| 
                  
                  | 
				La littérature 
				taïwanaise : état des recherches et réception à l’étranger 
				Sous la direction de 
				Chan Ning-ho, Joyce Liu Chi-hui, Peng Hsiao-yen, Angel Pino & 
				Isabelle Rabut 
				Textes édités par Angel 
				Pino & Isabelle Rabut 
				Editions You Feng, 
				novembre 2011. 
				    
				        
				 
					
						| 
						Cet ouvrage 
						résulte de la publication des actes du colloque éponyme 
						(1) qui, organisé conjointement par 
						le Centre 
						d’études et de recherches sur l’Extrême-Orient (CEREO) 
						de l’université Michel de Montaigne de Bordeaux 3 
						et 
						l’Institute of Chinese Literature and Philosophy de 
						l’Academia Sinica de Taiwan 
						s’est tenu à Bordeaux du 2 au 4 novembre 2004. Les 
						communications sélectionnées ont été complétées par des 
						travaux bibliographiques inédits de manière à donner une 
						image aussi précise que possible (mais à la date de 
						2005) de la diffusion de la littérature taïwanaise en 
						Europe et aux Etats-Unis. 
						    
						        
						 
						Son intérêt 
						tient en grande partie à la richesse des communications 
						qu’il contient, qui dressent un tableau, non pas 
						exhaustif, mais de certains aspects de cette littérature 
						(2), permettant de mieux la comprendre - une littérature 
						qui mériterait d’être mieux connue, mais qui reste 
						méconnue, en particulier en France, en raison, 
						essentiellement, du peu de traductions disponibles. |  | 
						
						 
						La littérature taïwanaise : état des 
						recherches et réception à l’étranger |  
				    
				        
				 
				Après une introduction 
				d’Angel Pino et 
				
				Isabelle Rabut sur les 
				écueils qu’ont constitués et que constituent toujours la 
				politique et l’histoire pour cette littérature, l’ouvrage se 
				divise en deux « livres », chacun consacré à l’un des deux 
				termes du titre : état des recherches et réception en Europe et 
				aux Etats-Unis – la première étant limitée à trois pays 
				européens (France, Allemagne et Grande-Bretagne). 
				     
				        
				 
				Le livre I se 
				divise en quatre parties, qui suivent l’ordre des communications 
				du colloque, mais dont on aurait pu inverser les chapitres pour 
				commencer par l’histoire, et la littérature dans ses rapports 
				avec elle. 
				     
				        
				 
				1ère 
				partie : La question du modernisme 
				1. Les débuts de 
				l’introduction de la poétique moderne, par Chen Fang-ming (陳芳明) 
				2. Les flux culturels 
				transnationaux et la « taïwanité » de la littérature moderniste 
				de Taiwan, par Chiu Kuei-fen (邱貴芬) 
				3. Le modernisme 
				contestataire de Xiandai wenxue, par Zhang Yingde (張寅德) 
				    
				        
				 
				Cette partie est axée 
				sur l’analyse de 
				la 
				réception/réinvention du modernisme littéraire à Taiwan pendant 
				la période 1950-1990. Elle traite en particulier de la lecture 
				des œuvres et des théories du modernisme occidental par les 
				écrivains et intellectuels taïwanais pendant cette période, en 
				contestant l'idée d'une simple imitation taïwanaise sous 
				influence occidentale et en soulignant au contraire la richesse 
				créative, non dépourvue d'ambiguïté, d’œuvres qui sont en fait 
				des reconstructions personnelles et intertextuelles. 
				     
				        
				 
				2ème 
				partie : Histoire de la littérature 
				1. Vers la 
				taïwanologie : bilan et perspectives des recherches sur la 
				littérature taïwanaise, par Lin Juei-ming (林瑞眀) 
				2. Les débuts de la 
				création romanesque chez Yang Kui : discussion centrée sur 
				Révolte et mort d’un paysan pauvre, par Chen Wan-yi (陳萬益) 
				3. La narration de 
				l’histoire de la littérature taïwanaise de part et d’autre du 
				détroit, par Li Xiangping (黎湘萍) 
				     
				        
				 
				- Les chapitres 1 et 3 
				de cette seconde partie présentent deux points de vue différents 
				sur l’écriture de la littérature taïwanaise. Le premier dresse 
				un tableau des difficiles débuts de chercheurs dont les travaux 
				se sont heurtés à l’incompréhension, aux ruptures de l’histoire 
				et aux aléas de la politique ; l’auteur tente de dégager les 
				particularités des recherches sur l’histoire littéraire 
				taïwanaise et conclut en soulignant les différents obstacles à 
				dépasser pour pouvoir progresser (dont les barrières 
				linguistiques).  
				     
				        
				 
				- Le troisième chapitre 
				est une analyse de l’évolution de la narration de l’histoire 
				littéraire à Taiwan, par un professeur et chercheur de 
				l’Académie des sciences sociales de Chine (中国社会科学院). 
				Commençant par replacer l’histoire de Taiwan dans le contexte 
				général de l’historiographie chinoise, en partant du « Livre de 
				Wu » de la Chronique des Trois Royaumes (三国志.吴国), 
				Li Xiangping souligne 
				ensuite le traumatisme que fut la cession de l’île au Japon,
				en 1895, 
				faisant de la narration de l’histoire taïwanaise un acte de 
				résistance, culturel autant que politique.  
				    
