Auteurs de a à z

 
 
 
            

 

 

Liang Yusheng 梁羽生

1924-2009

Présentation

par Brigitte Duzan, 24 juillet 2014, actualisé 28 mars 2015

        

Liang Yusheng est connu et célébré comme père fondateur, au début des années 1950 à Hong Kong, de la « nouvelle école » de romans de wuxia (新派武侠小说的开山祖师: c’est son roman « Le tigre et le dragon s’affrontent dans la capitale » (《龙虎斗京华》), dont la publication en feuilleton a débuté le 20 janvier 1954, qui en est l’événement fondateur (1).

         

Il a ensuite été éclipsé par l’immense popularité de Jin Yong (金庸), savamment orchestrée et médiatisée, mais il a lui-même revendiqué un style différent, et œuvré à la reconnaissance du roman de wuxia comme genre littéraire à part entière, participant du roman historique et du roman de mœurs.

         

Guangxi : Enfance et formation

         

Liang Yusheng est né en mars 1924 dans le village de Tunzhi (屯治), dans le district de Mengshan (蒙山), dans la province méridionale du Guangxi (广西).

 

Liang Yusheng jeune

         

Famille et éducation traditionnelles

         

La maison de la famille Chen au village de Tunzhi, Mengshan

 

Il est né dans une famille de lettrés et s’appelait Chen Wentong (陈文统). Son père, Chen Xinyu (陈信玉), mort en 1950, au moment de la réforme agraire, était un patriote de Mengshan (蒙山县爱国乡绅) typique de la fin des Qing et des débuts de la République ; il était praticien de médecine chinoise et connaissait à fond le traité fondamental dans ce domaine, le Bencao Gangmu (《本草纲目》) ; il est réputé avoir fourni gratis les plantes médicinales idoines pour soigner les malades dans son entourage.

        

Le jeune Wentong a donc reçu une éducation classique. On dit qu’il pouvait réciter les trois cents poèmes Tang à l’âge de sept ans. Il en a gardé toute sa vie une passion pour les vers parallèles (duilian 对联).

        

A 14 ans, en 1938, il a une crise de malaria et doit rester chez lui pendant six mois. C’est évidemment une période mise à profit pour lire, mais aussi étudier les mathématiques. Parmi ses lectures figure le manuel d’échecs chinois (象棋棋谱) : Liang Yusheng en gardera l’amour des échecs, ainsi que du jeu de go.

         

Etudes pendant la guerre

         

En 1941, à l’âge de 17ans, il est envoyé au collège de Guilin (桂林). C’est là qu’il écrit ses premiers poèmes, publiés dans le journal Libao (《力报》). Mais c’est là aussi qu’il découvre la littérature moderne et le cinéma.

 

Bencao gangmu

         

Jian Youwen

 

En 1943, le collège terminé, il loue une chambre pour préparer le concours d’entrée à l’université du Guangxi. Mais, l’année suivante, à cause de la guerre, il est obligé de revenir chez lui. En septembre, parmi les réfugiés qui se replient à Mengshan sont le lettré Rao Zongyi (饶宗颐) et l’historien Jian Youwen (简又文) qui devient le mentor de Wentong.  

         

Mais en octobre 1944, Guilin est occupée par les Japonais. Début 1945, c’est au tour de Mengshan. La famille Chen s’enfuit dans les montagnes, avec Jian Youwen et d’autres. La

zone est libérée en mai. Les Chen reviennent chez eux, mais, en septembre, Wentong suit Jian Youwen qui revient dans le Guangdong. Il entre à l’université de Lingnan (广东岭南大学), pour étudier la chimie, puis l’économie internationale l’année suivante.

         

En 1946, il fait la connaissance de Jin Yingxi (金应熙), futur grand historien de Hong Kong, et passe dans le département de littérature chinoise. A l’automne 1947, il entre à la rédaction de l’hebdomadaire de l’université (《岭南周报》), dont il devient rédacteur en chef au début de l’année suivante. Il y publie des articles sous les pseudonymes de Huan Ping (幻萍) et Feng Xianhua (冯显华).

        

En juin 1949, devant la progression de l’armée de Libération, il s’enfuit à Hong Kong. Sur la recommandation d’un de ses anciens professeurs, il est pris à l’essai par le

 

Années 1940 : l’équipe du Ta Kong Pao, avec Liang Yusheng et Luo Fu (3ème et 4ème à partir de la g.)

Ta Kung Pao (ou Dagongbao 《大公报》), comme traducteur d’anglais. Fin décembre, il devient assistant rédacteur du supplément hebdomadaire du journal. Le Guangxi est totalement "libéré", et il reste sans nouvelles de sa famille. Sa vie est désormais à Hong Kong. Il a vingt-cinq ans, et s’appelle encore Chen Wentong.

