Hu Feng
胡风
1902-1985
Présentation
par
Brigitte Duzan, 29 novembre 2025
2025 est à
la fois le 40e anniversaire de la mort de Hu Feng
(le 8 juin 1985), et le 70e anniversaire de son
arrestation, en mai 1955 ; il était accusé d’avoir fomenté
une « clique contre-révolutionnaire » (胡风反革命集团)
qui a mené à l’inculpation de plus de deux mille personnes.
On considère que c’étaient là les prémices d’un mouvement
dirigé contre les intellectuels, véritable mouvement
d’inquisition littéraire précurseur, déjà, de la Révolution
culturelle.
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Hu
Feng (années 1930) |
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Écrivain,
poète et théoricien de la littérature, membre du Parti, Hu
Feng était pourtant considéré comme le successeur de
Lu Xun (魯迅)
; mais, comme l’a dit l’historien de la littérature Qian
Liqun (钱理群),
Lu Xun lui-même, s’il avait été encore vivant et avait
continué à écrire du temps de Mao, aurait certainement été
arrêté lui aussi ; d’ailleurs, de son vivant, en 1934, Lu
Xun, très lucide, avait dit qu’après la victoire de la
Révolution il lui faudrait prendre la fuite
.
Études
Né le 2
novembre 1902 dans le district de Qichun (蕲春县),
à l’est du Hubei, de son vrai nom Zhang Guangren (张光人),
Hu Feng était le fils d’un petit marchand de tofu. Il n’est
allé à l’école, dans son village, qu’en 1913, puis est entré
en 1920 au collège à Wuchang (武昌),
l’un des districts urbains de la ville actuelle de Wuhan. De
là, il est passé au lycée affilié à l’Université nationale
du Sud-Est (国立东南大学附属中学),
à Nankin.
Après sa
fondation en 1922, il devient membre de la Ligue de la
jeunesse socialiste de Chine (中国社会主义青年团),
rebaptisée en janvier 1925 Ligue de la Jeunesse communiste
de Chine (中国共产主义青年团).
En mai, cette année-là, il participe au Mouvement dit « du
30 mai » (Wǔsà Yùndòng
五卅运动),
mouvement anti-impérialiste né d’un incident intervenu dans
la Concession internationale de Shanghai lors duquel la
police municipale avait ouvert le feu sur des protestataires,
déclenchant des démonstrations et des émeutes dans tout le
pays.
À la fin
de 1925, Hu Feng entre à l’université de Pékin, puis, en
1926, à l’université Qinghua pour étudier la littérature
occidentale. Mais il quitte bientôt l’université et rentre
chez lui. Puis, en 1929, il part au Japon étudier l’anglais
à l’université privée Keio (Keiō Gijuku Daigaku
慶應義塾大学),
à Tokyo. Mais, en 1933, il participe à des groupes
d’étudiants chinois anti-japonais et il est expulsé du pays.
Il revient à Shanghai.
1933-1949 : activités politiques et littéraires
Il entre
alors à la Ligue des écrivains de gauche (中国左翼作家联盟)
dont il devient secrétaire et chef de la section de
propagande. Il y rencontre Mei
Zhi (梅志)
qu’il épouse à la fin de l’année et devient un proche et
disciple de Lu Xun.
Pendant
la guerre
En 1934,
il édite sous le manteau la revue littéraire dite « recueil
de copeaux de bois » (Muxie wencong《木屑文丛》)
publiée avec l’aide du Japonais Kanzō Uchiyama (ou Wu Qichan
鄔其山),
le propriétaire de la librairie Uchiyama de Shanghai devenue
un lieu de rencontre entre les intellectuels japonais de
passage à Shanghai et leurs homologues chinois. Uchiyama
était en particulier un grand ami de Lu Xun qu’il avait
rencontré en 1927 et qu’il cachera plusieurs fois pour le
protéger des griffes du Guomingdang. Lu Xun lui rendra
hommage à la fin de sa vie dans ses poèmes en langue
classique.
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La
librairie Uchiyama de Shanghai
(Sichuan
lu nord), vers 1930 |
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En 1936,
Hu Feng cofonde un autre journal, « Le Pétrel » (Haiyan《海燕》),
qui publie des œuvres de Lu Xun et autres auteurs de gauche,
dont Xiao Jun (萧军)
et
Xiao Hong (萧红)
ou Wu Xiru (吴奚如).