				        
				 
				Cet article 
				est une superbe 
				introduction à l’histoire littéraire taïwanaise, qui aurait pu 
				être une introduction au livre lui-même. Il suit l’évolution des 
				études et publications, en en soulignant les idées de base, et 
				en terminant par un développement sur les deux « lacunes » de la 
				narration historique qu’il a passée en revue, et surtout, celle 
				qui lui semble la plus importante, l’oblitération, dans cette 
				narration, à partir des années 1950-60, de l’étendard du 
				« romantisme », trop évocateur du mouvement de révolte et 
				d’exaltation de l’individu lié au 
				
				mouvement du 4 mai et de 
				la Nouvelle Culture.  
				     
				        
				 
				L’auteur conclut que 
				l’ « anti-romantisme » s’est alors affirmé comme distanciation 
				du politique, mais que toute l’histoire littéraire de l’île 
				montre au contraire que ce n’est que dans la tension politique 
				que la littérature taïwanaise peut donner le meilleur 
				d’elle-même. 
				     
				        
				 
				- Quant au second 
				chapitre, l’auteur y revient sur les débuts de la création 
				romanesque de Yang Kui (楊逵, 
				1906-1985), pour redresser l’image d’un « romancier prolétarien 
				écrivant en japonais » : 
				l’auteur 
				souligne sa participation aux mouvements sociaux à son retour du 
				Japon en 1927, ses difficiles conditions de vie après son 
				mariage, ses nombreux travaux de traduction (dont « La véridique 
				histoire d’AQ » de 
				Lu Xun),
				avant d’en arriver à l’argument 
				principal : les efforts d’écriture de Yang Kui en langue parlée 
				taïwanaise, dont il fut l’un des plus ardents défenseurs et dont 
				« Révolte d’un paysan pauvre » représente la première tentative 
				réussie.  
				     
				        
				 
				3ème 
				partie : Littérature et histoire 
				1. L’histoire, la 
				fiction et les écrivains des villages de garnison depuis la 
				levée de la loi martiale, par Peng Hsiao-yen (彭小妍) 
				2. Progrès, décadence 
				et corps social : le visible et le non visible dans la 
				conscience décadente du Taiwan des années 1930 – du mouvement de 
				la Nouvelle Littérature à Yang Shichang en passant par Nanyin, 
				par Joyce Liu Chi-hui (劉紀寭) 
				3. La politique du 
				corps et l’image de la jeunesse : la littérature de fiction 
				taïwanaise à l’époque de l’occupation japonaise, par Mei 
				Chia-ling (梅家玲) 
				     
				        
				 
					
						| 
						- Le premier 
						chapitre est une analyse des liens entre écriture et 
						mémoire, mémoire historique et mémoire culturelle à 
						travers la littérature, tels qu’ils se sont développés 
						après la levée de la loi martiale, en 1987. Avec le 
						déclin du pouvoir du Guomingdang et la fin de l’illusion 
						du retour aux sources identitaires, c’est tout un 
						imaginaire qui s’effondre pour les waisheng, 
						symbolisé par les villages de garnison (juancun 
						眷村), 
						constructions précaires qui n’avaient été construits que 
						pour une période provisoire, en attendant le retour à la 
						Chine mère.  
						    
						        
						 
						Ces villages se 
						délabrent peu à peu, tandis que l’écriture de l’histoire 
						en tant que narration fictionnelle devient 
						« reconstruction imaginaire du passé ». L’analyse 
						s’appuie sur celle de l’œuvre deux auteurs 
						emblématiques à cet égard : Zhang Dachun (Chang Ta-chun
						
						張大春) 
						et Zhu Tianxin (Chu Tian-hsin 
						朱天心) |  | 
						
						 
						Zhang Dachun |  
				     
				        
				 
					
						| 
						- La 
						« conscience décadente » et ses liens avec le discours 
						sur la modernité dans les années 1930 à Taiwan est le 
						sujet traité dans le second chapitre, pour – ici aussi – 
						le débarrasser de ses clichés et idées reçues. Joyce Liu 
						Chi-hui  montre que la  « conscience décadente », ou 
						« esthétique de l’ombre » telle qu’elle apparaît dans 
						les poèmes de Yang Chi-chang (楊熾昌), 
						a ses parallèles au Japon, mais aussi, étonnamment, dans 
						le néo-sensationnisme qui s’est développé à peu près au 
						même moment à Shanghai (3), dans un rapport ambigu entre 
						attachement mélancolique au passé et désir anxieux de 
						redressement spirituel passant par un renouveau 
						littéraire. 
						    
