Textes divers

 
 
 
     

 

 

Le 16 mars 2020, depuis Berlin où elle habite, l’écrivaine chinoise Yan Geling écrit une tribune sur l’épidémie de coronavirus. Elle emprunte trois caractères à un poème de Tang Wan : « man, man, man » , , (dissimuler, dissimuler, dissimuler) pour qualifier l’attitude des Chinois face à cette épidémie et les injustices qui ont frappé certains de ses compatriotes dont le docteur Li Wenliang. Publié sur des sites et dans des médias chinois, le texte est rapidement censuré. Parvenant à contourner la censure, il est finalement repris dans des médias étrangers dont le Berliner Bericht et des sites comme le China Digital Times.

 

En empruntant trois mots à Tang Wan : dissimuler, dissimuler, dissimuler.

Par Yan Geling

Traduit par Sébastien Roussillat [1].

 

J

’observe Wuhan de loin. Le printemps a reverdi les bords du fleuve Han. Mais c’est un printemps que beaucoup ne verront pas. C’est un printemps où ceux qui sont partis n’ont même pas pu embrasser leurs familles pour leur dire adieu. C’est un printemps manqué par treize millions de Wuhanais.

 

Je suis à Berlin, mais mon cœur est avec les habitants de Wuhan. Je me suis séquestrée derrière les grilles de fer de ma maison. Et de jour en jour, j’ai raté moi aussi ce printemps précoce. Dans le jardin et partout ailleurs, les fleurs sauvages se sont ouvertes. Dernièrement, ce sont les forget me nots [2]. Leurs fleurs sont petites, mais elles s’étalent en nappes bleues. Un bleu paisible mais triste : « Forget me not, forget me not. » Comme si elles savaient que, dans notre monde, tout finissait par être oublié par manque de fidélité. Mais qui n’a pas envie d’oublier ? Si notre peuple avait une bonne mémoire et se souvenait de

 

Yan Geling, photo Su Tang 苏糖 ©

ces calamités à répétition, notre disque mémoire aurait explosé depuis longtemps.

 

C’est la troisième semaine que je me séquestre. J’ai ainsi l’impression d’être dans l’adversité aux côtés des gens de Wuhan, des gens du Hubei et avec tous mes amis, compatriotes de part et d’autre du monde qui se sont claquemurés. Samedi dernier, le vacarme dans le stade olympique à moins de cinq cents mètres de chez moi faisait trembler le ciel. Il y avait un match de foot. Comme d’habitude. Cette exaltation collective de dizaine de milliers de personnes me donnait encore plus envie de rester cloîtrée derrière mes grilles. Je m’y tenais debout regardant de loin ces supporters de foot berlinois passer en criant devant les murs du jardin. Ils jetaient leurs bières, leurs paquets de chips sur la route. Tout le monde sourit et pardonne à ces supporters qui ont mis leur civisme et leur éducation en vacances. Surtout quand c’est la dernière fois avant l’été qu’ils peuvent s’en donner ainsi à cœur joie. Dorénavant, tous les événements regroupant des foules seront annulés à Berlin. J’ai vraiment mal pour eux. Il n’y a que dans les stades que les Allemands d’ordinaire si réservés et silencieux peuvent ainsi crier à pleine gorge.

 

L’année dernière, en décembre, un ami m’a envoyé les premières nouvelles du virus. C’était une capture d’écran d’un médecin qui alertait ses « petites sœurs infirmières ». J’ai donc prévenu mon amie wuhanaise à Berlin. Sa mère et ses frères et sœurs vivent tous à Wuhan. Mais je doute qu’elle ait tout de suite transmis mon inquiétude à sa famille. Quand il arrive quelque chose aux Chinois, ils dissimulent, dissimulent, dissimulent. Je l’ai fait, tu l’as fait, il l’a fait, elle l’a fait, nous l’avons tous fait. N’est-ce pas ? On couvre la vérité pour ne pas faire l’oiseau de mauvais augure. Ce n’est pas sans partir d’une bonne intention. Puis on dissimule par peur d’avoir des ennuis, de devoir affronter les mises en garde, la panique, le désespoir et la colère, voire l’hystérie des autres. Tout cela, ce sont autant d’énormes désagréments que l’on veut s’épargner. C’est pour cela que seuls ceux qui donnent plus d’importance à leurs responsabilités qu’à ces inconvénients peuvent les assumer. Finalement, ce qui reste une énigme pour moi, c’est la dissimulation : pourquoi donc dissimuler ?  