         

Hong Kong : Père de la « nouvelle école » du roman de wuxia

         

Journaliste au Ta Kung Pao

         

En 1950, il devient responsable de diverses publications hebdomadaires de Hong Kong, mais son activité principale est au Ta Kung Pao dont il devient membre du comité éditorial. Il publie des articles sur l’histoire… et les échecs, sous les pseudonymes Chen Lu (陈鲁) et Liang Huiru (梁慧如).

         

En octobre, cependant, quand est créé le Xin Wan Bao ou New Evening Post (《新晚报》), il entre au journal, à l’appel du rédacteur en chef, Luo Fu (罗孚).

         

Fin 1950, ayant appris que son père a été l’objet de fausses accusations et arrêté (c’est la période de la réforme agraire en Chine continentale), il revient à Mengshan ; mais il rencontre en chemin un camarade de classe qui le dissuade de continuer, en lui expliquant qu’il risque sa vie inutilement. Chen Wentong revient à Hong Kong. Son père est exécuté peu après.

         

Avec Luo Fu au Xin Wan Bao

         

En mars 1951, Chen Wentong devient le responsable éditorial d’un supplément du Xin Wan Bao : « Les mille et une nuits » (ou « Divertissements des nuits arabes » 天方夜谭”) (2). En même temps, Cha Liangyong (ou Louis Cha 查良镛), c’est-à-dire le futur Jin Yong, est chargé d’un autre supplément, « L’après-midi à la maison de thé » (下午茶座”). Luo Fu a réuni les deux auteurs qui vont faire de son journal la gazette en vue de Hong Kong, celle que l’on s’arrache à la sortie de chaque nouvel épisode des romans de wuxia qui y sont publiés, le journal qui fait monter en flèche le prix du papier à Hong Kong, pour paraphraser l’expression courante (luòyángzhǐguì 洛阳纸贵).

         

En attendant, en mars 1953, sous les pseudonymes de Feng Yuning (冯瑜宁) et Li Furen (李夫人), Chen Wentong crée deux nouvelles rubriques dans le Xin Wan Bao : « Discussion littéraire au salon de thé » (茶座文谈) et « La boîte à lettres de Li Furen » (李夫人信箱”).

         

A la fin de l’année, quand est annoncé le match devant opposer les deux spécialistes d’arts martiaux Wu Gongyi (吴公仪) et Chen Kefu (陈克夫) qui va mobiliser la presse hongkongaise pendant plusieurs semaines et avoir pour conséquence inattendue de lancer la publication impromptue de nouveaux romans de wuxia(1), une nouvelle rubrique est ajoutée au Xin Wan Bao : « Une info par jour » (一日一联”).

         

Naissance de l’auteur de romans de wuxia Liang Yusheng

         

C’est le Xin Wan Bao qui offre en effet la couverture la plus complète de ce match historique entre deux membres de deux écoles rivales d’arts martiaux, match soigneusement orchestré et médiatisé qui se terminera en queue de poisson puisqu’il sera arrêté avant qu’un vainqueur ait pu être proclamé, mais qui a pour effet de provoquer un phénomène de liesse générale et de passion populaire pour les arts martiaux – et ce d’autant plus que la pratique en avait été interdite par le Guomingdang et qu’il se combine avec un mouvement de patriotisme chinois et de fierté nationale.

         

Ancienne édition du premier roman

« Combat du tigre et du dragon dans la capitale »

 

Le résultat dérivé est un regain d’intérêt pour la littérature de wuxia, non point spontané, mais créé de toutes pièces par le rédacteur en chef du Xin Wan Bao, Luo Fu, avec un véritable génie d’anticipation des goûts du public. Devant la ferveur populaire déclenchée par le match, le 17 janvier, il décide de publier des romans de wuxia dans son journal. Le 19 janvier 1954, il passe un placard publicitaire pour annoncer des pages consacrées à un roman de wuxia (本报增刊武侠小说), et le lendemain, 20 janvier, est publié le premier épisode du roman annoncé :

« Combat du tigre et du dragon dans la capitale » (《龙虎斗京华》), titre dont le symbole, bien sûr, ramenait au match que tout le monde avait en tête.

         

L’épisode avait été commandé à Chen Wentong qui l’avait écrit en un jour, et le signa d’un nouveau pseudonyme : Liang Yusheng (梁羽生). Celui-ci devait avoir plus de longévité que les précédents, puisque ce premier roman devait être suivi de trente-quatre autres en l’espace de trente ans. Il n’était pas choisi au hasard : Yusheng (ou né de Yu 羽生) est en hommage à l’auteur de wuxia de la « vieille école » que Liang Yusheng admirait le plus : Gong Baiyu (宫白羽) (1) ; il se posait ainsi nettement en successeur des auteurs de wuxia du début du vingtième siècle.