Après le
début de la guerre sino-japonaise, en 1937, Hu Feng devient
le rédacteur en chef de la revue « Juillet » (Qi yue
《七月》),
selon le principe qu’une revue est aussi œuvre de création (“一本杂志也是一篇创作”).
Le premier numéro sort le 11 septembre, mais, en raison de
l’invasion japonaise, la revue ne publie que trois numéros à
Shanghai avant d’être relancée à Hankou le 16 octobre, la
publication devenant semestrielle, mais avec trois fois plus
de pages. La publication cesse de nouveau en juillet 1938,
pour reprendre à Chongqing l’année suivante, mais comme
mensuel, avant de disparaître en septembre 1941, après 35
numéros en quatre ans.
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Qi yue,
numéro du 11 septembre 1937 |
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Le journal
était le porte-parole du Parti communiste, publiant les
discours des dirigeants, et des articles de Mao, y compris
son célèbre discours « Sur Lu Xun » (《论鲁迅》),
prononcé le 19 octobre 1937 pour commémorer le premier
anniversaire de sa mort, que Hu Feng a publié intégralement
dans Qi yue en mars 1938. Hu Feng édita aussi un
numéro spécial à l’occasion de la création de la Fédération
nationale des cercles artistiques et littéraires en
résistance contre l’ennemi » (“中华全国文艺界抗敌协会”).
La plupart
des œuvres littéraires publiées dans la revue exprimaient
des sentiments anti-japonais et patriotiques. C’est dans
Qi yue qu’ont été publiés les célèbres poèmes de
Ai Qing (艾青)
« Le Nord » (《北方》)
et « Vers le soleil » (《向太阳》).
C’était une poésie « de combat » (“战斗诗体”),
simple et facile à mémoriser, comme le poème de Hu Feng
« Serment de sang » (《血誓》).
Hu Feng a également publié des documents et témoignages sur
la bataille de Shanghai et le massacre de Nankin, par des
soldats qui avaient participé aux combats et des
correspondants de guerre, mais aussi des articles critiquant
la corruption et l’ineptie du gouvernement du Guomingdang.
La revue
est restée comme un véritable bastion de résistance contre
l’ennemi en pleine guerre, mais pas seulement.Hu Feng y a
aussi poursuivi un travail d’édition dans l’esprit de Lu
Xun, en offrant conseils et directives aux jeunes auteurs,
et en leur ouvrant des rubriques comme « Cartes postales de
la société de Juillet » (“七月社明信片”)
ou « Aux lecteurs » (“致读者”),
en les incitant à privilégier les récits courts et vivants,
reflétant un esprit critique mais sans tomber dans
l’abstraction. Il a parallèlement édité des recueils de
poèmes (《七月诗丛》)
et d’essais (《七月文丛》)
publiés dans la revue.
Cependant,
après ce qu’on a appelé « l’incident de la Nouvelle
Quatrième Armée » (新四軍事件),
en janvier 1941, la défaite (et les lourdes pertes) des
forces communistes mettent fin à la fragile unité du
Guomingdang et du Parti communiste pour lutter contre les
Japonais, Hu Feng doit quitter Chongqing. Des rumeurs
diffusées par les journaux nationalistes le disent mort à
Hong Kong, il est en fait parti à Guilin où il publie un
article ironique : « Un Revenant » (en référence à la pièce
d’Ibsen « Les Revenants »).
Après
la guerre
Le 1er
janvier 1945, il fonde la revue « Espoir » (Xiwang《希望》)
dont il est rédacteur en chef. Les quatre premiers numéros
sont publiés à Chongqing, les quatre suivants à Shanghai de
mai à octobre 1946. Elle suit la même ligne éditoriale que
Qi yue, en participant à l’intense lutte politique de
la période, dans un esprit de réalisme bien plus sombre que
celui de la guerre.
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Xiwang,
n°4 |
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La poésie
occupe une part importante des œuvres publiées dans la
revue, mais aussi des essais et articles de théorie sur la
littérature et les arts, ainsi que des nouvelles dont « La
vie de Luo Dadou » (《罗大斗的一生》)
et « Wang Xingfa et sa femme » (《王兴发夫妇》)
de Lu Ling (路翎)
ou encore « Fleur de balsamine » (《凤仙花》)
de Kong Jue (孔厥)
et « L’Union » (《结合》)
de Jin Tuo (晋驼).
