Nouvelles récentes de a à z

 
 
 
     

 

 

Liu Qingbang  刘庆邦

« Ensemble à vents » (《响器》)

par Brigitte Duzan, 21 février 2011

 

Présentation

 

Cette nouvelle est celle que Liu Qingbang dit préférer, parmi toutes celles qu’il a écrites. Elle est totalement différente de celles qui l’ont fait connaître, et qui dépeignent surtout le monde de la mine.

 

C’est un tout autre genre que nous découvrons avec ce texte : une description sensible et poétique, voire onirique, de la vie à la campagne, à travers l’éveil artistique d’une gamine de quatorze ans fascinée par le son du suona entendu lors d’un enterrement.

 

C’est l’occasion pour Liu Qingbang de nous offrir un tableau haut en couleur des coutumes et mentalités paysannes, et une vue personnelle de l’importance que revêt traditionnellement la musique à la campagne en certaines occasions. La fin est un hommage à tous ces musiciens anonymes,et en même temps à l’importance de leur anonymat, clé de la transmission de cette tradition orale.

 

La nouvelle

 

Si les deux longues descriptions naturalistes du sorgho dans le vent et la pluie et de la neige sur le village semblent un peu forcées, le reste est superbement écrit et mené. La nouvelle rappelle

 

suona (唢呐)

 

Shen Congwen par la subtile poésie qui se dégage du personnage tout simple de Gaoni, qui apparaît comme une petite sœur de Xiaoxiao.

 

Il faut lire les nouvelles de ce genre de Liu Qingbang : il a dit et répété que le monde de la mine est la prolongation sans rupture de celui de la campagne ; ce genre de texte fournit donc la toile de fond qui donne toute la profondeur requise à ceux sur la mine.

 

* Note : “大笛”dàdí  (normalement une flûte) désigne ici un suona (唢呐), instrument principal des ensembles à vent et percussions (《响器》) qui animent les fêtes villageoises en Chine, et en particulier les enterrements, comme c’est le cas dans cette nouvelle.

 

 

 I

   庄上死了人,照例1要请响器班子吹一吹。他们这里生孩子不吹,娶新娘不吹,只有死了人才吹打张扬一番。

  大笛*刚吹响第一声,高妮2就听见了。她以为有人大哭,惊异于是谁哭得这般响亮3!当她听清响遏行云4的歌哭是著名的大笛发出来的,就忘了手中正干着的活儿,把活儿一丢,快步向院子外面走去。节令到了秋后,她手上编的是玉米辫子,她一撒手,未及5打结的玉米辫子又散开了,熟金般的玉米穗子6滚了一地。母亲问她到哪里去,命她回来。这时她的耳朵像是已被大笛拉长了,听觉有了一定的方向性,母亲的声音从相反的方向传来,她当然听不进去。 

  大笛不可抗拒7的召唤力是显而易见的,不光高妮,庄上的人循着8大笛的声响纷纷向死了人的那家院子走去。他们明知去了也捡不到什么,不像参加婚礼,碰巧9了可以捡到喜钱、喜糖和红枣10,但他们还是不由自主地去了。他们是冲着大笛吹奏出的音响去的。这种靠空气传播的无形的音响,似乎比那些物质性的东西更让他们热情高涨11和着迷12。高妮的母亲本打算一直把玉米辫子编下去,编完了高高挂在树杈子上,给女儿做一个榜样13。可大笛的音响老是贴着树梢子掠来掠去14,她编着编着就走了神15,把玉米辫子当成了女儿的头发辫子。她还纳闷呢15,高妮滑溜溜的头发什么时候变得像玉米皮子一样涩手16呢!做母亲的哑然笑了一下,很快为自己找到一个听大笛的借口:去把高妮找回来。

  院子里已经站满了人,高妮的母亲进不去了,只能站在大门口往里看看。响器班子在院子一角,集体坐在一条长板凳上吹奏。他们一共是三个人,一个老头儿,一个中年人,还有一个小伙子。吹大笛的小伙子坐在中间,老头儿和中年人分别在两边捧笙17。他们面前置有一张方桌,上面有暖水瓶、茶碗和纸烟。高妮的母亲认出来了,这是镇上崔豁子18的响器班子,那个老头儿就是四乡闻名的崔豁子。据说从崔豁子的曾祖父那一辈起就开始吹响器,到崔豁子的儿子这一辈,他们家已吹了五代。换句话说,周围村庄祖祖辈辈的许多人最终都是由他们送走的。他们用高亢19的大笛,加上轻曼20的笙管,织成一种类似祥云21一样的东西,悠悠地就把人的魂灵过渡到传说中的天国去了。吹奏者塌蒙着眼皮22,表情是职业化的。他们像是只对死者负责,或者说只用音乐和死者对话,对还在站立着的听众并不怎么注意。他们吹奏出的曲调一点也不现代和复杂,有着古朴单纯的风格。不消23说曲调代表的是人类悲痛的哭声,并分成接引24、送别和安魂等不同的段落,以哭出不同的内容来。它又绝不模仿任何哭声,要说取材的话,它更接近旷野25里万众的欢呼,天地间隆隆滚动的春雷26。人们静默地听着,只一会儿就不知身在何处了。有人不甘心自我迷失,就仰起头往天上找。天空深远无比,太阳还在,风里带了一点苍凉的霜意27。极高处还有一只孤鸟,眨眼间就不见了。应该说这个人死得时机不错,你看,庄稼收割了,粮食入仓了,大地沉静了,他就老了,死了。他的死是顺乎自然的28

  大笛连续发出几个直冲霄汉的强音29,节奏也突然加快。笙管紧紧地附和着30,以它密集的复合音30,把大笛的强音接过来,再烘托31上去。原来死者的女儿哭着奔丧来了32,响器在做呼应的工作。响器推动了死者女儿的悲痛,使女儿家悲上加悲,哭得更加惊天动地。这时响器的声响仿佛是抽象的、统摄性的33,对女儿家的哭声既不覆盖,也不吹捧34,只是不露痕迹地给以升华35,使其成为全人类共享的幸福的悲痛。从高空垂洒36的阳光给每一位听众脸上都镀上了金辉37,他们的表情显得庄严而神圣。庄民的感觉是共同的,世间有了这样的乐声相伴,死亡就不再是可怕的事情了。

有人碰了高妮的母亲一下,示意让她看一个人,那个人是她的女儿高妮。高妮的母亲这才看见了,高妮站在离响器班子很近的地方,满脸的泪水已流得不成样子38。死者是别人的祖父,又不是高妮的祖父,两家连姓氏都不相同,可以说没有任何血缘和亲戚关系,高妮不该这样痛心。再说,一个十四五岁的闺女家39,当着这么多人流眼泪是不好看的,是丢丑的40。高妮的母亲生气了,她生高妮的气,也生自己的气。双重的气愤促使她挤过人群,捉住高妮的胳膊,不由分说41就往外拉。

 

Vocabulaire 1 :

 

01 照例  zhàolì  en règle générale

02 高妮 Gāonī  (prénom)   妮子nīzi  (fam./dial.) fillette

03 响亮 xiǎngliàng  qui résonne fort et clair

04 响遏行云 xiǎng'èxínɡyún  qui se réverbère jusqu’aux cieux

05 未及 wèijí  pas le temps de, trop tard pour

06 穗子 suìzi  épi 

07 抗拒 kàngjù  résister à

08 xún  obéir, se soumettre à

09 碰巧 pèngqiǎo  avoir de la chance

10 红枣 hóngzǎo  date rouge

11 高涨 gāozhǎng  monter en flèche  

12 着迷 zháomí  être un fan de

13 榜样   bǎngyàng  modèle

14  lüè  passer à toute vitesse

15 走神 zǒushén  perdre sa concentration

16 哑然 yǎrán  en silence

17 捧笙 pěngshēng  tenir un sheng,  ou orgue à bouche (accompagne souvent le suona) 

               (pěng tenir des deux mains)

18 崔豁子Cuī Huōzì  (nom d’un musicien)  豁子huōzì  bec de lièvre

19 高亢 gāokàng  sonore, qui porte 

20 轻曼 qīng màn  doux et gracieux

21 祥云  xiángyún  nuage auxpicieux, porte bonheur

22 塌蒙眼皮   tāméng  yǎnpí  baisser les paupières

23 不消 bùxiāo  inutile de

24 接引 jiēyǐn  recevoir, accueillir et guider

25 旷野 kuàngyě  l’immensité sauvage

26 隆隆滚动 lónglóng gǔndòng  rouler en grondant (tonnerre)

27 苍凉 cāngliáng  sombre, désolé   霜意shuāng yì  sensation de givre

28 顺乎 shùnhū  conforme à

29 直冲霄汉 zhíchōng xiāohàn   qui se précipite tout droit jusqu’aux cieux = hardi, audacieux, impétueux

     :云霄yúnxiāo les cieux; 汉:河汉héhàn/银河yínhé la Voie lactéeDonc 霄汉=天空。

30 附和 fùhè  faire écho               复合音 fùhéyīn  ton composé

31 烘托 hōngtuō  ombrer un dessin, d’où faire ressortir (par contraste)

32 奔丧 bēnsāng  revenir chez soi pour des funérailles

33 抽象 chōuxiàng  abstrait        统摄 tǒngshè  commander

34 覆盖 fùgài  couvrir    吹捧 chuīpěng  flatter, louer

35 给以升华  gěiyǐ shēnghuá  sublimer, offrir une image sublimée

36 垂洒 chuísǎ  asperger   (chuí  = 下垂  xiàchuí  tomber   répandre, arroser)

37 镀金  dùjīn  plaqué or    金辉jīnhuī  éclat de l’or, splendeur dorée

38 不成样子 bùchéng yàngzi  être réduit à l’ombre de soi-même

39 闺女 guīnü  jeune fille

40 丢丑 diūchǒu  perdre la face

41 不由分说 bùyóufēnshuō  sans attendre/permettre d’explications

 

Traduction 1 :

 

Il y avait eu un décès, dans le village, et, dans ces cas-là, on invite en général un ensemble de vents et percussions à venir jouer. Dans cette région, on n’en fait pas venir pour une naissance ou un mariage, seulement lors d’un décès.