         

Quant à Liang (), la référence est historique : il s’agit de l’avant-dernière des dynasties de la période dite des « dynasties du Nord et du Sud » (南北朝 420-589), juste avant la réunification de l’empire par la dynastie des Sui ; la dynastie de Liang (502-557) fut une période de troubles, mais aussi d’épanouissement culturel : parce que l’empereur Wu de Liang était un lettré et un poète, il s’entoura d’artistes et gens de lettres, encouragea la culture et le développement du système éducatif… Liang Yusheng invoquait ainsi un précédent qu’il appelait sans doute de ses vœux dans une période tout aussi troublée.

         

Son premier roman fut ensuite édité, en septembre, avec un immense succès. En novembre, le Xin Wan Bao commença la publication d’un second roman, « Dragons et Serpents des contrées sauvages »  (《草莽龙蛇传》). L’année suivante, en 1955, Luo Fu demanda aussi un roman de wuxia à Cha Liangyong qui devint ainsi Jin Yong… 

         

Liang Yusheng était devenu « l’accoucheur du roman de wuxia de la nouvelle école » (新派武侠小说的催生婆”). Il n’avait pourtant, jusqu’alors, jamais été particulièrement enthousiasmé par ce genre de littérature. A partir de février 1956, il commença aussi à publier des romans dans le Ta Kung Pao, alternant dès lors les publications dans les deux journaux.

         

Il n’en abandonna pas pour autant ses autres passions, lançant par exemple une rubrique sur les échecs chinois dans le Ta Kung Pao en septembre 1955, toujours sous le pseudonyme de Chen Lu (陈鲁).

         

Trente années d’écriture et retraite à Sydney

         

Les grands succès des années 1956-1960

        

Le 1er mai 1957, Liang Yusheng épouse Lin Cuiru (林萃如), une nièce de l’épouse du rédacteur en chef adjoint du Ta Kung Pao. Peu après, les jeunes mariés partent en voyage de noces sur le Continent. Pendant ce temps, son cinquième roman paraissait dans le Ta Kung Pao : « Les trois héroïnes du Jianghu » (江湖三女侠).

         

Si le premier avait été écrit et publié très vite, sous la pression des circonstances, Liang Yusheng a très vite affiné son style et acquis un ton original. En fait, c’est de ces années 1956-1957 que datent deux de ses ouvrages les plus réussis et les plus célèbres : « La légende de la diablesse aux cheveux blancs » (Baifa Monü zhuan魔女传) et « Les sept glaives du mont Tianshan »  (Qijian Xia Tianshan七剑下天山).

 

Les sept épées du mont Tianshan,

livre illustré, édition 1984

        

Les sept épées, une page illustrée

 

Qijian Xia Tianshan (七剑下天山) est paru dans le Ta Kung Pao de février 1956 à mars 1957, c’est le troisième roman publié par Liang Yusheng, et l’un des plus connus, surtout depuis qu’il a été adapté par Tsui Harkau cinéma en 2005 sous le titre « Seven Swords » (七剑) (3), et à la télévision en 2006, sous le même titre.

        

Cependant, pratiquement en même temps, avec un décalage de six mois au départ, Liang Yusheng publiait un quatrième roman dans un autre journal : « L’étrange chevalier errant au nord des passes » (Saiwai Qixia Zhuan塞外奇侠传). C’est

en fait la préquelle de Qijian, Liang Yusheng a même ajouté un prologue pour expliquer la chronologie de ses histoires.

         

Quant à Baifa Monü zhuan (魔女传), le roman a été sérialisé dans le Xin Wan Bao d’août 1957 à septembre 1958, mais on retrouve beaucoup des personnages des deux romans précédents ; il se passe cependant sous la dynastie des Ming, et non des Qing, on peut donc considérer qu’il est chronologiquement antérieur. Ce roman a été adapté dès 1959, mais l’adaptation la plus célèbre date de 1993, avec Brigitte Lin et Leslie Cheung.

         

Tous ces romans sont construits sur une trame historique, ou pseudo historique, qui fait la part belle aux intrigues liées aux tribus nomades du nord ou du nord-ouest, comme chez Jin Yong, et comme beaucoup de romans de wuxia du début du siècle. Le lien est très net. Mais le personnage de la « diablesse aux cheveux blancs » est une originale variation sur le thème de la nüxia.

         

A la fin des années 1950, Liang Yusheng était l’un des écrivains les plus populaires à Hong Kong. En 1959, quand fut

 

La diablesse aux cheveux blancs

Baifa Monü zhuan, édition 1985

créé le Commercial Daily (《商报》), le rédacteur en chef voulut publier des romans de wuxia pour développer un lectorat populaire, et c’est à Liang Yusheng qu’il pensa. C’est ainsi que son neuvième roman fut publié dans ce journal, de novembre 1959 à mai 1960 : « La romance de l’épée » (Huanjian Qiqing Lu《还剑奇情录》).