On parle d’ « École de Juillet » (七月派).
Dans le
premier numéro de la revue paraissent deux essais importants
dans le contexte des débats littéraires et politiques de la
période : « De plain-pied dans la lutte pour la démocratie »
(《置身在为民主的斗争里面》)
de Hu Feng lui-même et « Sur la subjectivité » (《论主观》)
de Shu Wu (舒芜).
Autant de
questions vivement débattues pendant toutes ces années,
jusqu’à la réunion, en juillet 1949, du Premier Congrès
national des représentants des cercles littéraires et
artistiques (中华全国文学艺术界代表大会)
auquel Hu Feng a participé en tant que membre de la
Fédération nationale des Cercles littéraires et artistiques
(中国文联委员)
et membre de la direction de l’Association des écrivains
chinois (中国作家协会理事).
Le 1er
octobre 1949, du haut de la tribune de Tian’anmen, Mao
Zedong proclame la fondation de la République populaire.
C’est l’enthousiasme, les poèmes lyriques en hommage à la
Chine nouvelle pleuvent (致新中国的颂歌),
comme l’ « Ode à la Chine nouvelle » (《新华颂》)
de Guo Moruo (郭沫若).
Mais Hu Feng lui-même n’est pas en reste : il écrit « Le
temps a commencé » (《时间开始了》),
long poème symphonique de 4 600 vers, en cinq parties, dont
la première est publiée le 20 novembre 1949 dans le
Quotidien du peuple. Il commence par une Ode à la joie, et
une image statufiée de Mao :
毛泽东
Mao Zedong
他站到了主席台底正中间
Il était tout en bas au milieu de la
tribune
他站在飘着四面红旗的地球面底
Il était en bas de la terre au milieu de quatre bannières
rouges
中国地形正前面
Devant cette terre
accidentée de Chine
他屹立着象一尊塑像……
Il se tenait là comme une statue…
Mais, si
Hu Feng accueille avec enthousiasme la nouvelle Chine fondée
par Mao, il n’est pas d’accord avec lui sur sa vision,
proclamée en 1942 au Forum de Yan’an, d’une littérature
toute entière au service du peuple, et inféodée au Parti. Ce
désaccord lui sera fatal.
1955-1985 : trente ans de persécutions
Le poème
« Le temps a commencé » est tout de suite critiqué. Le poète
Wang Yaping (王亚平)
ironise en s’élevant contre la comparaison de Mao à un
premier amour de jeunesse. Surtout, le directeur du
département des lettres et des arts du Quotidien du peuple
accuse le poème de déformer l’image du « Camarade Mao
Zedong » en le présentant comme un Dieu dans les nuages,
coupé du peuple. Le poème disparaîtra très vite des annales
officielles, pour être « politiquement incorrect » (政治不正确”).
Mais il n’est pas plus conforme à l’image stéréotypée de Hu
Feng comme « disciple de Lu Xun » (“鲁迅传人”),
colportée, entre autres, par les images des funérailles de
Lu Xun à Shanghai, où Hu Feng figurait parmi les seize
personnalités qui se relayaient pour porter le cercueil,
dont
Ba Jin (巴金),
Mao Dun (茅盾)
et autres.
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22
octobre 1936, funérailles de Lu Xun à Shanghai.
Hu
Feng parmi les personnalités qui se relaient pour
porter le cercueil, |
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Le poème
continue encore aujourd’hui à faire couler beaucoup d’encre,
mais il contribue à montrer que Hu Feng était profondément
attaché au communisme. Ce qu’il n’acceptait pas, c’était la
conception maoïste de la littérature. Au début des années
1950, il s’est opposé directement, en particulier, au
concept de « forme nationale » (民族形式)
érigé en dogme par Zhou Yang (周扬),
l’un des principes énoncés étant que les écrivains doivent
apprendre des masses, et non l’inverse. Mais Zhou Yang est
devenu en 1949 l’un des principaux théoriciens littéraires
de Mao.
Hu Feng
écrit une critique de la « forme nationale » (Sur le
problème de la forme nationale《论民族形式问题》).