 

Pour que celui-ci puisse manger tranquillement, cachons-lui cette mauvaise nouvelle. Pour que celui-là passe un bon Nouvel An, dissimulons-lui jusqu’à ce que la fête soit finie, pour que tout le monde puisse bêtement se divertir dans l’inconscience et l’insouciance. C’est toujours ça de pris ! Et puis, pourquoi ne pas espérer qu’avec un peu de chance les malheurs cachés disparaissent d’eux-mêmes ? Qu’avec le temps les grands malheurs en deviennent des petits ? Dissimulons encore un peu… Mais ce virus, il ne fait que trois microns. Quelle main assez vaste pour couvrir le ciel arriverait à le cacher ? Celui-ci est si terrible et si fulgurant qu’on ne peut le dissimuler aussi vite qu’il ne fuit. Combien ont été abusés, en sont morts et viennent nous apprendre par leur disparition que la vérité ne se dissimule pas ?

 

Avant la disparition du docteur Li Wenliang, j’ai pu suivre son agonie pendant plusieurs heures via une amie de Wuhan qui apprenait les nouvelles via une autre connaissance dans la même ville. Pendant ces heures, j’ai prié pour lui. Je me suis même fait la promesse que si le docteur Li survivait, j’arrêterais de boire mon vin rouge préféré. Puis j’ai pris conscience que même ces dernières heures étaient des dissimulations. Des mensonges racontés à tous ceux dans le monde qui se révoltaient contre l’injustice de son sort. Ils ont dissimulé à sa mère, à sa femme, à son fils, et même à l’enfant à naître dans quelques mois que son père allait laisser alors qu’il était encore dans le ventre de sa maman. L’an prochain, au printemps ou au début de l’été, cet enfant allait balbutier pour la première fois « Papa ». À cette pensée, la grand-mère en avait les jambes qui chancelaient : « Comment vais-je le lui expliquer ? »

 

Les responsables de l’hôpital ont dissimulé l’heure véritable du décès de Li Wenliang. Tout en sachant que cela n’aurait aucune utilité, ils n’ont cessé de presser sur le stimulateur cardiaque pour lui masser la poitrine. Mais sous sa peau, c’était des côtes. Il n’était pas fait de béton armé. Comment aurait-il pu supporter toutes ces heures de stimulation cardiaque ? Et même s’ils avaient réussi à faire revenir à la vie son cœur déjà froid, il aurait eu les côtes comme de la porcelaine brisée. Ils l’ont d’abord forcé à s’humilier, puis ils l’ont fracassé comme on brise le jade. Tout cela parce qu’ils avaient peur de leur hiérarchie et du peuple. En haut, les dirigeants qui pourraient briser leur réputation et en bas, le peuple qui pourrait dévoiler le pot aux roses. Pendant ces deux jours, les Chinois, tous les Chinois où qu’ils soient, ont fait bloc et juré de ne jamais oublier celui qui a sonné l’alerte : Li Wenliang. Mais combien de temps durera sa mémoire ? Plus longtemps que celle des forget me nots ?