         

En 1962, dans l’atmosphère de dégel suivant la catastrophe du Grand Bond en avant, il est même invité à Pékin, avec une délégation de journalistes de Hong Kong, pour participer aux célébrations de la Fête nationale.

         

Il continue d’écrire tout en participant à diverses manifestations et compétitions d’échecs et de go.

         

Années 1980 : écrivain consacré, promoteur du roman de wuxia

         

Avec son épouse

 

A partir du début des années 1980, dans le climat d’ouverture post-maoïste, le wuxia devient un sujet d’étude et de discussion dans toute la Chine, mais aussi dans l’Asie du Sud-Est. Liang Yusheng est invité à participer aux divers colloques qui sont organisés. Ainsi, en septembre 1984, il est à Singapour pour donner deux conférences dont les titres parlent d’eux-mêmes : « Du roman de wuxia au roman historique »   (从武侠小说到历史小说), et « Le roman de wuxia et la société moderne » (武侠小说与现代社会).

         

En 1987, le roman de wuxia devient une discipline d’étude et de recherche à l’université chinoise de Hong Kong (香港中文大学).

        

Après avoir été « l’accoucheur de la nouvelle école », Liang Yusheng devient ainsi l’un des promoteurs du roman de wuxia non seulement en tant que phénomène littéraire, mais aussi comme élément fondamental de la culture populaire dans la société moderne, comme dans le passé.

         

Retraite en Australie

        

Cependant, en septembre 1987, après un voyage à Mengshan en février, il part vivre en Australie avec son épouse et s’installe à Sydney. Il a cessé d’écrire trois ans plus tôt, annonçant « baisser l’épée » (4). Son dernier roman, « Une épée de Wudang » (Wudang Yijian武当一剑), est sérialisé de mai 1980 à août 1983 dans le Ta Kung Pao. Il ne cesse pas toute activité pour autant.

 

Les sept épées du mont Tianshan,

livre illustré, édition 1984

           

Les sept épées, une page illustrée

 

En janvier 1994, Sydney organise sa fête annuelle des écrivains sur le thème du roman de wuxia « chinois » (中国武侠小说专题研讨). Liang Yusheng y participe en donnant une conférence : « Le wu et le xia chinois » (中国的武与侠”). Il en profite pour rendre un hommage appuyé à Jin Yong qui y est invité, et se réconcilier avec lui, après un froid qui durait depuis un article de 1966 qui n’avait pas plu à Jin Yong, et dont Luo Fu avait révélé que c’était Liang Yusheng qui l’avait écrit (1).

        

En septembre 1995, c’est Pékin qui organise une journée d’étude sur le roman de wuxia. Jin Yong et Liang Yusheng sont tous deux honorés du prix « de l’épée d’or » (金剑奖”). Les éditions et rééditions de l’œuvre de Liang Yusheng se multiplient, y compris l’édition complète des 35 romans, plus les textes complémentaires, dont les essais (《梁羽生散文》). Il multiplie aussi les interviews et les conférences.

         

En 2001 la municipalité de Mengshan décide de lui dédier un musée : le parc Liang Yusheng (梁羽生公园). C’était à l’origine le parc Aoshan (鳌山公园), érigé en 1762 mais détruit pendant la Révolution culturelle. Il a été reconstruit, avec sa pagode, et inauguré en octobre 2005.

        

Liang Yusheng a longtemps été de santé fragile. Un cancer de la vessie a été diagnostiqué en 2004. Après avoir eu un infarctus en 2007, lors d’une visite à

 

Liang Yusheng peu avant sa mort

Hong Kong, il est rentré à Sydney où il est décédé le 22 janvier 2009, à l’âge de 85 ans.

         

Le musée de Mengshan avec le parc Liang Yusheng

 

 

 

         

         

Notes

(1) Voir : L’histoire du roman de wuxiaau 20ème siècle 

(2) Tianfang (天方) est une ancienne appellation pour La Mecque (麦加) et plus généralement l’Arabie.

(3) Sur ce film, voir chinesemovies … (à venir)

(4) 1984 est la date de signature de la Déclaration conjointe sino-britannique sur la question de Hong Kong, qui prévoyait la rétrocession du territoire à la Chine populaire en 1997. La signature de ce document a entraîné une vague d’émigration et une atmosphère de crise à Hong Kong. L’émigration a nettement augmenté en 1987, à près de 50 000 personnes par an.