De mai 1949 à février 1952, il écrit de courts essais sur sa
vision de la littérature, mais aussi sur la politique,
regroupés dans le recueil « Des origines au déluge » (Cong
yuantou dao hongliu《从源头到洪流》)
publié en juin 1952 – commençant par un article célébrant le
30ème anniversaire du
mouvement du 4 mai.
Il est
critiqué dès 1948 pour être en opposition aux déclarations
de Mao au Forum de Yan’an de 1942 sur la littérature et les
arts. En 1952, le Journal de la littérature et des arts (le
Wenyi bao
《文艺报》)
reçoit des lettres demandant que soient critiquées les
théories littéraires de Hu Feng. Or, fondé en septembre
1949, ce journal était édité par l’Association des écrivains
et publié par la Librairie Xinhua (新华书店).
Ces lettres sont publiées par le journal.
De 1952 à
1954, Hu Feng fait partie de la rédaction de « Littérature
du peuple » (《人民文学》),
mais il est de plus en plus critiqué… et trahi. Ainsi en
1952, le jeune Shu Wu (舒芜)
qui avait publié dans Xiwang en considérant Hu Feng
comme son mentor, quelqu’un qui était à même de « le guider,
le soutenir, l’éduquer et l’inspirer », ce même Shu Wu
préfère s’aligner avec les détracteurs de Hu Feng et publie,
sous forme d’autocritique, un article reconsidérant
(positivement) les conclusions du Forum de Yan’an - après
quoi il entrera à la rédaction de Littérature du peuple.
Mais
c’est la consécration de Zhou Yang comme bras droit de Mao
qui incite Hu Feng à réagir. Il écrit un long « Rapport sur
la situation de la pratique littéraire et artistique de ces
dernières années » (《关于几年来文艺实践情况的报告》),
connu comme « le mémoire de 300 000 mots » (《三十万言书》),
adressé en juillet 1954 au Bureau politique du Parti, comme
autrefois les mémoires à l’Empereur.
La riposte
ne se fait pas attendre : c’est devenu une affaire d’État.
En janvier 1955, le département de la propagande du Parti
soumet un rapport au Comité central pour demander que Hu
Feng soit critiqué. Début mai, Shu Wu remet sa
correspondance avec Hu Feng, en l’accusant d’être à la tête
d’une « clique contre-révolutionnaire ». Mao s’empare des
lettres, en rédige une préface, et ordonne au Quotidien du
peuple de les publier sous le titre « Documents concernant
la Clique contre-révolutionnaire de Hu Feng » (关于胡风反党集团的一些材料).
Le 17 mai,
Hu Feng est soudain arrêté en pleine nuit avec sa femme Mei
Zhi et envoyé à la prison Qincheng (秦城监狱)
de Pékin, prison de haute sécurité pour prisonniers
politiques dépendant du ministère de la Sécurité publique.
Plus de deux mille personnes sont arrêtées en même temps,
accusées de faire partie de cette « clique » et envoyées en
camp. Certains n’en reviendront pas, d’autres témoigneront
de l’absurdité de ces accusations, tel Wang Rong (王戎)
qui était acteur à Chongqing pendant la guerre et a mis des
années à comprendre pourquoi il avait été accusé et envoyé
en camp : pour trois malheureux articles publiés en 1945-46
sur une pièce de théâtre ;
il ne l’a compris qu’en 1979, après 24 ans de prison et de
camp.
Après leur
arrestation, Mei Zhi restera emprisonnée 70 mois et Hu Feng
dix ans et demi, années pendant lesquelles elle n’aura
aucune nouvelle de lui. Et soudain, en 1965, alors qu’elle
le pensait mort, elle reçoit une autorisation de visite. Il
est bientôt remis en liberté, ils passent le Nouvel An en
famille, avec leurs enfants, mais, au début de la Révolution
culturelle, ils sont envoyés au Sichuan. En 1967, Hu Feng
est envoyé en camp, et Mei Zhi laissée seule de son côté
dans un autre camp.
En janvier
1970, il est condamné à vie. En 1972, Mei Zhi est envoyée
s’occuper de lui. Quand elle le retrouve, dira-t-elle dans
ses mémoires, c’est un homme qui n’est plus que l’ombre de
lui-même, effrayé de manger même une mandarine, de peur
d’être dénoncé. Au début de 1976, il est à nouveau très
affecté par l’annonce de la mort de Zhou Enlai et retombe
dans des hallucinations.