 

Le docteur Li s’en est allé après avoir subi un tort immense. On peut tuer un homme de cette stature, mais on ne l’humilie pas. D’abord, il a été insulté par ses supérieurs, puis par la police, enfin il a été lynché en public sur toutes les télévisions du pays. Comment ne pas se sentir sali ? Sa mort est là pour nous montrer, pour montrer à tous ceux qui l’ont humilié, aux présentateurs télé qui l’ont dégradé que la vérité se trouvait bien sur ces lèvres entrouvertes qui ne parleraient plus jamais. Qu’elle se trouvait bien dans ce cœur qui ne battrait plus jamais. Existe-t-il quelque chose qui puisse nous faire plus mal que cette vérité, qui puisse nous affliger autant ? Il a fait cela pour nous ! Comment sommes-nous devenus ce peuple qui ne sait même plus distinguer le bien du mal ?

 

Les gens de Wuhan et tous les Chinois lui ont joué une marche funèbre avec leurs sifflets pour l’accompagner sur son dernier chemin. Avec ces sifflets, ils ont libéré leur âme. Li Wenliang a vécu une vie normale. Il aimait sa femme, son fils. Il aimait manger. Comme un père de famille normal, l’autorisation d’avoir un deuxième enfant l’avait rendu heureux et reconnaissant de pouvoir donner un compagnon à son fils. Mais sa mort est comme celle de Jésus : « Si je ne vais pas en enfer, qui y ira à ma place ? » Il s’est sacrifié pour nous illuminer, pour obtenir la rédemption de nos péchés. Car tout cela n’est-il pas un péché ? La mort de tant de gens, l’anéantissement de tant de familles. Quand le péché s’installe à tous les étages, que la nature humaine est ainsi faite que nous accumulons les erreurs, arrivé au plus bas niveau, on finit par séquestrer des gens chez eux, les frapper, faire mourir de faim un enfant de moins de deux ans, interrompre brutalement la partie de cartes qu’une famille jouait pour passer le temps et les violenter un par un. Sera-t-on capable d’oublier tout cela ? Je ne sais pas.

 

Il m’est impossible de ressentir les symptômes d’agonie de cette pneumonie quand elle vous ôte la vie. Mais d’après les récits de nombreux médecins, les malades les plus graves les imploraient de les aider : « Je vous en supplie docteur, sauvez-moi ! » Cela me rappelle ma première belle-mère et mon propre père. Les deux sont morts d’insuffisance pulmonaire à la suite à un accident cardio-vasculaire. Ma belle-mère avait crié la même chose à sa fille : « Je t’en prie, sauve-moi ! » À ce moment-là, le taux d’oxygène dans son sang était tombé à 60 %. Elle était en train de se noyer tandis que les autres la regardaient depuis la berge. Mais la différence avec les vrais noyés, c’est que, pour eux, la noyade est courte. Quelques dizaines de secondes et tout est terminé. Alors que les malades de cette pneumonie étouffent pendant des jours entiers. Chaque seconde est atroce et ne vaut pas d’être vécue. Ils subissent une mort par étranglement, asphyxie, étouffement vingt-quatre heures durant, pendant des jours entiers. Chaque heure : soixante minutes de combat contre l’agonie. Je n’ose pas y penser, je n’ose même pas imaginer.

 

Pourtant dans ma tête, je revois le visage de mon père sous ce masque à oxygène. La bouche grande ouverte, tendant tout son corps pour essayer d’avaler de l’air. Mais peu importe ses efforts désespérés, l’oxygène n’allait pas jusque dans les alvéoles de ses poumons. L’aspect du vieil homme faisait pitié. On aurait dit un poisson jeté sur la berge. Finalement, mon père est mort par asphyxie cérébrale. En fait, il est mort étranglé, asphyxié par un nœud coulissant invisible. Mais pas en un souffle. Non. Il a été torturé seconde par seconde. Cela a duré un jour et une nuit. Si j’avais le choix aujourd’hui, je choisirais de ne pas lui faire vivre ces vingt-quatre heures. Pour qu’il ne subisse pas ce passage dégradant de l’homme vers le poisson à l’agonie. Puisqu’il fallait qu’il meure, autant que ce ne fut pas dans la souffrance. Je suis certaine que cette torture par asphyxie qu’a subi mon père s’est répétée sur chaque malade à Wuhan et que c’est aussi ce qu’a subi le docteur Li Wenliang.