          

Les publications, par ordre chronologique, avec la référence du journal et la date de publication, et les textes, chapitre par chapitre :

http://www.wgrab.com/zh-cn/article/liang-yu-sheng/chapter/3/

         


         

On cherche en vain une traduction en français d'un roman de Liang Yusheng : il n'y en a toujours pas. Robert Kaser le déplorait déjà en janvier 2009, à la mort de l’auteur : « …force est de constater qu'aucune œuvre de lui n'est encore disponible dans notre langue. C'est pourtant un auteur qui a compté dans l'évolution du roman de cape et d'épée chinois… »
         
Lire l’article entier : http://jelct.blogspot.fr/2009/01/la-disparition-dun-geant.html
         


        

Notes complémentaires sur deux romans

         

1.       « La légende de la diablesse aux cheveux blancs »

Baifa Monü zhuan魔女传

Roman sérialisé dans le Xin Wan Bao d’août 1957 à septembre 1958.

         

Après le tout premier roman publié dans le même journal en 1954, c’est le cinquième de la série publiée entre août 1954 et décembre 1958. La publication de Baifa Monü zhuan s’est faite en parallèle avec celle, dans le Da Gong Bao,  des « Trois héroïnes du jianghu » (江湖三女侠).

          

Les quatre autres romans de la série se passent sous la dynastie des Qing, Baifa Monü zhuan sous celle des Ming. Le roman est lié aux deux publiés précédemment, Saiwai Qixia Zhuan (塞外奇侠传) et Qijian Xia Tianshan (七剑下天山), dont il représente une préquelle.

         

Le contexte du récit

         

L’histoire débute pendant les dernières années du règne de l’empereur Wanli des Ming (万历 ou Ming Shenzong 明神宗), c’est-à-dire les années 1610, pendant lesquelles l’empereur,

 

Baifa Monü zhuan

après un brillant début de règne, usé par les rivalités de la cour, se retire des affaires de l’Etat et se consacre surtout à la désignation de son successeur et la construction de sa tombe. C’est le début du déclin de la dynastie, menacée par la puissance croissante des eunuques à l’intérieur et des Jürchens à l’extérieur, sous la conduite de Nurhaci.

         

L’empereur Wanli

 

Celui-ci était initialement vassal de l’empire chinois, mais, constatant l’affaiblissement du pouvoir impérial, unifie les tribus et renforce son contrôle des zones au nord de la frontière chinoise, formant la dynastie des « Jin postérieurs » (). En 1610, il rompt les relations avec l’empire, en demandant que lui soit versé un tribut, ce qui équivalait à une déclaration de guerre.

         

En 1619, la bataille de Sarhu (萨尔浒之战) se termine par la défaite de l’armée Ming après cinq jours de combat, et malgré la supériorité numérique de l’armée chinoise (10/3) : celle-ci avait perdu la moitié de ses troupes et 70% de ses approvisionnements. C’était la voie ouverte à la conquête de l’empire chinois par les Jürchen rebaptisés Mandchous en 1635 par le fils et successeur de Nurhaci, Hong Taiji (洪太极), premier empereur à titre posthume de la dynastie des Qing…

        

L’appréciation du récit de Liang Yusheng suppose la connaissance de l’atmosphère délétère dans l’entourage de l’empereur et de l’affaiblissement du pouvoir impérial autour de 1620. Une partie de l’intrigue repose au départ sur les complots à la cour après la mort de l’empereur Wanli.

         

Le récit

         

Lian Nichang (练霓裳) est une femme redoutable, surnommée "Rakshasa de jade" (罗刹) (1), qui, à la tête d’une bande de hors-la-loi, met son épée au service des victimes d’injustices. Par ailleurs, une conspiration visant à éliminer le prince héritier est découverte ; un membre de la secte Wudang (武当派), Zhuo Yihang (卓一航), aide le prince à faire la vérité dans cette affaire, et réussit, ce faisant, à blanchir le nom de son père qui est mort après avoir été faussement accusé d’en avoir fait partie.

         

Sur le mont Huashan (华山), il rencontre au hasard d’un orage une belle jeune femme dont il tombe amoureux. Le lendemain, il se joint à des hors-la-loi décidés à éliminer la Rakshasa de jade, mais, lorsqu’ils vont engager le combat, il a la surprise de découvrir que c’est la jeune fille qu’il a rencontrée la veille, et, d’autre part, que les hors-la-loi qu’il voulait aider sont des espions au service des Mandchous. Il change alors de camp pour aider Lian Nichang.

        

Ils rencontrent alors Yue Mingke (岳鸣珂), qui est un attaché militaire du général Xiong Tingbi (熊廷弼). Lian Nichang apprend qu’il a été l’élève d’un maître réputé, Huo Tiandu (霍天都), époux et rival de Ling Muhua (凌慕华), la femme qui l’a adoptée et formée, car, orpheline, elle avait été recueillie toute petite par des loups. Ling Muhua a créé une technique d’arts martiaux capable de contrer celle de son mari, dont Lian Nichang a hérité.