Il est
libéré en 1979, mais n’est que partiellement réhabilité en
septembre 1980. Il meurt d’un cancer le 8 juin 1985. Il ne
sera totalement exonéré de toute accusation qu’en 1988, à
titre posthume.
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Hu
Feng au début des années 1980 (photo Caixin) |
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Publications
Les œuvres
complètes de Hu Feng (胡风全集),
en dix volumes, ont été publiées en 1999 par les Éditions du
peuple du Hubei. Les dix volumes comprennent des œuvres
littéraires (poèmes, essais, lettres et recensions) et des
textes de théorie littéraire, ainsi que des textes
historiques comme le fameux « mémoire de 300 000 mots ». Un
volume supplémentaire a été publié par le même éditeur en
2014.
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Les
œuvres complètes de Hu Feng |
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Citons
entre autres :
Théorie
littéraire
1941 :
[Sur les formes nationales] Lun minzu xingshi wenti 《论民族形式问题》
1943 : [La
guerre nationale et la nature des lettres et des arts]
Minzu zhanzheng yu wenyi xingge
《民族战争与文艺性格》
1948 :
[Sur la route du réalisme] Lun xianshizhuyi de lu
《论现实主义的路》
Théorie
littéraire visant à une « synthèse du subjectif et de
l’objectif » dans une optique « sinisante » de la théorie
littéraire marxiste, dans le contexte d’une interprétation
de la tradition du 4 mai.
Poèmes
- Fleurs
sauvages et flèches
《野花与箭》、premier
recueil de poèmes (1937)
- Chant
pour la nation《为祖国而歌》、publié
dans les « Poésies de Juillet »《七月诗丛》(août
1937)
- Le temps
a commencé (《时间开始了》)
(1949-1951), en cinq parties :
Ode à la
joie《欢乐颂》、Pour
l’honneur et la gloire《光荣赞》、Ode
au printemps
《青春颂》、
Requiem《安魂曲》、Et
autre Ode à la joie《又一个欢乐颂》。
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Fleurs sauvages et flèches, éditions
des
lettres et des arts du Zhejiang, avril 1996 |
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Traductions
- 1936 :
[L’esprit de la montagne] Shan ling
《山灵》
Traduction
de sept nouvelles d’auteurs de Taiwan et de Corée, dont six
traduites du japonais, dans un contexte d’expansion de
l’impérialisme japonais et de redéfinition de l’unité
est-asiatique par les intellectuels de gauche. Ces
traductions reflètent l’idée d’une nouvelle exploration du
sujet révolutionnaire par le biais de la traduction
littéraire.
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Shan ling,
1936,
上海文化生活出版社 |
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De cette même année date la traduction par Hu Feng d’une
novella (zhongpian xiaoshuo
中篇小说)
d’un auteur « prolétaire » japonais : « Coton » (《棉花》)
- un texte, selon Hu Feng, à considérer non pour sa valeur
littéraire, mais pour sa valeur de témoignage sur la vie des
classes travailleuses. C’est ce qu’il souligne, entre
autres, dans son essai « La littérature et la vie » (《文学与生活》).
Éléments bibliographiques
Mémoires et témoignages
- [Les mémoires de Hu Feng] (《胡风回忆录》),
édités après sa mort et publiés aux éditions Littérature du
peuple en novembre 1993, avec une réédition en 2005 en
format poche.
La
première partie couvre la période 1929-1948, entre le voyage
au Japon et le retour de Chongqing à Shanghai; elle est
autobiographique et concerne ses activités littéraires, son
évolution idéologique et ses réflexions sur les événements
historiques. La deuxième partie concerne les années de
prison et de camp, elle a été compilée et complétée par sa
femme Mei Zhi à partir de manuscrits et de ses écrits en
prison, avec une postface expliquant les sources et le
processus de compilation du livre.
À lire en
ligne numérisé sur le site China Unofficial Archives :
https://minjian-danganguan.org/s/china-unofficial/item/3849#lg=1&slide=0
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Les
mémoires de Hu Feng |
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-
[Histoire d’un prisonnier – Hu Feng et moi] (《伴囚记-我和胡风》),
par Mei Zhi, éditions des Travailleurs (中国工人出版社),
avril 2008. C’est le complément de l’ouvrage précédent,
couvrant les dix ans passés à la prison de Pékin.