 

Le suona avait juste attaqué ses premières notes lorsque Gaoni l’entendit. Elle pensa que

c’était quelqu’un qui pleurait à chaudes larmes, et se demanda avec étonnement qui pouvait bien avoir des pleurs aussi clairs et sonores ! Lorsqu’on lui dit que ce chant qui sonnait comme une plainte portant jusqu’aux cieux venait du suona d’un célèbre musicien, elle en oublia le travail qu’elle était en train de faire, et le laissa en plan pour se diriger d’un pas rapide vers la cour d’où il provenait. L’automne était fini ; elle était en train de tresser des nattes de maïs, et, dès qu’elle les lâcha, celles qui n’avaient pas encore été attachées se défirent aussitôt, et les épis, dorés comme le sont les épis bien mûrs, roulèrent par terre. Sa mère lui demanda où elle allait, et lui ordonna de revenir. Mais elle semblait avoir les oreilles attirées par le son du suona, l’ouïe concentrée dans cette direction, et comme la voix de sa mère venait de la direction opposée, elle ne l’entendit pas.

 

L’appel du suona avait une force irrésistible, de tout évidence, non seulement pour Gaoni, mais pour les villageois qui, soumis, se dirigeaient en foule vers la cour de la famille du mort. Ils savaient bien qu’ils n’avaient rien à en tirer, ce n’était pas un mariage où, avec un peu de chance, on peut recevoir un peu d’argent, des bonbons ou des dattes rouges ; mais ils avançaient comme malgré eux, vers l’endroit d’où provenait le son du suona. Ce son immatériel qui se transmettait dans l’air semblait leur inciter une même fascination et un même enthousiasme. La mère de Gaoni pensa reprendre le travail de tressage du maïs pour, une fois le tout  terminé, accrocher les nattes bien haut à la fourche d’un arbre, et donner ainsi l’exemple à sa fille. Mais le son du suona ne cessait pas de passer, très vite, dans la cime des arbres, alors elle finit par ne plus arriver à se concentrer sur son travail, prenant les tresses de maïs pour les nattes de sa fille … ! Cela la fit rire en silence, et elle trouva très vite un prétexte pour aller écouter le suona : aller chercher Gaoni pour la ramener à la maison.

 

Un ensemble dans une cour

 

La cour était déjà pleine de gens, debout, qui ne la laissèrent pas entrer ; elle dut se contenter de rester à la porte, en regardant à l’intérieur. Les musiciens jouaient, assis sur un banc, dans un coin de la cour. Ils étaient trois, au total, un homme âgé, un autre d’âge moyen et un garçon plus jeune. C’était lui, assis au milieu, qui jouait du suona, et les deux autres, des deux côtés, jouaient de l’orgue à bouche. Ils étaient assis devant une table carrée, sur laquelle était posée une

thermos d’eau chaude, des tasses de thé et des cigarettes. La mère de Gaoni reconnut l’ensemble de Cui Huozi, du bourg ; il était célèbre dans tout le canton. On disait que c’était dès la génération de

l’arrière grand-père de Cui Huozi qu’ils avaient commencé à former un ensemble d’instruments à vents de ce genre ; ils en étaient maintenant à la génération de son fils, cela faisait cinq générations de musiciens. Autrement dit, ils avaient accompagné à leur dernière demeure des générations et des générations de morts, dans les villages tout autour. Ils jouaient du suona dont le son porte bien, et y ajoutaient l’orgue à bouche, doux et gracieux ; tout ensemble, cela créait de bons auspices pour accompagner les âmes des défunts dans leur passage vers ce lointain royaume céleste dont parle la légende. Les paupières baissées, les musiciens avaient une expression très professionnelle et semblaient n’avoir de responsabilité qu’envers le défunt ; en d’autres termes, leur musique ne leur servait qu’à dialoguer avec le mort, et ils ne prêtaient aucune attention à l’auditoire massé autour d’eux. La mélodie qu’ils jouaient n’était ni moderne ni compliquée, c’était une musique simple et accessible. Bien évidemment, ce chant imitant les pleurs était l’expression de l’affliction humaine, se divisant en parties distinctes reflétant la conduite des âmes, leur séparation puis leur repos, d’où des nuances différentes. Ce n’était pas une simple imitation de pleurs quelconques ; il se rapprochait bien plus de l’appel d’une multitude de gens dans l’immensité sauvage de la nature, ou du tonnerre qui gronde au printemps entre ciel et terre. Les gens écoutaient en silence, ne sachant plus, au bout d’un moment, où ils se trouvaient. Certains, n’aimant pas se sentir perdus, levaient une tête inquisitrice vers le ciel. Celui-ci était infiniment lointain, le soleil ne s’était pas encore couché, le vent apportait une sensation de froide désolation. Le dernier oiseau solitaire, tout là haut, disparut en un clin d’œil. Il faut dire que cet homme était mort au bon moment ; regardez donc : les récoltes étaient faites et engrangées, la terre reposait dans le calme, lui avait vieilli, était décédé. Sa mort était conforme aux lois de la nature.

 

Le suona fit entendre quelques notes impétueuses l’une après l’autre, et le rythme s’accéléra soudain. Les orgues à bouche lui firent aussitôt écho, se lançant dans un canon complexe faisant ressortir par contraste la voix du suona.  Revenue chez elle pour les funérailles, la fille du mort pleurait son père, et les musiciens lui répondaient en écho, soulignant son affliction, accentuant encore la peine de la famille, conférant à leurs pleurs une émotion extrême. La musique, à ce moment-là, semblait abstraite, dominant tout ; elle ne couvrait pas totalement les pleurs de la famille, ne les exaltait pas non plus, elle les sublimait, tout simplement, sans en conserver de traces, devenant ainsi pour l’humanité entière une joie profondément ressentie au fond même du malheur. La lumière du soleil se diffusant du haut du ciel sur les visages de chacun des auditeurs les nimbait d’une teinte plaqué or, leur donnant une expression à la fois sévère et sacrée. Les villageois communiaient dans la même idée : que, puisqu’il y avait sur terre une telle musique, la mort n’était plus quelque chose d’effrayant.

 

Un homme poussa la mère de Gaoni, en lui montrant quelqu’un, et ce quelqu’un était sa fille, qu’elle

n’avait pas encore aperçue. Elle se tenait tout près des musiciens, le visage baigné de larmes, décomposée. Le défunt ne lui était pourtant pas apparenté, il était d’une autre famille, les patronymes

n’avaient rien à voir, le mort et elle n’avaient aucun lien de sang ni rapport de parenté, Gaoni n’aurait donc pas dû montrer autant de peine. En d’autres termes, qu’une gamine de quatorze ou quinze ans verse ainsi des larmes en présence d’autant de gens, c’était un triste spectacle, et c’était perdre la face. La mère de Gaoni fut prise de colère, de colère contre Gaoni, mais aussi contre elle-même. Sous

l’emprise de cette double colère, elle se fraya un passage dans la foule, se saisit du bras de Gaoni et, sans la laisser s’expliquer, l’entraîna dehors.

 

II

 

  沉浸在乐声中的高妮吃惊不小,好像她在梦境中正自由地飞翔1,被外力一拽2,突然就跌落在真实的硬地上了,就被摔醒了。还不知道拽她的人是谁,她就恼了,本能地夺着胳膊,作出反抗。当知道了拉住她的翅膀,破坏了她飞翔的不是别人,而是她的母亲时,她就更恼怒了,几乎踢了母亲。母亲强有力的手仍不放松她,一股劲把她拉到院子外头去了。母亲说,你娘还没死,你哭什么哭!