         

Sur ces entrefaites, à la mort de Wanli, son successeur l’empereur Taichang (泰昌) meurt brusquement après un règne d’un mois [28 août-26 septembre 1620], après avoir ingéré de mystérieuses « pilules rouges ». C’est le jeune empereur Tianqi (天启) qui lui succède, en janvier 1621. L’eunuque Wei Zhongxian (魏忠贤) et la nourrice de l’empereur Madame Ke (客氏) en profitent pour usurper

 

Baifa Monü zhuan, édition 1993

le pouvoir, former une clique, et persécuter les opposants. Lian Nichang, Zhuo Yihang et Yue Mingke s’allient pour ruiner leurs plans.

                      

Yue Mingke, cependant, est profondément affecté par la mort tragique de la femme qu’il aimait, Tie Shanhu (铁珊瑚), fille de Tie Feilong (铁飞龙), parrain de Lian Nichang. Prise en otage par des sbires de Wei Zhongxian qui pensaient ainsi forcer Yue Mingke à se rendre à eux, Tie Shanhu a été mortellement blessée en tentant de leur échapper. Déséspéré, Yue Mingke se fait moine, prend le nom de "Vénérable Maître Huiming" (晦明禅师), et se réfugie au mont Tianshan où il continue à se perfectionner en arts martiaux.

          

Pendant ce temps, Zhuo Yihang et Lian Nichang sont liés d’un amour de plus en plus profond. Zhuo Yihang doit devenir le nouveau maître de la secte Wudang, mais, comme Lian Nichang a une longue histoire d’opposition sanglante à la secte, la succession est contestée par beaucoup. Pendant un combat entre la jeune femme et les aînés de la secte, Zhuo Yihang attaque Lian Nichang par méprise ce qui lui fait croire qu’il l’a trahie. Elle tombe dans un profond sommeil, et, quand elle s’en éveille, ses cheveux sont devenus uniformément blancs. Désespérée, elle va se réfugier au mont Tianshan pour y vivre en recluse.

          

Des années plus tard, Lian Nichang est devenue célèbre dans la région du mont Tianshan pour ses exploits martiaux contre les bandits et ruffians du coin, on l’appelle la « diablesse aux cheveux blancs ». Zhuo Yihang, lui, souffre d’une longue dépression ; parti à la recherche de Lian Nichang, quand il l’a retrouvée, elle a refusé de lui pardonner. On lui a dit qu’il y a une fleur très rare qui peut rendre leur couleur à des cheveux prématurément blanchis, mais qu’elle ne fleurit qu’une fois dans un cycle de soixante ans. L’ayant trouvée, il veille à ses côtés, dans l’espoir qu’elle va fleurir un jour et lui permettre de retrouver l’amour de Lian Nichang.

         

Un style très littéraire

         

Le roman est divisé en 32 chapitres (2). Chacun est introduit par deux vers qui en donnent une synthèse, comme dans les romans à chapitres classiques (章回小说). Ainsi au début du premier chapitre :

铁矢神弓少年扶巨宦 Un jeune homme, flèche d’acier, arc divin, assiste un haut fonctionnaire

金鞍宝马大盗震虚声 Un bandit de grand chemin, noble cheval, selle d’or, fait tomber les masques.

         

A la suite de ces vers introductifs, au début du premier chapitre, Liang Yusheng ajoute une péroraison qui donne un ton de réflexion mi philosophique mi poétique mi bouddhiste à son roman, avec des références complexes :

         

一剑西来,千岩拱列,魔影纵横;问明镜非台,菩提非树,境由心起,可得分明?是魔非魔?非魔是魔?要待江湖后世评!且收拾,话英雄儿女,先叙闲情。
Une épée solitaire apparaît à l’ouest, parmi des milliers de crêtes, une ombre démoniaque erre en liberté ; on dit qu’un miroir lumineux n’a pas de support, que la Bodhi ne vient pas sous un arbre (3), que le monde ne s’appréhende que par le cœur, mais commentfaire ? comment reconnaître qu’un démon est ou non un démon ?  Il faut laisser les générations futures en juger ! Pour nous, maintenant, laissons-nous aller à narrer les exploits des jeunes héros et héroïnes tant que nous avons le loisir de le faire.
风雷意气峥嵘。轻拂了寒霜妩媚生。叹佳人绝代,白头未老;百年一诺,不负心盟。短锄栽花,长诗佐酒,诗剑年年总忆卿。天山上,看龙蛇笔走,墨泼南溟。

Dans les tourmentes de vent et d’orage, la grâce la plus exquise est née du givre glacé. Plaignons cette beauté sans égale dont la chevelure a blanchi avant l’âge ; le vœu fait pour cent ans tient toujours. La courte houe plante les fleurs, le long poème accompagne le vin, la mémoire des faits d’armes ainsi chantée est perpétuée d’année en année. Sur le mont Tianshan, regardons dragons et serpents paraître sous la plume, l’encre aspergeant les mers du sud.