						        
						 
						- Quant au 
						troisième chapitre, il présente une étude de la 
						représentation du corps dans la littérature de fiction 
						taïwanaise sous l’occupation japonaise, le corps étant 
						évidemment celui des jeunes, celui du printemps et de 
						l’espoir. Dans un pays où le pouvoir colonial avait 
						transformé  |  | 
						
						 
						Yang Chichang |  
				l’espace en le 
				modernisant, il fut identifié à la modernisation, créant une 
				ambiguïté sur les termes, une contradiction entre esprit et 
				corps, entre corps et désir, et entretenant chez le sujet 
				colonisé une confusion de valeurs identitaires et culturelles 
				qui se traduit dans les romans de l’époque.  
				     
				        
				 
				4ème 
				partie : De quelques œuvres littéraires taïwanaises 
				1. La politique des 
				parenthèses : lecture de En ce jardin d’un rêve brisé de 
				Bai Xianyong à la lumière de Mrs Dalloway de Virginia 
				Woolf, par Li Sher-shiueh (李奭學) 
				2. Un canon oublié ? Wu 
				Mansha, le Périodique Vent et Lune et la littérature 
				populaire à Taiwan sous l’occupation japonaise, par Lin Pei-yin 
				(林姵吟) 
				3. Les romanciers 
				taïwanais de la jeune génération, par Esther Lin (林寭娥) 
				4. Réminiscences et 
				instants de mémoire dans le roman de Wang Wenxing Jiabian, 
				par Sandrine Marchand 
				5. Lecture minutieuse 
				d’Une « Balance » de Lai He, par Lin Ming-teh (林眀德) 
				     
				        
				 
					
						| 
						Cette partie 
						regroupe les analyses de quatre œuvres littéraires 
						prises comme représentatives d’un aspect particulier de 
						la période considérée : 
						- le premier 
						chapitre étudie les analogies d’écriture entre « Mrs 
						Dalloway » de Virginia Woolf (1925), et « En ce jardin 
						d’un rêve brisé » (《游园惊梦》), 
						nouvelle de 1968 de 
						
						Bai Xianyong (Pai Hsien-yung
						 
						
						白先勇) : 
						réminiscences évoquées par flux de conscience et 
						digressions par le biais de parenthèses ; 
						- le second 
						chapitre traite du courant de littérature populaire 
						publié dans le périodique « Vent et Lune » (風與月), 
						sous l’occupation japonaise, et du cas de Wu Mansha (吳漫沙) 
						dont l’œuvre, au-delà de son soutien à la politique 
						coloniale du Japon, représente un reflet de la vie 
						sociale de Taipei sous l’occupation japonaise, et en ce 
						sens un complément de l’histoire officielle à ne pas 
						négliger ; 
						- le quatrième 
						chapitre apporte un commentaire intéressant  |  | 
						
						 
						Bai Xianyong |  
					
						| 
						sur un « récit 
						de mémoire » qui commence par la disparition d’un père : 
						« Catastrophe familiale » ou Jiabian (家變) 
						de 
						Wang Wenxing (Wang Wen-hsing 王文興) 
						; 
						- et le 
						dernier chapitre est une analyse détaillée d’une 
						nouvelle de 1926 du poète 
						
						Lai He (賴和), 
						considéré comme le père de la Nouvelle Littérature 
						taïwanaise. 
						Une « Balance »
						est 
						une illustration de la théorie des influences, courant 
						dominant de la littérature comparée ; elle a été inspiré 
						par « L’affaire Crainquetabille » d’Anatole France : 
						l’histoire a rappelé à Lai He l’arbitraire policier 
						qu’avait à subir la population taïwanaise. 
						   
						        
						 
						Ce parcours en 
						ligne brisée est complété par un aperçu – par Esther Lin 
						- des romanciers de la « jeune génération », 
						c’est-à-dire celle née entre 1960 et 1972.   
						   
						        
						 
						Le livre II, 
						pour terminer, dresse un état des traductions en 
						 |  | 
						
						 
						Wang Wenxing |  
				français, en allemand 
				et en anglais, ainsi que des recherches réalisées sur la 
				littérature taïwanaise dans ces trois langues, et fait ressortir 
				les différences et les liens entre les stratégies de traduction 
				et d'édition de la littérature taïwanaise dans les pays retenus 
				et la visibilité de Taiwan qu’il en résulte.  
				     
				        
				 
				Outre les riches 
				références bibliographiques, cet ouvrage apporte un précieux 
				éclairage sur la littérature taïwanaise moderne.  
				     
				        
				 
				     
				        
				 
				
				Notes 
				(1) Voir le programme 
				des communications : 
				
				
				www.cefc.com.hk/francais/enewsletter/LettreAoutSept/Programme11_bleu%20copie.pdf 
				(2) L’ouvrage concerne 
				uniquement la littérature moderne, de 1920 à nos jours, et la 
				littérature des auteurs d’origine chinoise, donc à l’exclusion 
				de celle des écrivains aborigènes.  
				(3) Voir Repères 
				historiques : 
				
				le haipai. 
				     
				        
				 
				     
				        
				 
				    
				        
				   
				        
				   
				        
				 
				    
				        
				   | 
                  
                  |