  高妮不承认她哭了。

  没哭你脸上是什么?是蛤蟆尿吗3?母亲松开她,让她用自己的手摸摸自己的脸。

  高妮还没摸自己的脸,嘴里浓浓的咸味已作出证实,她确实在不知不觉的情况下流泪了,泪水通过分水岭4般的鼻梁两侧,流进嘴角里去了。她用手背自我惩罚5似的把眼睛抹了一下,脸上掠过一阵羞赧6,辩解说,她不是为死人而哭。

  那你为什么哭?母亲问。

  高妮说她也不知道。

  母亲说好了,回家吧。她往后退着,说不,就不,转身又钻进举丧人家的院子里去了。母亲狠狠地骂了她,可她没听清母亲骂的是什么。或许母亲的骂只是大笛的一个修饰音7,轻轻一滑就过去了。让高妮感到失落的是,当她重新挤到响器班子的桌案前时,乐手们停止了吹奏,手指间夹进了点燃的纸烟,送到嘴边的是粗瓷茶碗。有那么一瞬间,高妮没想到乐手们的吹奏告一段落,需要休息一会儿,以为高明的乐手们要换一个吹奏法,把纸烟的细烟棒和大口径的茶碗也会弄出美妙的声音来。停了一会儿,见纸烟和茶碗上升起的只有缕缕细烟,她才意识到都是由于母亲的干扰8,她有可能把最好听最动人的部分错过了。... 好在死者还没有出殡9,等不了多大一会儿,响器还会重新吹奏起来。怀着期待的心情,她难免多看了几眼那个吹大笛的小伙子的嘴巴,想听听小伙子说话的声音是怎样的。在她的想象里,小伙子说话的声音应该和大笛是同一类型,一开口便是鸿鹄般的长鸣10。然而小伙子没有说话。不说话也不要紧11,在高妮看来,小伙子的嘴巴本身就很特殊,而且漂亮。大概由于嘴唇长期努力的缘故,小伙子唇肌发达,唇面红艳,整个嘴唇饱满结实而富有弹性12。如果把这样的嘴唇用指头按一下,说不定唇面在压下和弹起的时候本身就会发出音响。

  高妮看人家,人家也注意到她了。她被母亲强行拉回去,又自己跑回来,这一点在场的人都看到了。别看13小伙子崔孩儿在吹大笛时不怎么抬眼,院子里的一切他仍能尽收眼底14。他欢迎这样忠实的听者。崔孩儿以艺人的欢迎方式,把烟盒拿起来,盒口对着高妮伸了一下,意思问高妮要不要吸一棵烟。高妮长这么大还从没有人给她让过烟,这个陌生而崭新15的方式把高妮吓住了,她满脸通红,脑子里轰轰作响。她身后站着不少人,那些人喜欢逢场作趣16,都往前推她。高妮感到有人推她,就使劲坐着身子往后退,她越是往后退,别人越是往前推。毕竟寡不敌众17,高妮到底被后面的人推到崔孩儿面前去了,要不是有桌案挡着,那些人或许会一直把高妮推送到崔孩儿的怀里去。在响器班子暂歇期间18,一个小姑娘被捉弄19,这无疑是一个不错的插曲20,于是听众的嘴巴都毫无例外地21咧开了,有的嘴巴还迸发出短促的被称为喝彩的声音22。这样的欢乐气氛跟院子正面灵堂里23的气氛并不矛盾,说不定死者的后人所追求的正是这种效果。我们的高妮小脸红得可是更厉害了,因为她无意间24看见大笛手正对她微笑,并把嘴唇嘬起来25,作出了一个类似吹的姿势。天哪,他难道要吹我吗!人们面对突如其来的荣幸26,第一个反应往往不是接受,而是躲避。高妮也是这样,她转过了身,张着双手戗着膀子27与推她的人相抵抗。就在这时,响器又吹奏起来。响器一响,人们顿时肃静下来28,不把逗高妮当回事了。高妮很快就后悔了,后悔没有接过大笛手递向她的纸烟。不会吸烟怕什么,什么事情都有一个开头,都是从不会到会。高妮还有一个后悔……

死者出殡时,响器班子是在行进中吹奏。送殡队伍可谓浩浩荡荡29,络绎不绝30。走在前面开道的是两位放三眼枪的枪手,其次才是响器班子,紧随其后的是八人抬的棺木,最后白花花的举哀队伍31是死者的孝子贤孙32及其他亲属。围观的人们不在秩序之内33,这些人黑压压的34,要比秩序内的人多得多。他们有着较大的自由度,喜欢看什么听什么就选择什么。比如高妮喜欢听响器,她就跟定响器班子,寸步不离。响器在旷野里35吹奏,跟在庭院里吹奏给人的感觉又不同些。收去庄稼的千里大平原显得格外宽广,麦苗长起来了,给人间最隆重的仪式36铺展开无边无际的绿色地毯。在长风的吹拂下,麦苗又是起伏的,一浪连着一浪。高妮不认为麦苗涌起的波浪是风的作用,而是响器的作用,是麦苗在随着响器的韵律大面积起舞37。不仅是生性敏感的麦苗,连河水,河堤外38烧砖用的土窑39,坟园里一向老成持重的柏树40等等,仿佛都在以大笛为首的响器的感召下舞蹈起来。响器的鸣奏对举哀队伍的帮助更不用说,它与众多的哭声形成联动,你中有我,我中有你,浑然天成41,不分彼此。关键在于,如果没有响器的归纳和提炼42,哭,只能是哭,有了响器的点化43,哭就变成了对生死离别的歌咏,就有了诵经的性质44,并成为人类世代相袭的不朽的声音。高妮走在响器班子左侧前面一点,为了听得真切,看得真切,她不惜倒退着走路。高妮心中热浪翻滚着45,她再次不可避免地流泪了。麦地里腾起的尘土刚粘附46在她的泪痕上,后续的更加汹涌的47泪水就把前面的泥土冲刷掉了48。这样反复几次,高妮差不多成了一个土妮子了。

 

Vocabulaire 2 :

 

01 飞翔 fēixiáng  planer

02 zhuài  tirer, entraîner 

03 蛤蟆 háma  crapaud ou grenouille   尿 niào  urine

04 分水岭 fēnshuǐlǐng  ligne de partage des eaux / ligne de démarcation

05 惩罚 chéngfá  punir

06 lûè  passer comme un éclair  羞赧 xiūnǎn rougir de honte

07 修饰 xiūshì  décorer  修饰音xiūshìyīn  ornement (musique)

08 干扰 gānrǎo  déranger

09 出殡 chūbìn  former une procession pour des funérailles

10 鸿鹄 hónghú cygne  

11 不要紧 búyàojǐn  être sans importance

12 弹性 tánxìng élasticité

13 别看 biékàn  bien que

14 尽收眼底 jìnshōuyǎndǐ  avoir une vue d’ensemble, panoramique

15 崭新 zhǎnxīn tout nouveau

16 逢场作趣  féngchǎngzuòqù  profiter d’une occasion pour s’amuser, se distraire

17 寡不敌众 guǎbùdízhòng être vaincu par un ennemi supérieur en nombre

18 暂歇 zànxiē  pause temporaire

19 捉弄  zhuōnòng  taquiner, jouer un tour à

20 插曲 chāqǔ  interlude

21 无例外 wúlìwài  sans exception

22 迸发出 bèngfāchū  laisser éclater   短促 duǎncù  bref  喝彩 hècǎi acclamer, applaudir

23 灵堂 língtáng  salle pour veiller les morts

24 无意间 wúyìjiān  sans le vouloir, à son corps défendant

25 ici  zuō  sucer, têter

26 突如其来 tūrúqílái  inattendu  荣幸 róngxìng  honneur

27 qiāng dans une direction opposée / écarter  膀子bǎngzi  bras

28 肃静 sùjìng  être silencieux

29 浩荡 hàodàng  imposant,  majestueux

30  络绎不绝 luòyìbùjué un flot ininterrompu

31 举哀 jǔāi  être en deuil

32 孝子 xiàozǐ  fils qui respecte le devoir filial / fils en deuil 

     孝子贤孙 xiàozǐ xiánsūn  digne progéniture

33 秩序 zhìxù  ordre / séquence

34 黑压压 hēiyāyā  masse, foule sombre

     (le noir s’opposant au blanc des processionnaires : 白花花 báihuāhuā – avec effet de parallélisme)

35 旷野 kuàngyě  étendue déserte, immensité des champs, pleine campagne

36 隆重的仪式 lóngzhòng yíshì  cérémonie solennelle

37 韵律 yùnlǜ   règles de versification, prosodie

38 河堤 hédī  digue sur les bords d’une rivière

39 土窑 tǔyáo  four à briques = 烧砖shāozhuān

40 老成持重 lǎochéngchízhòng  plein d’expérience et réservé  柏树 bǎishù cyprès

41 浑然天成 húnrántiānchéng  en symbiose avec le ciel : harmonie céleste

 

三眼枪:

arme blanche traditionnelle

utilisée en arts martiaux

42 归纳 guīnà  résumer, synthétiser 提炼 tíliàn  raffiner

43 点化 diǎnhuà  désigne à l’origine le processus alchimique de transformation des métaux en or

44 歌咏 gēyǒng  chanter  诵经 sòngjīnɡ chanter des prières, chanter des litanies

45 热浪翻滚rèlàng fāngǔn  brûler d’un feu intérieur

46 粘附 zhānfù  coller, adhérer à

47 汹涌 xiōngyǒng  déferler

48 冲刷 chōngshuā  nettoyer à grande eau

 

Traduction 2 :

 

Immergée dans la musique, Gaoni eut un geste de frayeur : éveillée d’un vol en toute liberté sur les ailes d’un rêve, comme ensorcelée par une force extérieure, elle retomba soudain sur terre, dans la dure réalité. N’ayant pas encore réalisé qui la tirait ainsi, elle eut un mouvement de colère, cherchant instinctivement à résister et libérer son bras. Lorsqu’elle vit que la personne à côté d’elle qui avait coupé court à son envol n’était pas une étrangère mais sa mère, sa colère redoubla, et elle lui envoya presque un coup de pied. Mais, la tirant à l’extérieur de la cour en la tenant fermement par la main, sa mère lui dit : ce n’est pas ta mère qui est morte, alors qu’est-ce que tu as à pleurer comme ça ?