         

Liang Yusheng ajoute : ——调寄沁园春 écrit dans le style de Qin Yuan Chun (4).

         

Cette introduction est savamment concoctée de façon à replacer le roman de wuxia dans le cadre de la littérature classique, à la croisée de la littérature populaire. Liang Yusheng sera l’un des grands promoteurs de la littérature de wuxia, genre auquel il s’est efforcé de donner ses lettres de noblesse.

          

Le récit commence ensuite par une très courte description de paysage et la présentation de quelques personnages. Au cinquième alinéa, la date est précisée : 43ème année du règne de l’empereur Wanli, c‘est-à-dire 1615…

满洲崛起东北,时时内侵,神宗加派辽饷达田赋总额二分之一以上,全由农民负担,加以西北地瘠民贫,盗贼纷起

les Mandchous se soulevaient au nord-est, et envahissaient souvent le pays. L’empereur avait déjà augmenté le montant du budget militaire (5) qui approchait maintenant de la moitié des recettes fiscales, taxes entièrement prélevées sur les paysans. En outre, sur les terres peu fertiles du nord-ouest, les gens étaient très pauvres, et les bandits nombreux.

         

Baifa Monü zhuan, édition 1994

illustrée par Lu Yanguang 卢延光

 

Le décor est planté : les voyageurs qui s’aventurent sur la route peuvent se faire attaquer à tout moment… Le texte est écrit avec brio, dans un style concis, sans détails superflus, mais une richesse de détails qui nécessitent à chaque instant de chercher les sources et les références culturelles. Il fait intervenir une profusion de personnages très colorés, et de nombreuses sectes, dont les principalessont les sectes taoïstes Wudang (武当派) et Emei (峨嵋派) et celle de Tianshan (天山派), que l’on retrouve dans nombre d’autres romans de Liang Yusheng, ainsi que dans ceux de Jin Yong (金庸).

         

C’est une peinture très vivante de la vie de l’empire à la fin des Ming tout comme de la vie du jianghu, un condensé de l’esprit et des techniques du wuxia, mais surtout un formidable portrait de femme.

         

Un superbe portrait de femme

         

Son ombre plane sur les premiers chapitres, la seule mention de son nom suffisant à glacer d’effroi les plus braves. Mais, au chapitre 3, quand Zhuo Yiyang la voit pour la première fois, c’est dans une grotte à mi pente du mont Huashan (华山) où il s’est réfugié pour se protéger d’un orage – la grotte du Dragon jaune (“黄龙洞) ; il la trouve endormie là ; ne sachant pas qui elle est, c’est sa beauté qui le frappe d’abord, et Liang Yusheng en fait une description dans la tradition la plus classique :

 

Affiche pour une adaptation en opéra cantonais, en 1955

         

洞颇深幽,卓一航行到腹地,忽然眼睛一亮,洞中的石板凳上,竟然躺着一个妙龄少女,欺花胜雪,正是在道观中所遇的那个女子,看她海棠春睡,娇态更媚,卓一航是名家子弟,以礼自持,几乎不敢平视。见她睡得正酣,又不敢将她叫醒,心想:若她醒来,岂不误会我是个轻薄之人,于是放轻脚步,走到近洞口之处,盘膝静坐,看外面雨越下越大,虽然心头鹿撞,想那少女颜容世间少见,但却连看也不敢回头去看。

La grotte était profonde et silencieuse ; alors que Zhuo Yihang s’y enfonçait, il fut soudain frappé par une vision splendide : il y avait là, étendue sur un banc de pierre, une jeune fille d’une beauté à humilier les fleurs et triompher de la neige, celle-là même qu’il avait aperçue dans le temple. Dans son sommeil, elle avait un charme encore plus délicat, tel celui des pommiers sauvagesau printemps. Mais Zhuo Yihang était d’une illustre famille qui lui avait inculqué les règles ancestrales de bonne conduite, il n’osa donc pas l’observer ouvertement….

         

La description est celle d’un roman classique décrivant les amours traditionnelles entre « talentueux lettré et belle jeune femme » (才子佳人). Et quand il lui demande son nom, elle lui répond qu’elle a pour patronyme Lian, mais n’a pas de prénom car ses parents sont morts sans lui en donner un, et qu’elle apprécierait donc qu’il le fasse. Ce qui donne à Liang Yusheng une nouvelle occasion de faire un bel exercice de style :

         

外面雨声渐止,一阵风刮了进来,少女衣袂风飘,姿态美妙,卓一航突然想起霓裳羽衣”(6)的说话,冲口说道:叫做霓裳,岂非甚好?