 

Pendant leurs derniers instants, ces malades aux poumons détruits et torturés jusqu’à ce qu’ils succombent, jetaient des regards anxieux autour d’eux, ne trouvant pas un visage familier pour leur tamponner le front avec une serviette, leur tenir la main, leur exprimer les derniers regrets. Pas même une dernière trace de chaleur humaine au creux de la main avant la fin. Ils étaient comme un étranger pathétique dans une contrée inconnue. Ils ont été empaquetés dans des sacs mortuaires, seuls. Quelle tristesse ! Quelle horreur ! Pendant les derniers instants d’un homme, la chose dont on ne peut se passer est la promesse de ses proches : « Va en paix ! On t’aime. On ne t’oubliera pas. » Mais aux morts de Wuhan, on n’a pas fait cette promesse. 

 

Le docteur Li Wenliang n’est pas parti accompagné des pleurs de sa mère, ni de ceux de sa femme et de son fils. Ses derniers mots sont sur sa page Weibo [3]. Refusant de l’oublier, les gens prolongent sa vie disparue dans une autre dimension : leur imagination. Comme le dit Fang Fang, son blog est devenu le mur des Lamentations des Chinois. J’ai lu les commentaires dessus. Les gens parlent de tout et de rien avec Li Wenliang. Il y a des bribes de conversations, des histoires banales, à propos de gastronomie, d’amour, comme si le docteur Li était devenu leur psychologue ou le sympathique voisin d’à côté. Beaucoup de gens disent qu’ils ne l’oublieront jamais. Je prie pour que ce mur des Lamentations invisible qui se dresse entre la vie et la mort ne soit jamais démoli, qu’il accompagne tous les survivants, et qu’on s’en souvienne.

 

Berlin, où j’habite, est une ville qui refuse d’oublier. Sur les pavés des trottoirs ont été incrustées des médailles en bronze sur lesquelles est gravé : Telle année, tel mois, tel jour, tel Juif (ou sa famille) habitant au n° tant du bâtiment n° tant ont été emmenés…  Est aussi inscrit l’endroit où ces Juifs sont morts. La plupart ont péri dans des camps de concentration. Pas très loin de chez moi, la rue Flatow qui mène à la grande porte du stade olympique est nommée d’après deux cousins juifs qui étaient des sportifs olympiques. Ils avaient concouru pour l’Allemagne aux jeux d’Athènes et permis à l’équipe allemande de gymnastique de remporter plusieurs médailles d’or. Ils sont morts de faim après avoir été envoyés en camp de concentration. D’après mon voisin âgé, ma maison était aussi celle de Juifs. Mais personne n’est revenu la réclamer après la guerre. Même pas des parents éloignés. Elle a été donnée au gouvernement qui l’a mise en vente aux enchères avant qu’elle soit finalement achetée. La maison a été construite en 1922. Elle a été bien conçue et elle est très solide. Le projet était certainement qu’elle serve aux générations futures. Mais aucun d’entre eux n’a survécu et on n’a pas retrouvé trace des cousins de la famille.

 

Les livres de la bibliothèque de l’université Humboldt ont été brûlés par les nazis. Aujourd’hui, les étagères demeurent vides pour rappeler l’ignominie de ces autodafés. Tout cela est une sorte de livre sanglant de dettes qu’ont les Allemands envers les Juifs. Tenir tous ces comptes leur est forcément douloureux. Mais pour eux, ne pas le faire signifierait perdre ce sentiment de honte d’avoir blessé et humilié les autres. Sans sentiment de honte, on n’a pas de sentiment de mérite. Les Allemands préfèrent souffrir plutôt que perdre cette dignité. Ils pensent qu’il n’y a qu’en se souvenant de ses hontes qu’on peut empêcher qu’elles se reproduisent.