- Traduction : Hu Feng’s Prison Years, by Mei Zhi,
tr. Gregor Benton, Verso, 2013.
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Hu Feng’s Prison Years |
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- Literary Dissent in Communist China, by Merle Goldman,
Harvard University Press, 1967.
Étude
pionnière couvrant la période 1940-1960.
Chapitre 7 : The Hu Feng Campaign of 1955.
Merle
Goldman montre que Hu Feng, bien qu’ adhérant aux objectifs
politiques du Parti, a lutté contre les diktats en matière
littéraire. Mais aucune voix dissidente n’était possible.
Reportage
-
Ai Xiaoming (艾晓明) :
Sur la route de Miaoxi – en lisant les mémoires de Niu Lihua
"Rêves brisés de Miaoxi" » (通往苗溪之路 ——读牛立华回忆录《梦断苗溪》).
Ai
Xiaoming a édité les mémoires d’un ancien détenu du camp de
laogai de Miaoxi au Sichuan, Niu Lihua (牛立华).
Le livre est paru en 2022 à Taiwan, mais en 2020 elle est
allée au Sichuan sur les traces de Niu Lihua. À Miaoxi, elle
a découvert, entre autres, les vestiges de la maison
abandonnée où a vécu Hu Feng. Elle n’a pu que la
photographier de loin car la maison n’est pas entretenue et
disparaît peu à peu dans la végétation.
Elle a
écrit un
long article doublé d’un reportage photo
paru sur le site de la Boston Review of Books en 2024.
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L’ancienne maison de Hu Feng à Miaoxi (photo Ai
Xiaoming) |
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Documentaire
- Storm under the Sun
(Hongri fengbao《红日风暴》),
Peng Xiaolian (彭小莲)
/ S. Louisa Wei (魏時煜),
2009 (139’)
Le documentaire a été coréalisé par la cinéaste et écrivaine
Peng Xiaolian en hommage à son père Peng Boshan (彭柏山)
qui, accusé de faire partie de la « Clique
contre-révolutionnaire de Hu Feng », a été arrêté et
emprisonné en 1955.
Il a été
battu à mort par des Gardes rouges le 2 avril 1968.
En 2014,
S. Louisa Wei en a monté une version courte (58’50) destinée
à être projetée lors d’un séminaire intitulé "Literary
Dissent under the Chinese Communists: The Hu Feng Affair"
co-organisé par l’éditeur Verso, l’English Pen et la London
School of Economics, le 6 novembre 2014, avec comme
intervenants Zhang Xiaoshan (张晓山),
fils cadet de Hu Feng, et Gregor Benton, traducteur de la
biographie de Hu Feng par Mei Zhi.
Storm under the Sun, version courte
https://www.youtube.com/watch?v=QpBCzHQPEak
- En
complément, en juillet 2025, S. Louisa Wei a publié [Hu
Feng : idéaux d’un poète et tempête politique] (《胡風—詩人理想與政治風暴》),
aux éditions City University of Hong Kong Press.
Note
complémentaire
Les
critiques contre Hu Feng au début des années 1950 sont à
rapprocher de la virulente campagne menée contre le
réalisateur
Sun Yu (孙瑜),
après la sortie de son film « La
vie de Wu Xun » (《武训传》)
en février 1951. Le succès du film est brisé net par un
éditorial de la main de Mao publié dans le Quotidien du
peuple du 20 mai 1951 dénonçant le caractère réactionnaire
du film. Au centre des attaques figure Zhou Yang, alors
directeur adjoint du bureau de la propagande du Comité
central du Parti, qui attaque le film début juillet dans le
Quotidien du Peuple, puis dans la revue Littérature du
Peuple.
Ces
attaques qui brisent la carrière de Sun Yu, comme les
critiques visant Hu Feng, sont à replacer dans le contexte
de la guerre de Corée, et le climat tendu se traduisant, le
21 février 1951, par le décret « relatif à la répression des
contre-révolutionnaires » entraînant un « mouvement de
rectification » dont l’importance est encore soulignée en
septembre 1953 à la deuxième « conférence nationale des
travailleurs des lettres et des arts ». Sun Yu, cependant,
s’il est pris à parti pendant la Révolution culturelle et
brièvement envoyé dans une « École de cadres », ne sera
jamais envoyé en camp.