A l’extérieur, la pluie se calmait peu à peu, mais une rafale de vent pénétra dans la grotte, soulevant les pans des vêtements de la jeune fille qui se mirent à flotter légèrement autour d’elle avec une grâce infinie, évoquant dans l’esprit de Zhuo Yiyang l’expression Nichang, Yuyi « jupon d’arc-en-ciel, vêtement de plume » (6); il s’écria donc : « Que dirais-tu de Nichang ? C’est superbe, n’est-ce pas ? »…

        

White-Haired Devil Lady

 

Mais la Rakshasade jade Yu Luosha (罗刹) est l’autre face de la belle et sensible Nichang : cruelle et impitoyable à la fois, élevée par des loups et formée par Ling Muhua (凌慕华). Baifa Monü zhuan est avant tout ce portrait original et attachant de nüxia ; on n’en finirait pas de citer les passages la décrivant, son ombre plane sur tout le roman : « chimérique comme

une illusion ou comme un songe, incertaine telle la pluie ou un nuage » (如幻如梦,疑雨疑云).

         

C’est ce qui en fait l’un des romans les plus populaires de Liang Yusheng, celui qui a été adaptéle plus souvent, au théâtre, à la télévision et au cinéma, avec des résultats très inégaux.

         

Adaptations cinématographiques

    

Outre les adaptations en séries télévisées, Baifa Monü zhuan a fait l’objet de plusieurs adaptations au cinéma :              

1959 Story of the White-Haired Demon Girl 白发魔女传réalisé par Lee Fa, en trois parties (studio Emei)

1980 White Hair Devil Lady白发魔女传film cantonais réalisé par Chang Hsin-yen (张鑫炎), studio de la Grande Muraille

1982 Wolf Devil Woman狼女白鷹film taïwanais réalisé par Zhang Ling (张玲).

1993 The Bride with White Hair 白发魔女传de Ronny Yu (于仁泰) avec Brigitte Lin et Leslie Cheung dans les rôles principaux, adaptation la plus connue, mais surtout célèbre pour son interprétation par les deux acteurs.

Séquelle : The Bride with White Hair 2, réalisé par David Wu (coscénariste du premier)(7)

2014 The White Haired Witch of Lunar Kingdom 白发魔女传之明月天国 réalisé par Jacob Cheung (张之亮), avec Fan Bingbing (范冰冰) et Huang Xiaoming (黄晓明) (8).

 

Wolf Devil Woman

         

         

Notes

(1) Démons de la mythologie hindoue, réputés pour leur propension à perturber les rituels, profaner les tombes, harceler les prêtres et posséder des êtres humains ; ils ont des ongles venimeux et se nourrissent volontiers de chair humaine en putréfaction.

(2) Le texte est en ligne : www.my285.com/wuxia/liangyusheng/bfmn/index.htm

(3) Référence à une parabole célèbre du moine Hui Neng (惠能), sixième patriarche du bouddhisme chan en Chine (638-713). Orphelin et illettré, ayant un jour entendu le Sutra du diamant, il se rend dans un monastère où on le met à travailler à la cuisine. Un jour, un moine érudit, assistant du patriarche du lieu, écrit un poème sur un mur :

身是菩提, Le corps est l’arbre de la Bodhi*,

心如明镜臺。 L'esprit le support d’un brillant miroir.

时时勤拂拭, Qu’à chaque instant avec soin je polis,

勿使惹尘埃。 Pour n'y laisser nulle poussière.

Hui Neng se le fit lire et répondit par ces vers que quelqu’un écrivit pour lui à côté des premiers :

菩提本无树, Il n'y a pas d’arbre de la Bodhi*,

明镜亦非臺。 Le miroir est sans support.

本来无一物, Et puisque rien n'a d'existence,

何处惹尘埃。 Où la poussière pourrait-elle s’attacher ?

*La Bodhiou l’Illumination. Arbre de la Bodhi : l’arbre sous lequel le Bouddha aurait atteint l’Illumination.

(4) C’est-à-dire « Le jardin sous la neige au printemps » qínyuánchūn. xuě《沁园春·雪》un poème de Mao Zedong écrit en février 1936, qui donne la forme des vers, avec le nombre de caractères, mais aussi le ton général.

(5) Le terme utilisé ici, liáoxiǎng 辽饷, désigne le budget militaire destiné à lutter précisément contre les Manchous.

(6) Référence à une anecdote historique concernant l’empereur Xuanzong des Tang (唐玄宗). Il aurait un jour rêvé qu’il était sur la lune où des immortels dansaient au son de mélodies divines, leurs vêtements harmonieusement soulevés par la brise.Quand il s’éveilla, il fit composer un chant intitulé « Nichang Yuyi » (霓裳羽衣”)

(7) Voir l’analyse du film : www.chinesemovies.com.fr/films_Ronny_Yu_Bride_with_White_Hair.htm

(8) Voir chinesemovies….(à venir)

         


            

2.       « Les sept glaives du Tianshan »  Qijian Xia Tianshan七剑下天山

         

(à venir…)

        

 

              

 

 

 

     

 

 

 

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