Gaoni refusa de reconnaître qu’elle pleurait.

Tu ne pleures pas ? Et qu’est-ce que tu as sur le visage, alors ?  C’est de la bave de crapaud,

peut-être ? Sa mère la lâcha, pour lui permettre de se tâter le visage.

Sans même avoir besoin de le faire, Gaoni sentit sur les lèvres un fort goût salé, preuve

qu’inconsciemment elle versait bien des larmes qui coulaient des deux côtés de la ligne de séparation que dessinait son nez, jusqu’à sa bouche. Elle s’essuya les yeux du revers de la main, comme pour se punir, tandis qu’une fugace lueur de honte passait sur son visage, et expliqua que ce n’était pas pour le mort qu’elle pleurait.

Pourquoi est-ce que tu pleures, alors ? lui demanda sa mère.

Gaoni répliqua qu’elle n’en savait rien.

 

Bon, dit sa mère, on rentre. Non, dit Gaoni en reculant, non, et, se retournant, repartit dans la cour de la famille du défunt. Sa mère, furieuse, lui lança des imprécations, mais elle n’entendit pas nettement ce qu’elle disait. Peut-être les invectives de sa mère n’étaient-elles qu’un ornement de la mélodie du suona, comme une trille légère qui passe très vite. Mais elle se sentit désemparée lorsque, s’étant à nouveau frayé un chemin dans la foule, elle arriva à la table des musiciens : ceux-ci s’étaient arrêté de jouer, et, une cigarette allumée entre deux doigts, étaient en train de porter aux lèvres une tasse de thé d’une faïence grossière. A cet instant précis, Gaoni n’imagina pas que les musiciens aient pu annoncer une pause, parce qu’ils avaient besoin de se reposer un peu ; elle pensa qu’ils voulaient changer de répertoire et que le mince filtre de cigarette tout comme la large tasse étaient des éléments propres à avoir des effets magiques sur la musique. Ce n’est qu’au bout d’un moment, lorsqu’elle vit qu’il n’y avait qu’un mince filet de fumée qui montait des cigarettes et des tasses, qu’elle réalisa que, à cause de l’intrusion de sa mère, elle avait peut-être raté le passage le plus beau, le plus émouvant de la musique. …

 

Le cortège funèbre ne s’était pas encore ébranlé, il suffisait donc d’attendre un peu pour que les musiciens recommencent à jouer. En attendant, elle ne pouvait s’empêcher de fixer les lèvres du jeune joueur de suona, en se demandant quel pouvait être le son de sa voix. Dans son esprit, ce devait être un son très proche de celui du suona, quelque chose comme le long chant d’un cygne. Le jeune musicien, cependant, ne disait rien. Mais cela

n’avait pas d’importance, aux yeux de Gaoni, la bouche du jeune garçon était très spéciale,

 

Un cortège funèbre

et très belle. Sans doute parce que ses lèvres devaient fournir de longues périodes d’efforts, elles avaient développé leurs muscles et étaient d’un rouge écarlate ; toute la bouche donnait ainsi une impression de robustesse et de force. On aurait dit que, si l’on touchait cette bouche du doigt, sous la pression, elle produirait d’elle-même de la musique.

 

Gaoni regardait les gens, mais les gens aussi l’observaient. Ils avaient vu sa mère l’emmener, et elle lui échapper et revenir. Bien que le jeune musicien, Cui junior, n’eût pas levé les yeux de son instrument, il avait bien vu tout ce qui se passait dans la cour, et il appréciait d’avoir une auditrice aussi fidèle. Sa manière de le lui montrer fut de prendre son paquet de cigarettes et de le tendre à Gaoni pour qu’elle en prît une. Mais, à son âge, personne n’avait jamais proposé à Gaoni de fumer, ce geste tout nouveau pour elle l’effraya, elle devint écarlate, et sa tête se mit à bourdonner. Il y avait du monde derrière elle ; tous ces gens-là n’aimaient pas laisser passer une occasion de s’amuser et la poussèrent en avant. Gaoni, sentant qu’on la poussait, résista, mais plus elle tentait de reculer, plus les gens la poussaient. Vaincue par une force supérieure, elle se retrouva face à face avec le jeune Cui, et, encore heureux, il y avait la table entre eux, autrement la foule l’aurait poussée dans ses bras. Pendant la pause des musiciens, taquiner une petite fille est sans aucun doute un interlude bienvenu, alors tout le monde s’esclaffa, et certains esquissèrent même quelques acclamations. Cette atmosphère de liesse n’était pas en contradiction avec l’ambiance du funérarium en face de la cour, peut-être même que c’était ce que voulaient les descendants du mort. Mais la pauvre Gaoni prit un air encore plus défait lorsqu’elle vit que le jeune musicien lui souriait, et avançait les lèvres comme pour se mettre à jouer du suona, mon dieu, se dit-elle, comme si c’était de moi qu’il voulait jouer ! Face à un honneur inattendu, la première réaction est le plus souvent de l’éviter plutôt que de l’accepter.  C’est ce que fit Gaoni, elle se retourna, et, écartant les bras, se mit des deux mains à écarter les gens qui la poussaient. C’est alors que l’ensemble recommença à jouer. Les gens firent instantanément silence, sans plus s’occuper de Gaoni qui, très vite, se mit à regretter de ne pas avoir accepté la cigarette que lui tendait le musicien. Pourquoi avoir peur de fumer, il faut un début à tout, tout part de rien. Mais elle avait un autre regret…

 

Le cortège funèbre se mit en route, les musiciens jouant en défilant. C’était un cortège vraiment imposant, une file de gens à perte de vue. Devant, deux porteurs de lances ouvraient la route, les musiciens ne venant qu’ensuite, puis suivaient les huit porteurs du cercueil, et enfin la famille en deuil, tout en blanc, enfants et petits enfants en pleine dévotion filiale, et le reste des parents. Les spectateurs tout autour ne faisaient pas partie du défilé, et formaient une foule sombre bien plus nombreuse que les membres du cortège eux-mêmes. Ils bénéficiaient d’une certaine liberté de mouvement, et pouvaient regarder ce que bon leur semblait. C’est ainsi que Gaoni, qui voulait écouter la musique, marchait à quelques pas des musiciens. L’ensemble avançait maintenant en terrain découvert, et la musique ne sonnait plus comme dans la cour. A des lieues à la ronde, les récoltes faites, la plaine donnait une impression d’immensité ; les pousses de blé commençaient à poindre, et, comme pour une cérémonie des plus solennelle, étendait un tapis vert à perte de vue. Sous le souffle du vent, les pousses se couchaient et se redressaient, en vagues successives. Pour Gaoni, ce n’était pas le vent qui déclenchait ces vagues, c’était la musique, les pousses de blé dansaient en mesure au rythme de la musique. Et ce n’étaient pas seulement les pousses de blé qui avaient cette sensibilité, il y avait aussi l’eau de la rivière, le four à briques à côté de la digue, au bord de la rivière, et les vénérables peupliers du cimetière, tout répondait à l’appel des musiciens à entrer dans la danse.

 

L’aide apportée par les musiciens à la famille en deuil était encore plus évidente ; leur chant venait se joindre  aux innombrables pleurs, les pénétrait, ne faisait plus qu’un avec eux, devenant indissociable

d’eux, en une sorte d’harmonie céleste. L’essentiel, c’est que, sans le pouvoir de symbiose et de sublimation de la musique, les pleurs n’eussent été que des pleurs ; grâce à l’alchimie opérée par la musique, cependant, les pleurs se transformaient en élégie célébrant le départ du défunt du monde des vivants, c’était une litanie, mais, bien plus, la voix exprimant la peine sans fin de générations humaines.

