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Sheng Keyi 盛可以

Extrait du roman « Hymne à la vertu »道德颂

Publié dans le premier numéro de la revue Shouhuo en janvier 2007

《收获》2007年第1

16 décembre 2017

 

古人有一种唯心论的看法:鸟类经常在某棵树上悲鸣,那么用此树的木材制出琴来,弹奏时就会带有哀音。旨邑就是这棵树,而虚无感就是这棵树上的鸟,只要她思考,她的体内总会发出绝望的哀鸣——她看事物的方式太清醒了。她更喜欢卖赝品。她依赖这一行为。她喜欢在赝品的光泽中看幸福的脸们。水荆秋无疑是要把她拉到另一条路上去,那条路面对真相(自己)——他要呈现他对她的价值。而旨邑不过想做一个女人,要一场爱情,并且最好结果,顺带尝试和他做精神上的深入纠缠。他和她的侧重点是完全颠倒的,这和各自的生活状态不无关系。这就表示他们要像摔跤运动员一样,不断地击倒对方,让自己站稳。在现阶段,这种游戏相当刺激,并且毫不妨碍两人的感情。

                           

旨邑无数次回头解读那种温暖,如果说那是劫难蓄谋的开端,又未必不是情欲最初的真实萌动,然后有了一种尘世间的因果关系。她一次次想起那只初次造访的手,连着厚实的身板,连着无边的高原夜色,在他说完他的名字水荆秋之后,那只手从她的腰际滑过起伏的臀部,顺着沟壑往根底挺进,柔韧冰凉,滑行速度匀称,仿佛蛇爬过小山头,她感到蛇的腹部与山的弧度和谐默契。他同时吻她。在藏区行走久了,彼此一股膻味。

 

« Hymne à la vertu »《道德颂》

  

Traduction Caroline Jortay,

pour le 60ème anniversaire de la revue Shouhuo

(lecture du 10 décembre 2017)

 

Les Anciens avaient cette vision éthérée des choses : lorsqu’un arbre sur lequel un oiseau siffleune triste complainte est façonné en qin, l’instrument chantera avec mélancolie. Zhi Yi était cet arbre, et la sensation de vide qui l’habitait était l’oiseau sur la branche ; dès qu’elle se mettait à réfléchir, de son corps fusaitune mélodie de désespoir – elle était trop lucide. Elle préférait vendre des contrefaçons. Ce comportement lui servait de béquille. Elle se plaisait à voir des visages heureux dans le lustre des faux. Shui Jing qiu voulait assurément l’entraîner sur un autre chemin, face à la vérité (à soi-même) – il voulait sans un doute révéler au grand jour sa valeur auprès d’elle. Mais Zhi Yi voulait être femme et elle voulait l’amour, de préférence de ceux qui apportent cette « profonde communion de l’esprit ». Si ses priorités à lui étaient tout à l’inverse, ce n’était pas sans lien avec leur situation. Tels des lutteurs, il leur fallait sans cesse mettre l’autre au tapis pour mieux tenir debout. A ce stade, les jeux de ce genre étaient d’autant plus excitants qu’ils n’endiguaient en rien les sentiments qu’ils avaient l’un pour l’autre.

 

À d’innombrables reprises, Zhi Yi chercherait à décrypter cette chaleur ; si elle était le prélude d’un calvaire annoncé de longue date, l’éruption spontanée du désir de leurs premiers jours n’était pas nécessairement la cause de ce retour de karma. Encore et encore, elle repenserait à la première visite des mains de Jingqiu, à son corps robuste, au paysage nocturne infini des hauts-plateaux. Lorsqu’il finit de prononcer son nom, « Shui Jingqiu », ses mains glissèrent des hanches de Zhi Yi aux collines de ses fesses, avancèrent le long du vallon, souples, fortes, glacées, dans le long et constant glissement du serpent au sommet d’une colline. Elle sentait l’harmonie tacite du ventre du reptile et du galbe de la butte. Au même instant, il l’embrassa. De leurs longues pérégrinations dans cette région tibétaine, ils portaient l’un et l’autre une rance odeur de chèvre.

 

     

 

 

 

 

 

 

     

 

 

 

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