trois nouvelles en trois mois, dont la troisièmelui vaut un énorme succès : « Le directeur Qiao entre en fonction » (《乔厂长上任记》). Dépeignant le marasmeindustriel sous la Bande des Quatre et les difficultés de la réforme industrielle, la nouvelle décrit l’action du directeur Qiao qui parvient à mettre en œuvre des réformes radicales dans son usine, en particulier 

en établissant des règles d’évaluation individuelle du travail dechacun. Il épouse son amour de toujours, une femme ingénieur, formée en Union soviétique, qui devient conseiller technique dans l’usine.

     

La nouvelle est publiée dans le Journal des ouvriers et lue à la radio. Non seulement elle obtient en 1980 le prix de la meilleure nouvelle de l’année 1979, mais elle suscite un vif intérêt dans tout le pays, des séminaires sont même 

organisés sur le sujetdans de nombreuses usines. Le directeur Qiao devient un modèle de dirigeant réformiste dans toute la décennie 1980.

     

En 1980,  « Pages du bloc-notes du secrétaire de l’usine » (《一个工厂秘书的日记》) fait le portait d’un dirigeant totalement différent, qui passe son temps à soigner ses contacts et essaie de faire plaisir à tout le monde, mais n’arrive à rien, ruine sa vie familiale aussi bien que professionnelle et finit par noyer ses problèmes dans l’alcool.

     

En 1981, Jiang Zilong prend pour thème les ouvriers eux-mêmes, et non plus les cadres dirigeants, dans sa nouvelle moyenne « Les mille couleurs de l’arc-en-ciel » (《赤橙黄绿青蓝紫》). Jiang Zilong y oppose une jeune femme, activiste pendant la Révolution culturelle, qui devient directrice dans une société de transport où les conducteurs, considérés comme des hooligans, lui font la vie dure à cause de son passé ; mais l’un d’eux tombe amoureux d’elle, impliquant que les divergences de pensée et de vie, tout comme les différences de couleur, ne sont pas irréductibles et que

 

         

Les mille couleurs de l’arc-en-ciel, édition1981

chacun peut devenir un travailleur responsable dans les bonnes conditions.

          

Les mille couleurs de l’arc-en-ciel, le film

 

La nouvelle a été adaptée au cinéma ; le film, réalisé par Jiang Shusen (姜树森) au studio de Changchun, est sorti en 1982 sous le titre anglais « Three-Dimensional People », mais le même titre chinois que la nouvelle.

      

La même année 1981, Jiang Zilong publie deux recueils de nouvelles, dont « Les défricheurs » (《开拓者》),  publiée aux éditions de la jeunesse chinoise (中国青年出版社).

      

Ecrivain professionnel de Tianjin

     

Fort de ces succès,Jiang Zilong devient écrivain professionnel en 1982, et, en 1985, entre autres fonctions officielles, vice-président de l’association des écrivains de Tianjin. Il devient membre du Parti et, en 1987, rédacteur du journal Littérature de Tianjin (《天津文学》).

       

Il publie alors « Les vœux du Nouvel An » (《拜年》), puis deux recueils, l’un de ses nouvelles, l’autre de ses romans. Parmi les romans, le premier écrit par Jiang Zilong, publié en 1986, « L’esprit serpent » (《蛇神》), est également inclus dans les vingt-cinq ouvrages de la collection des « romans représentatifs » de la période contemporaine lancéeen mai 2004 par l'association des écrivains.

     

Jiang Zilong continue d’écrire, et toujours sur ses sujets favoris, mais légèrement actualisés. En 2008, il a ainsi  publié une sorte de fable moderne, « Un empire paysan » (《农民

 

L’esprit serpent, édition 1986

              

L’empire paysan

 

帝国》), dans la revue Littérature du peuple. Le roman a figuré dans la sélection finale du 8ème prix Mao Dun.

              

Le personnage principal, Guo Cunxian (郭存先), est un paysan ordinaire, simple et dur au à la tâche, soucieux d’améliorer le sort de ses congénères ; il investit son propre argent pour développer l’industrie dans le village, mais se prend au jeu, fait fortune et devient âpre au gain. Transformé en despote local, il voit ses affaires péricliter, et il est finalement emprisonné pour avoir violé la loi.

      

Guo Cunxian apparaît ainsi comme le reflet déformé du directeur Qiao, comme si les espoirs de l’ouverture n’avaient donné que des fruits dégénérés.

 

      


     

Traduction en français

La vie aux mille couleurs, recueil de nouvelles, Littérature chinoise, collection Panda, 268 p.

A la recherche du chapeau, très courte nouvelle traduite par Françoise Naour, dans l’anthologie « Les rubans du cerf-volant », Gallimard Bleu de Chine 2014, pp 35-38.

      

Traduction en anglais

Nouvelle « The Foundation », à lire en ligne :

Mao’ Harvest ; Voices from China’s New Generation, Helen Siu/Zelda Stern, Oxford University Press, 1983, pp. 128-146

http://books.google.fr/booksid=bm9SHO1fMnwC&pg=PA127&lpg=PA127&dq=jiang+zilong&source=

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