 

Marchant résolument à reculons sur leur gauche, Gaoni précédait de peu le groupe de musiciens, pour bien les entendre et bien les voir. Une vague de chaleur l’envahit, et elle ne put à nouveau s’empêcher de verser des larmes. La poussière que le vent soulevait dans les champs de blé venait se coller sur ses larmes, mais, celles-ci se déversant de plus belle, venaient nettoyer les traces initiales ; le processus se répétant, Gaoni se transforma peu ou prou en poupée de terre (1).

 

(1) Jeu de mot sur le prénom 高妮 Gāonī () nī (zi) désigne une fillette ; 土妮 tǔnī  signifie donc ‘fillette de terre’ (poupée, statuette de terre).

 

III

 

  死者入土后,响器班子没有再进庄,他们各自把响器收到布褡裢里1,从地里拐上2大路,直接向镇上走去。他们走了,高妮怎么办。高妮有些不由自主3,也尾随着他们上了大路。他们看见她了,崔豁子扬扬手让她回去。她没有回去,站在了原地。崔豁子他们往前走时,她又尾随过去。他们像是简单商议了一下,崔豁子和大儿子先走,由小儿子崔孩儿站下来等她。按他们通常的理解,这个不难看的小姑娘大概是被崔孩儿迷住了,有一段情缘需要了结4。崔孩儿问,你跟着我们干什么?高妮的回答连她自己事先也没想到,她说,我想跟你学吹大笛。崔孩儿眨了眨眼皮说,就你,想学吹大笛,你不是说梦话吧。高妮肯定地说,她不是说梦话。崔孩儿没有从正面答复她,说,那,我让你吸烟,你为什么不吸?高妮说,我吸,你现在给我吧!崔孩儿抽出一棵烟,没交到她手里,直接杵进她嘴里,打火为她点燃。高妮真的不会吸烟,她鼓着嘴,像吹大笛那样吹起来了。崔孩儿让她吸,往里吸,吸深点儿,指了指她的肚子。她这才把烟吸进去了。烟的味道很硬,有点噎人,还有点呛人5,但她使劲忍着,没让自己咳嗽出来。她把人家让她吸烟当成一场考试了6。她吸着烟,眼巴巴地望着崔孩儿。崔孩儿仍没有答复她,说,你的嘴是不是太小了?高妮心想,这又是关乎7能不能让她学吹大笛的大问题,赶紧说,我的嘴不小,你看,你看!她把嘴尽量张圆,凑上去让崔孩儿检验。崔孩儿闻到了她嘴里哈出8的少女才有的香气,看到了她灯笼一样的口腔9里那粉红的内壁,就微笑着抓自己的脖梗子10。高妮注意到了崔孩儿的笑,问,你同意收我当徒弟了?崔孩儿说,这事还得问我爹。他让高妮等等,抢了几步,追上了父亲和哥哥,把高妮的要求向父亲讲了。高妮没有站在原地等,跟着崔孩儿就追过去了。崔豁子回头把高妮上下打量了一下,说,回去请你爹来找我吧!高妮大喜过望,两眼顿时开满泪花,说,那我给您磕头吧!崔豁子制止了她,还是说,让你爹带上你来找我吧。他又补充了一句,告诉你爹,去见我不用带礼物了。高妮一路小跑回去了。崔豁子却对他的两个儿子说,她爹不会同意。

  崔孩儿问,要是她爹同意呢?

  崔豁子颇有意味地11对小儿子笑了笑,说,那就看你小子愿意不愿意教她了。

  崔孩儿脸上红了一下。

  跟崔豁子估计得一样,高妮家的人不同意高妮去学吹大笛。高妮的父亲外出做工去了,不在家。母亲听了她的想法,直着眼看了她好半天,断定女儿是中魔了12。母亲捉过她的手,用做衣服的大针,在她大拇指的指尖上扎了一下,挤出一粒血珠,说好了,睡觉去吧,睡一觉就好了。高妮不去睡觉,告诉母亲,崔师傅都同意收她为徒了。驱魔12没收到应有的实效,母亲不会相信中魔人的一派胡言,她进一步把吹大笛和死划了等号13,说,我看你是作死啊!高妮听母亲说到了死,她说是的,哪儿死了人就到哪儿去吹。高妮第一次找到了自以为正确的人生方向,她的心情相当愉快,脸上挂满了轻松活泼的笑容。高家的小姑娘笑起来可真灿烂,可真干净!可这些都被母亲看成是高妮着魔的表现,看来可怕的魔已钻进高妮身体里去了,钻得还不浅。母亲说,我可就你这么一个闺女啊!母亲说着眼泪就流下来了。母亲流泪是有用意的14,她试试能不能用这种方法把女儿感化过来。无论怎么说,母亲流泪还是值得重视的15,高妮反过来做母亲的工作,说等她学成了,就回来给母亲开一个专场,母亲想听什么,她就吹什么。母亲登时大怒16,使出了最后的杀手锏17:你敢去学吹大笛,我马上把你的腿棒骨打断!

  母亲一方面对高妮采取了控制措施18,不让高妮走出院门;另一方面紧急给高妮的父亲捎信19,让真正的家长回来处理这件棘手的事情20。母亲的控制措施就是让高妮干活儿,用活儿占领21高妮的手脚。她让高妮接着编玉米辫子,编完玉米辫子准备让她穿辣椒串子22,穿完辣椒串子再教她学绣花,反正以打消高妮学吹大笛的念头为原则。

高妮提出不愿意编玉米辫子,愿意穿辣椒串子。母亲作出让步,同意她先穿辣椒串子,辣椒有满满一竹筐,够高妮穿半天的。辣椒是通红的,辣椒的把儿还是绿的,看上去很是美丽。高妮捏起一个辣椒欣赏了一下,穿在线绳上了。辣椒穿在一起像一挂鞭炮23鞭炮穿到半截儿24,她的手哆嗦了一下,把头直起来了。她听见起风了,风呼呼的,一路吹荡过来25。在劲风的吹荡下,麦苗拔着节子往上长,很快就变成了葱绿的海洋。风再吹,麦子抽出穗来,开始扬花26。乳白色的花粉挂在麦芒上27,老是颤颤悠悠的27,让人怜惜。当风变成热风时,麦子就成熟了。登上河堤放眼望去,麦浪连天波涌,真是满地麦子满地金啊!母亲问她不好好干活儿愣着干什么28?她回过神来才听清不是起风,空气中隐隐传来的是大笛的声响。她看了一下母亲,相信母亲没有听到,母亲似乎没长听大笛的耳朵。据高妮判断,大笛声像是从北边的庄子传过来的,离他们的庄子不过四五里。从远处听大笛,大笛的声响不是很连贯29,有点断断续续,梦幻一般。它走过河水,走过大路,走过原野,走过树林,是从高空的云端下来的。撩开云幕30下来的音乐就不是人歌,而是天歌,或者说是仙乐。这样梦幻般的仙乐听来别有一番韵味,更能牵动31人的思绪,让人想到哪里就到哪里,想看什么就有什么。高妮这会儿又看到了一大片荞麦地32,荞麦花开得正盛,满地里都是白的。她想这些花朵也许是蝴蝶吧。这样想着,荞麦花果然变成了蝴蝶。亿万只白色的蝴蝶翩翩起舞33,煞是壮观34。高妮怎么也坐不住了,她借口去趟茅房,攀上茅房里的一棵桐树35,登上茅房的墙头,轻轻一跳,就摆脱了母亲的监控。

 

Vocabulaire 3 :

 

01 褡裢  dālián  long sac de toile cousu aux deux extrémités

mais avec une ouverture au milieu que les voyageurs

portaient autrefois (ou qui se porte encore dans certaines

régions) soit sur les épaules soit à la taille.