 

Après le sacrifice du lanceur d’alerte Li Wenliang en est apparu un autre : la doctoresse Ai Fen. Elle a regretté de ne pas avoir donné l’alerte plus largement. Sinon les choses n’auraient pas autant empiré. Si elle avait su, elle aurait fait fi de ses inquiétudes. C’est une femme brave, une héroïne wuhanaise. Les gens de cette ville sont tenaces et courageux. La ténacité est précieuse, le courage l’est encore plus. Des courageux à Wuhan, il y en a. Ils ont crié « C’est faux ! » à ces hypocrites, eux qui en avaient assez de souffrir des dissimulations. 

 

Nous cachons aux générations suivantes les catastrophes qui ont eu lieu dans le passé. Le plus absurde c’est que nous arrivons à nous les cacher à nous-mêmes. C’est ainsi que les Chinois, après avoir souffert du SRAS il y a dix-sept ans, sont retombés dans les affres de ce nouveau coronavirus. En dissimulant, pas besoin de chercher les responsabilités. Parce que si on cherche, on va forcément trouver celui qui a tout couvert. Or en ne cherchant pas les responsables comment peut-on espérer que les gens se souviennent ? Quand l’intrigue principale d’une tragédie n’a pas été dévoilée, reste-t-il quelque chose à se rappeler ? C’est comme cela que nous sommes devenus un peuple à la mémoire mauvaise, mais à l’amnésie performante. Le massacre de Nankin, les trois années de famine, la Révolution culturelle, on redouble d’efforts pour les oublier. Et quand on ne veut pas dissimuler, on nous reproche de ne pas être assez « positiviste ».

 

Selon certains, ne pas chercher à savoir la raison du pourquoi, ne pas garder rancune semblent faire partie de notre caractère national « magnanime ». Comme si nous excellions dans le pardon et la complaisance ! Nous sommes surtout devenus des as de la dissimulation. Mais nous ne pouvons pas tout cacher à nos descendants. Nous devons leur avouer sans rien occulter. Pourquoi Li Wenliang a été humilié, comment il est mort. On ne peut pas leur dissimuler comment tant de Chinois, de gens du Hubei, de Wuhan ont été séquestrés, sont morts malades, jetés comme des indigents à la fosse commune. On ne peut pas cacher les cent soixante-dix morts en Italie hier. Nous devons nous poser la question : pourquoi couvrons-nous toujours ceux qui nous brutalisent ? Dissimulons-nous leur indignité ? Combien de fois dans l’histoire ç’aurait dû être à eux d’avoir honte et de demander pardon au peuple qu’ils avaient sacrifié ? Pourtant, nous avons laissé passer. Ces tragédies se sont toutes achevées sur un dénouement bâclé, et puis ont repris de plus belle. Avec les mêmes épisodes plagiés et toujours ce même mot d’ordre : dissimuler.

 

Si notre peuple souffre, c’est parce que depuis 2 000 ans « nous n’avons pas le temps de nous attrister sur notre sort ». Or « En ne prenant pas le temps de s’attrister sur soi-même on laisse aux suivants le soin de le faire. Les suivants s’attristent mais ne réfléchissent pas. Et l’on finit par faire que les générations s’attristent les unes après les autres sans savoir pourquoi. » Du Mu avait compris cela il y a bien longtemps. On ne sait s’il avait prédit l’amnésie programmée et l’amnésie forcée, mais nous sommes obligés de constater que les générations capables de s’attrister sur le sort de leurs aînés se font de plus en plus rares.

 

 

(Publication par autorisation spéciale de Yan Geling et Peony Literary Agency. Tous droits réservés)


 

 

     

 

 

 

 

 

     

 

 

 

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