(褡裢是古代行路人搭在肩上或挂在腰间中间开口,两边缝合
的包袱)
02 拐上 guǎishàng  tourner dans, prendre (un chemin 
différent)
03 不由自主 bùyóuzìzhǔ  ne pouvoir s’empêcher de
04 情缘 qíngyuán  amour prédestiné  了结 liǎojié  mettre 
un terme à 
05 yē  = qiāng  avaler de travers, s’étrangler  
06 当成 dàngchéng  considérer comme   
一场考试 yīchǎng kǎoshì  un examen (une session)
07 关乎 guānhū  se faire du souci pour, être préoccupé par…
08 哈出 hāchū   exhâler   
09 口腔 kǒuqiāng  cavité buccale 
10 脖梗 bógěng  nuque
11 颇有意味地 pōyǒu yìwèide  d’un air entendu
 

褡裢  dālián  long sac de toile cousu aux deux extrémités

12 断定 duàndìng  juger  中魔 zhòngmó  ensorceler // 驱魔qūmó  exorciser
13 划等号 huàděnghào  assimiler à, mettre dans un même sac
14 用意的   yòngyìde  intentionnel
15 重视 zhòngshì  accorder de l’importance à 
16 登时 dēngshí  immédiatement, sur le champ
17 杀手锏 shāshǒujiǎn  botte secrète, dernier atout  (jiǎn  massue) 
18 控制措施 kòngzhì cuòshī  mesures de contrôle  
19 捎信 shāoxìn  envoyer un message
20 棘手 jíshǒu  épineux, difficile
21 占领 zhànlǐng  occuper, se rendre maître de
22 穿辣椒串子chuān làjiāo chuànzì  enfiler des piments sur des brochettes
23 一挂鞭炮 yíguà biānpào  un lot de pétards 
24 半截儿 bànjié’er  à moitié
25 吹荡chuīdàng sur le modèle de   动荡  dòngdàng  être instable

26 扬花 yánghuā  être en pleine floraison (céréales)  suì  épi

27 麦芒 màimáng  barbe des épis de blé   颤悠 chànyou  trembler, frémir

28 愣干 lènggàn  travailler sans s’appliquer,

faire son travail n’importe comment

29 不连贯bù liánguàn  pas continu

30 撩开云幕 liāokāi yúnmù  ouvrir (en en

soulevant les bords) le rideau de nuages

31 牵动 qiāndòng  affecter, agir sur

32 荞麦 qiáomài  sarrasin, blé noir

33 翩翩 piānpiān  léger, élégant

34 壮观 zhuàngguān  magnifique  

shà  extrêmement

35 pān  grimper 

桐树 tóngshù  sterculier à feuilles de platane

 

 

桐树 tóngshù  sterculier à feuilles de platane

 

Résumé de la 3ème partie :

 

[Fascinée, Gaoni n’a plus qu’un désir : apprendre à jouer du suona. Mais le vieux musicien veut d’abord qu’elle aille demander l’autorisation de son père. C’est sa mère qui la reçoit : elle n’est évidemment pas d’accord, et donne du travail à sa fille en la surveillant pour qu’elle ne reparte pas. Celle-ci, attirée par le son du suona qui vient d’un village proche, s’échappe cependant en grimpant dans un arbre au-dessus du mur des latrines.]

 

IV

 

  [高妮来到北面的庄子,果然看见是崔家的响器班子在那里吹奏。崔家名义上是在镇上开理发店,拾掇1活人的头发,可周围庄子里老是有死人,他们家就老是有生意做,老是有的吹。也许在他们看来,打发死人比伺候2活人更重要。高妮把崔豁子喊成爷爷,说爷爷我来了。崔豁子的嘴正接在笙管上3,腾不出4嘴跟她说话。好在吹笙者的脑袋总是一点一点的,高妮理解为爷爷对她的到来点头了。正吹大笛的崔孩儿,两边的腮帮子鼓得像分别塞了鸡蛋,也没法跟她说话。当她目不转睛地向崔孩儿报到时,崔孩儿也用眼睛跟她交流。崔孩儿的眼睛光闪闪的,很亮。这表明崔孩儿的话也说得很亮,让高妮感到欣喜。响器暂歇时,崔豁子问高妮,你爹怎么没来?高妮撒了谎5,说她爹在外地打工,还没回来。她母亲不敢见人,就让她自己来了。崔豁子问,你没说谎吧?高妮摇头。崔豁子还有问题,要是你爹用绳子把你绑回去,你还来不来?高妮说,来。]崔豁子说那好,你先学敲梆子吧6。崔豁子弯腰从搭在长条板凳上的褡裢里取出一副梆子7。梆子是两件套,一圆一扁7,一瘦一胖。梆子乍一看7是黑色的,再看黑里却透着红,闪耀8着厚实的暗光。高妮没料到梆子会如此光滑,她刚把梆子接到手里,出溜一下子,那只椭圆9微扁的梆子就从手里滑脱了,比一条鱼儿窜得还快9。高妮赶紧把梆子拣起来,抱歉似的对爷爷笑了一下。爷爷说,我看你是喜阳不喜阴10。这句话高妮没有听懂。

  两个儿子都明白老爷子的心思。三月里,邻镇逢庙会,他们的响器班子应邀去和另一支响器班子比赛。比赛难解难分之际,对方突然使出一件秘密武器,让一个女子担纲11吹起大笛来了。女大笛手一上阵,他们这边的听众很快被吸引过去了。尽管女子吹得不是很好,中间出了不少漏洞12;尽管他们爷儿三个使出了浑身解数13,但原本属于他们的听众还是没有回头,一边倒14的形势到底未能扭转。那场比赛对老爷子是一个打击,也是一个刺激,他说,现在的人爱听母鸡打鸣,谁也没办法。看来老爷子也要培养一名女将了15

  [高妮不知道梆子怎么敲。爷爷让高妮看他的脚,手跟着他的脚走,他的脚板子16往地上轻合一下,高妮手中的梆子就敲一下。高妮敲响梆子的第一声几乎把自己吓了一跳,梆子声这般脆朗清俊17,哪像是木头发出的,简直是金玉之音18。这么好的梆子不是好敲的,敲响容易,敲到点子上难。爷爷让她看着爷爷的脚敲,她倒是看了爷爷的脚,可她不是敲晚了就是敲早了,敲晚了如同敲在了爷爷脚下的空地上,敲早了呢,就如同敲在爷爷的脚踝骨上18。爷爷皱起了眉头,样子像是有些痛。她想可能是自己敲慢了,敲得不够勤快,于是加快了速度。这下更不得了..。爷爷脚板合地的力量加重了,跟用脚跺地19差不多。爷爷还瞪了她一眼,这一眼瞪得好厉害哟,高妮头上出汗了。

  高妮的父亲是在镇上崔家的理发店找到高妮的,其时高妮正对着整面墙一样宽的镜子在梳理头发。父亲对她做得和颜悦色20,没有露出任何恼怒的迹象21。父亲说给她买了一身衣服,让她回家穿上试试。走到街上,父亲给她买了一串冰糖葫芦22,还把人家找回的零钱给了高妮。高妮长这么大了,父亲还从没给过她这么高的待遇23,她差不多有些感动了。回到家,父亲把自己的做法总结了一下24,对女儿说,你想穿什么,爹给你买;你想吃什么,爹给你买;你想花钱,爹给你;不管你想要什么,爹都尽量想法达到你的要求,只是千万别再去学吹大笛了,吹大笛不是女孩子家干的事。高妮没有说话。父亲用现实的观点对高妮晓以利害25,说现在外面的男人都不好,高妮到了男人堆里,也会变得不好,那样的话,以后嫁人就难了,就嫁不出去了。

  高妮说,嫁不出去就不嫁。

  父亲让她再说一遍,她果真又说了一遍。那么父亲只好拿她的皮肉说事。父亲下手很重,把她打哭了。她听见了自己的哭声,哇哇的,通畅而嘹亮26,像是从肺腑里27发出来的,底气相当足,跟大笛的声音也差不多吧。父亲不许她哭,命她憋住,憋住28!这就是父亲的权力,把她打疼,又不许她哭喊。从她很小起,父亲就对她行使这种权力。过去父亲让她憋住她就憋住,憋得眼珠子都疼了,这一次她不打算听父亲的话了。特别是当她听见自己的嗓门潜力29这么大,声音器官这么好,几乎可以和翻卷着30金属嘴唇的大笛相提并论31,心中一阵狂喜,决定这次放开算了。于是她往大里调整了一下口型,哭得更充分些。好比哭丧的来了,大笛要掀起一个高潮32,她配合父亲的猛揍33,也试着给自己的哭喊掀起一个小小的高潮。父亲像是忽略了她的人体本身同时又是一个发声体,对她突然爆发出的洪大哭声显得有些出乎意料34,还有那么一点惊慌。父亲的办法是拿过一块毛巾,塞进她嘴里去了。说来高妮的警惕性35还是不够高,见父亲抓起一块毛巾,她还以为父亲动了恻隐之心36,要为女儿擦一擦眼泪。毛巾的运行方向大致上37是对的,只是具体落实时37,没落实在眼睛上,而是落实在她洞开着的嘴巴里去了。这一下事情变得比较糟糕,毛巾吐不出来,咽不下去,她哭喊不成了。

鼓着腮帮子38貌似吹大笛的高妮,只能在脑子的记忆里重温38大笛的音响。大笛响起来了,满地的高粱霎时39红遍,它与天边的红霞相衔接40,谁也分不清哪是高粱,哪是红霞,哪是天上,哪是人间。然而好景不长41,地上刮起了狂风,天上下起了暴雨。那风是呼啸着42过来的,显示出无比强大的吹奏力。地上的一切,不管是有孔的和无孔的,疾风都能使它们发出声响。屋顶的茅草被卷向空中,发出像是雨燕43的叫声。枯枝打着尖厉的口哨44。石磙45发出的声音闷声闷气。土地的声响跌宕起伏45,把历代刀兵46水火的灾变性声响都包括进去了。大风把成熟的高粱一遍又一遍压下去,倔强的高粱梗着脖子47,一次又一次弹起来48。高粱对陡起的大风始终持欢迎态度,高粱叶子不断哗哗地鼓掌。红头涨脸的高粱穗子是把酒临风49的诗人风度,一再欢呼:好啊!好啊!暴雨显示的是快速打击的力量,谁敲梆子也比不上暴雨敲得快,再密集50的鼓点也不及雨点密集度的千万分之一。这还不算51,暴雨的声响带有上苍的意志52,惟我独尊53,是覆盖性的,它一下来,地上的万物只得附和它54。暴雨下了几天几夜,红薯55被淹没了,谷子55被淹没了,地里白水浸浸56,成了一片汪洋56。这时候,高粱仍有上佳表现57,举出水面的高粱如熊熊燃烧的火炬58,暴雨不但浇不灭它,经过暴雨的洗礼,大片的高粱简直成了火的海洋。可是,人们吃不住劲了,纷纷扎起木筏子59,一边饮泣59,一边从水里捞谷子,捞豆子……高妮脑子里的大笛响到这里,眼泪又禁不住滚落下来。]

 

Vocabulaire 4 :

 

01 拾掇 shíduo  ranger, mettre en ordre

02 伺候 cìhou  être au service de

03 shēng  sheng, orgue à bouche

04 腾出 téngchū  libérer

05 撒谎 sāhuǎng  mentir

06 敲梆子qiāo bāngzi  jouer des claquettes

07 一副 yífù  une paire de   biǎn  plat

08 乍一看 zhàyíkàn  à première vue   闪耀 shǎnyào  briller

09 椭圆 tuǒyuán  ovale   cuàn  filer à toute vitesse

10 喜阳 xǐyáng  héliophile // 喜阴 xǐyīn qui aime l’ombre, sciaphile

11 担纲 dāngāng  assumer le rôle principal

12 漏洞 lòudòng  fuite / faille, défaut

13 浑身解数 húnshēnxièshù  faire de son mieux, au mieux de ses capacités

14 一边倒 yìbiāndǎo  prédominer

15 女将 nǚjiàng  femme générale / experte   (référence à un thème classique d’opéra)

16 脚板子 jiǎobǎnzi  plante du pied

17 脆朗清俊cuìlǎng qīngjùn  clair/net, sonore et élégant

18 金玉 jīnyù  jade et or / précieux

19 跺地 duòdì  frapper du pied, trépigner

 

shēng  sheng, orgue à bouche

20 和颜悦色 héyányuèsè  se montrer gentil, aimable et souriant

21 迹象 jìxiàng  signe, trace, indication

22 冰糖葫芦bīngtánghúlu  gourmandise : morceau de fruit enrobé de sucre candi et enfoncé sur un bâton

23 待遇 dàiyù  traitement

24 总结 zǒngjié résumer

25 晓以利害 xiǎoyǐlìhài  faire peser les perspectives de gains et de pertes : mettre en garde

26 通畅 tōngchàng sans obstruction, libre 嘹亮 liáoliàng  clair, sonore

27 肺腑 fèifǔ  cœur

28 憋住 biēzhù  arrêter, retenir (ses larmes…)

29 潜力 qiánlì  potentiel

30 翻卷 fānjuǎn  rouler, dessiner des volutes

 

 

les claquettes

31 相提并论 xiāngtíbìnglùn  être/mettre sur le même plan, être assimilable à

32 掀起 xiānqǐ  soulever, déclencher 

33 猛揍 měngzòu  frapper violemment

34 出乎意料 chūhūyìliào  qui dépasse les espoirs, totalement inattendu

35 警惕 jǐngtì  être sur ses gardes, surveiller

36 恻隐之心 cèyǐnzhīxīn  compassion 

37 大致上 dàzhìshàng  pour l’essentiel  落实luòshí  accomplir, réaliser

38 腮帮子 sāibāngzi  (fam.) joue   重温chóngwēn  passser en revue, revoir

39 霎时 shàshí  en un bref instant 

40 衔接 xiánjiē  joindre, être cohérent avec

41 好景不长 hǎojǐngbùcháng  les beaux jours ne durent pas

42 呼啸 hūxiào  siffler

43 雨燕 yǔyàn  martinet

44 尖厉 jiānlì  perçant, strident  口哨kǒushào  sifflet

45 石磙 shígǔn  mortier  跌宕diēdàng  tourner, se tordre dans tous les sens

46 刀兵dāobīng  armes,  conflit armé  灾变 zāibiàn catastrophe

47 倔强 juéjiàng  entêté  梗脖子gěng bózi redresser/raidir le cou

48 弹起来 tánqǐlái  se redresser comme un ressort

49 把酒临风 bǎjiǔ línfēng  lever son verre contre le vent : geste du poète (诗人风度), expression consacrée dans les poésies anciennes.

50 密集 mìjí  dense, concentré

51 还不算 háibúsuàn  ce n’est pas tout 

52上苍的意志 shàngcāngde  yìzhì  volonté divine

53 惟我独尊 wéiwǒdúzūn  être bouffi d’orgueil, présomptueux

54 附和 fùhè  faire écho

55 红薯 hóngshǔ  patate douce  谷子gǔzi millet

56 浸浸 jìnjìn  détrempé  汪洋 wāngyáng  immense étendue d’eau

57 上佳表现 shàngjiā biǎoxiàn  se montrer au mieux de sa forme

58 熊熊燃烧 xióngxióngránshāo  brûler ardemment  火炬 huǒjù  torche

59 木筏 mùfá  radeau de bois  饮泣yǐnqì  pleurer en silence, étouffer ses larmes

 

Synthèse et traduction partielle de la 4ème partie :

 

[Les musiciens sont en train de jouer dans un autre village. Lorsque Gaoni y arrive, elle demande à Cui Huozi de la prendre comme élève, sur quoi le vieux musicien lui demande pourquoi son père n’est pas venu le voir. Gaoni lui ment, disant que son père est allé travailler à l’extérieur et n’est pas encore revenu, et que sa mère n’ose pas venir le voir.]

 

Très bien, dit Cui Huozi, tu vas commencer par apprendre à jouer des claquettes. Il se baissa pour prendre une paire de claquettes dans le sac qui était posé sur un banc.  Il y avait deux pièces de bois, une ronde et une plus plate, une épaisse et une plus mince. A première vue, elles étaient noires, mais, en regardant mieux, on pouvait distinguer dans le noir une nuance de rouge qui brillait d’un éclat caché. Gaoni ne s’était pas attendue à ce que les claquettes fussent aussi lisses, et que, à peine attrapées, elles lui glissent des mains ; en fait, seule la pièce ovale et plutôt plate lui échappa, comme un poisson qui vous file entre les doigts. Elle la ramassa très vite, en souriant au vieux musicien comme pour s’excuser. Il lui dit, tu vois, tu aimes le soleil plutôt que l’ombre. Gaoni ne comprit pas ce que cela signifiait. Ses deux fils, eux, le comprirent.

 

Au mois de mars précédent, il y avait eu une foire dans un temple d’un village voisin, et ils avaient été invités à une compétition avec un autre ensemble. Le concours traînait en longueur sans qu’il fût possible de les départager, alors les autres musiciens avaient sorti une arme secrète : ils avaient fait jouer l’instrument principal,  le suona, par une fille. Très vite, l’assistance n’avait plus regardé qu’elle. Bien qu’elle ne jouât pas très bien, et fît pas mal de fautes, et bien qu’eux-mêmes, père et fils, fissent de leur mieux, plus personne ne les regardait, la situation avait tourné à leur désavantage. Cette compétition avait été un coup dur pour le vieux Cui, mais l’avait en même temps stimulé ; il avait dit que ce que les gens voulaient, c’était entendre les poules chanter, on ne pouvait rien y faire. Il semblait donc que le vieux Cui avait décidé de former une femme générale.

 

[Suit une première leçon de claquettes, racontée avec humour. Puis arrive le père de Gaoni qui vient la chercher tout en douceur : il lui a acheté des vêtements, lui paie des friandises… mais finit par se fâcher devant l’obstination de sa fille : il lui interdit de ressortir, et même de pleurer. Bâillonnée, Gaoni a l’impression d’entendre le son du suona dans le lointain, porté par le vent…  Le dernier paragraphe est une évocation poétique et quasi onirique du vent et de la pluie dans les champs de sorgho, le vent assimilé au son du suona comme force élémentaire créatrice présidant à la croissance végétale]

 

V

 

  [等到高妮脑子里的大笛响到下一个乐章1,漫天的大雪就下来了。大雪虽然也是水变成的,但它是固体,而不是液体,它落在哪里,就在哪里积累下来了。坟成倍地2扩大着。草垛3上面像是又增加了一个草垛。树枝上的雪越积越厚,白色鸟般栖满4一树。枝条越压越低,终于承受不住,白色鸟乱纷纷落地。树枝刚恢复5到原来的位置,后来的白色鸟又争先恐后地6落在上面。地里的清水井被称为大地的眼睛,雪在井沿边神工般地7往中间砌着7,井口越收越小,后来终于连大地的眼睛也给遮盖住了8。不用看了,天地间满满当当,都被大雪充塞了9,整个世界都是白的。你想看什么也看不到了,世界上仿佛什么都没有了,一种被称为白色或者无色的颜色轻轻一涂,整个世界就变成了空白。可大雪还在下着。谁要以为落雪无声那就错了,它是无声胜有声,在人们心上隆隆轰鸣10。在轰鸣声中,人们退回来,垂下头,真的无话可说了,只有流泪的份儿了。高妮的眼泪流得可真痛快,她的双眼就那么张着,眼泪无遮无拦11,汹涌而下11

  母亲把她嘴里的毛巾掏出来时,是让她吃饭。她咬紧牙关12,当然不会吃。母亲解开捆她的绳子,她还是不吃。她不光不吃饭,连话也不说了。

  父亲请来了一位亲戚,帮着做高妮的说服工作。这位亲戚是一位慈善13的老太太,老太太的三个儿子都进入了上流社会14,她因此被当地尊为教子有方的人15。老太太用历史的观点,说吹大笛属于下九流里面的一个行业16,一个人如果选择了吹大笛,一辈子就被人看不起了,死了也不能埋进老坟里。老太太说得苦口婆心17,高妮仍坚持绝食,拒绝说话。后来老太太说了一句话,这句话让高妮感恩戴德18。老太太对高妮的父亲说,人各有志,算了,给孩子一条活路吧!

  高妮实现了自己的诺言19,父亲打了她,绑了她,都没能改变她学吹大笛的决心。她也有不明白的地方,崔爷爷怎么就料到20父亲要绑她呢?看来人一老就跟神仙差不多了。崔爷爷说,行,我看你这孩子能学出来。他指定崔孩儿当高妮的师傅。]

  崔孩儿一开始并没有教高妮学吹大笛,高妮刚把大笛摸住,他就不让高妮动。高妮说,师傅,你教我吧。师傅说,你过来。高妮走到他跟前,他却努起自己的嘴21去找高妮的嘴。高妮对师傅这样做不大适应,还是说,你教我学吹大笛吧。师傅说,你不要犯傻,我这不是正在教你嘛!他拿起大笛,让高妮数数大笛上有几个孔。高妮数了,师傅说,你再数数你自己身上有几个孔。高妮仰着脸在心里数了一下,不错,她身上的孔和大笛身上的孔一样多。既然如此,她愿意听凭22小师傅从她嘴上教起。崔孩儿小师傅不愧23是一个吹家,他一会儿就把高妮身上的孔全吹遍了。当吹到关键的孔时,高妮就响起来了。] 之后,高妮趁机向师傅提了一个问题,爷爷为什么说她喜阳不喜阴。师傅解答道,那对梆子,圆的为阳,椭圆的为阴。你把圆的抓在手里,椭圆的掉在地上,不是喜阳不喜阴是什么。师傅还说,你喜欢我就是喜欢阳。高妮没有否认。

  [没人会关心高妮为练习吹大笛吃了多少苦,受了多少罪24。一个人来到世上,要干成一件事,吃苦受罪是不言而喻的25。两三年后,高妮吹出来了,成气候了26,大笛仿佛成了她身体上的一部分,与她有了共同的呼吸和命运。人们对她的传说有些神化,说大笛被她驯服了,很害怕她,她捏起笛管刚要往嘴边送,大笛自己就响起来了。还说她的大笛能呼风唤雨27,要雷有雷,要闪有闪;能让阳光铺满地,能让星星布满天。反正只要一听说高妮在哪里吹大笛,人们像赶庙会一样,蜂拥着28就去了。]

  消息传到外省,有人给正吹大笛的高妮拍了一张照片,登在京城一家大开本的画报上了。照片是彩色的,连同听众占了画报整整一面。有点可惜的是,高妮在画报上没能露脸儿,她的上身下身胳膊腿儿连脚都露出来了,脸却被正面而来的大笛的喇叭口完全遮住了。照片的题目也没提高妮的名字,只有两个字——响器。

 

Vocabulaire 5 :

 

01 乐章 yuèzhāng  mouvement (musique)

02 成倍地 chéngbèide  (croître) par multiples, de façon considérable

03 草垛 cǎoduò  meule de foin

04  qī  être perché

05 恢复 huīfù  reprendre, récupérer

06 争先恐后  zhēngxiānkǒnghòu  lutter pour ne pas rester en arrière et être en tête

07 神工shéngōng  maître, créateur divin    bâtir

08 遮盖住 zhēgàizhù  recouvrir complètement (neige) 

09 充塞 chōngsè  être rempli à ras bord

10 隆隆轰鸣 lónglóng hōngmíng  gronder (tonnerre), faire un bruit assourdissant

11 遮拦 zhēlán  obstruer, bloquer  汹涌 xiōngyǒng  déferler / impétueux

12 咬紧牙关 yáojǐnyáguān  rester les lèvres serrées, obstinément

13 慈善 císhàn  bon, charitable

14 上流社会  shàngliúshèhuì  classes sociales supérieures

15 有方 yǒufāng  très compétent

16 下九流行业  xiàjiǔliú hángyè les professions inférieures, incluant barbier, acteurs, porteurs et.. joueurs de flûte. En revanche les joueurs de qin étaient classés dans les rangs moyens, car le qin faisait partie des quatre activités d’excellence du lettré, avec les échecs, la calligraphie et la peinture (琴棋书画).

A l’origine, il y avait neuf classes supérieures (nobles), neuf moyennes et neuf inférieures qui regroupaient le rebut de la société : 

下九流是:师爷shīyé、衙差 yáchāi (employés du yamen)、秤手 chèngshǒu (ceux chargés de la pesée)、媒婆 méipó (entremetteuse)、走卒 zǒuzú (prêteur sur gage)、时妖(shíyāo :  拐骗guǎipiàn及巫婆wūpó escrocs et sorcières)、盗 dào、窃 qiè (voleurs)、娼 chāng (prostituées)

17 苦口婆心 kǔkǒupóxīn  faire de son mieux pour convaincre

18 感恩戴德 gǎn'ēndàidé  être plein de gratitude

19 实现诺言 shíxiàn nuòyán  remplir une promesse

20 料到 liàodào  prévoir, s’attendre à

21 努起嘴 nǔqǐ zuǐ  gonfler, avancer les lèvres

22 听凭 tīngpíng  laisser

23 不愧 búkuì  ne pas être digne de

24 吃苦受罪chīkǔ shòuzuì  passer par mille épreuves, manger de la vache enragée

25 不言而喻bùyán'éryù  c’est évident, cela va sans dire

26 成气候 chéngqìhòu aboutir, réussir

27 呼风唤雨 hūfēnghuànyǔ  commander au vent et à la pluie, aux éléments

28 蜂拥 fēngyōng  affluer, comme un essaim

 

Synthèse et traduction partielle de la 5ème partie :

 

[Tableau poétique du village sous la neige qui s’est mise à tomber et prolonge le précédent tableau du sorgho sous la pluie. La mère enlève son bâillon à Gaoni pour qu’elle puisse manger, mais elle refuse. Elle invite alors une cousine pour tenter de raisonner la fillette, mais en vain ; la vieille cousine conseille finalement de la laisser choisir sa voie… Le vieux Cui désigne alors son fils comme le maître de suona chargé de former Gaoni : 他指定崔孩儿当高妮的师傅。La première leçon est contée avec le même humour que celui avec lequel était précédemment contée la leçon de claquettes. Gaoni, cependant, a une question à résoudre… ]

 

Par la suite, Gaoni profita d’une occasion pour poser sa question à son maître : pourquoi ton père

m’a-t-il dit que j’aimais le soleil plutôt que l’ombre ? Son maître lui répondit que, dans les claquettes,

l’élément rond était du signe du soleil, l’élément ovale du signe de la lune. Elle avait laissé tomber le morceau ovale, donc elle aimait le soleil et pas l’ombre. D’ailleurs si tu m’aimes, ajouta son maître, c’est que tu aimes le soleil. Gaoni ne dit rien.

 

[Gaoni apprit à jouer à la dure, et commença à jouer en public au bout de deux ou trois ans. Il se forma une sorte de légende autour d’elle : on disait que l’instrument lui obéissait, qu’elle avait le don de faire lever le vent et tomber la pluie, qu’elle commandait aux éléments. Partout où elle allait, elle attirait les foules.]

 

La nouvelle se répandit hors de la province ; quelqu’un prit une photo de Gaoni jouant du suona, et elle passa dans un magazine illustré de la capitale. C’était une photo en couleur où l’auditoire tenait toute la place. Ce qui était un peu dommage, c’est qu’on ne voyait pas le visage de Gaoni, sur cette photo, on voyait tout son corps, ses bras et ses jambes, mais pas son visage qui était totalement caché par le pavillon. Le titre de la photo ne mentionnait même pas le nom de Gaoni, il n’y avait que trois mots pour toute indication – ensemble à vents.

 

 

 

 


 

 

 

 

     

 

 

 

© chinese-shortstories.com. Tous droits réservés.