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				Ye Fu
				
				野夫 
				Présentation 
				par Brigitte 
				Duzan, 27 novembre 2012, actualisé 11 octobre 2025   
						
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						Ye Fu |  |    
				Ye Fu est l’une 
				de ces voix originales et singulières en Chine, aujourd’hui, qui 
				réussissent à se faire entendre grâce à internet, et aux 
				publications à Taiwan et Hong Kong, dans son cas après avoir été 
				réduit au silence par une condamnation à cinq ans de prison au 
				début des années 1990. 
				  
				Ses écrits sont 
				d’autant plus intéressants qu’il est porteur d’une mémoire 
				familiale tragique, qui reflète un pan de l’histoire chinoise 
				moderne dont on parle très peu. 
				  
				Carrière 
				littéraire brisée net en 1990 
				  
				De son vrai nom 
				Zheng Shiping (郑世平), 
				Ye Fu (野夫) 
				est né en 1962 dans un petit village proche de Lichuan (利川市), 
				dans la 
				préfecture autonome tujia et miao d'Enshi 
				(恩施土家族苗族自治州), 
				dans le sud-ouest montagneux du Hubei.  
				  
				Poète dans 
				l’euphorie de la fin des années 1980 
				  
				Il a une 
				enfance pauvre et difficile. Après la Révolution culturelle, à 
				la réouverture des universités en 1978, il entre à l’Institut 
				des nationalités du Hubei (湖北民族学院)
				pour étudier la littérature 
				chinoise ; il a seize ans et commence à écrire des poésies. Il 
				est cependant fermement déterminé à poursuivre ses études 
				littéraires à l’université de Wuhan, la capitale de la province. 
				
				  
				Quatre ans plus 
				tard, en 1982, il fonde la première société de poésie de l’est 
				du Hubei, dont le nom est inspiré d’un vers du Shijing, 
				se replaçant ainsi dans la plus ancienne tradition poétique 
				chinoise, une tradition populaire 
				
				
				. 
				Par deux fois, il organise à Lichuan une grande réunion 
				poétique, au niveau provincial. C’est dans ce contexte qu’il 
				commence à utiliser le nom de plume de Ye Fu. 
				
				  
				En 1985, il 
				devient directeur général de la Société d’études poétiques des 
				jeunes du Hubei (湖北省青年诗歌学会).Mais, 
				en 1986, il réalise son rêve : il entre en cours d’année à 
				l’université de Wuhan et peut enfin continuer ses études de 
				littérature chinoise.  
				  
				Il est ainsi 
				décrit par l’écrivaine Zhang 
				Yihe (章诒和), 
				l’une des premières à le découvrir et le faire connaître :
				 
				               
				
				“他在鄂西土生土长,视武汉大学为教育圣地” 
				C’est un 
				enfant de l’ouest du Hubei où il est né et a grandi, mais 
				l’université de Wuhan a été pour lui la Terre sainte de 
				l’éducation. 
				  
				Il crée à Wuhan 
				le « salon poétique post-moderne » (“后现代诗人沙龙”) 
				de la province du Hubei et publie son premier recueil de 
				poésie : « Les pleurs du loup dans la nuit » (《狼之夜哭》). 
				Il est l’ami et le disciple de Yi Zhongtian (易中天), 
				personnalité du monde universitaire de Wuhan 
				
				
				. 
				  
						
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						Recueil de poèmes, Les pleurs du loup la 
						nuit 
							 
						(titre calligraphié de la main de l’auteur) |  |    
						
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						Yi Zhongtian |  |    
				Emblème 
				d’une génération et d’une époque 
				  
				Ye Fu termine 
				ses études en 1988. Il est alors envoyé à Haikou, dans l’île de 
				Hainan (海南省海口市), 
				pour travailler au bureau local de la sécurité publique. Mais 
				brusquement, en 1990, pour avoir sympathisé avec « un certain 
				mouvement » (“因同情某运动”), 
				il démissionne de son poste. Il est ensuite accusé d’avoir 
				« divulgué des secrets d’Etat »,  accusation classique portée 
				contre les esprits un peu trop indépendants, et condamné à six 
				ans de prison. 
				  
				Ye Fu subit le 
				sort de tant de ses camarades étudiants et poètes qui, à la fin 
				des années 1980, ont vécu dans l’effervescence d’une liberté 
				intellectuelle qu’ils n’avaient encore jamais connue. C’était 
				une période où soudain les débats culturels et politiques 
				s’emballaient et où tous les espoirs semblaient permis. Jusqu’à 
				ce que les événements de Tian’anmen viennent y mettre une triste 
				fin. 
				  
				Certains ont 
				payé leur engagement de leur vie ; Ye Fu l’a seulement payé de 
				cinq années de détention, mais elles l’ont coupé du monde et 
				l’ont marqué à jamais. Les événements familiaux particulièrement 
				pénibles qui ont marqué sa libération ont ensuite contribué à 
				faire de lui un écrivain détenteur d’une mémoire à préserver et 
				à transmettre. 
				  
				Naissance 
				d’un écrivain indépendant 
				  
				Ye Fu bénéficie 
				d’une remise de peine : il est libéré en 1995. Mais le retour à 
				la vie sans barreaux n’est pas facile : son père est mort d’un 
				cancer pendant qu’il purgeait sa peine ; après sa remise en 
				liberté, sa mère se suicide en se jetant dans le fleuve ; son 
				corps ne sera jamais retrouvé.  
				  
				Premières 
				activités d’édition 
				  
				Pour vivre, Ye 
				Fu se lance alors dans l’édition. En février 1996, il crée une 
				société d’édition indépendante à Pékin ; son ami Yi Zhongtian 
				l’aide à démarrer en lui confiant deux de ses manuscrits à 
				publier : « Des Chinois » (《闲话中国人》) 
				et « Hommes et femmes de Chine » (《中国的男人和女人》).
				 
				  
				Il lui faut 
				surtout arriver à surmonter le traumatisme causé par la mort 
				tragique de ses parents, et avant tout celle de sa mère dont le 
				souvenir le hante. Il n’est pas encore capable d’en parler, cela 
				reste pour lui de l’ordre du cauchemar.  
				  
				La fin des 
				années 1980 avait été une période de fol espoir en l’avenir, 
				brutalement détruit ; la fin des années 1990 s’amorce comme une 
				période de collecte de souvenirs douloureux et une recherche sur 
				les événements y ayant conduit qui vont nourrir une série de 
				livres publiés à la fin des années 2000, d’abord sous forme de 
				textes séparés sur internet.  
				  
				Alors que se 
				multiplient les ouvrages sur le mouvement anti-droitiers et la 
				famine causée par le Grand Bond en avant 
				
				
				, 
				Ye Fu remonte à une période encore plus rarement traitée en 
				littérature : le début des années 1950, avec les grandes purges 
				effectuées dans le cadre de la réforme agraire, et l’éradication 
				des « bandits » locaux pour renforcer le pouvoir central. 
				Mais l’époque est évoquée à travers les déboires subis par sa 
				famille et leurs proches. 
				  
				Sources 
				familiales de ses écrits 
				  
				Ye Fu a des 
				antécédents très lourds, tout le monde faisait partie des « cinq 
				catégories noires », d’une manière ou d’une autre, autour de 
				lui : son père était d’une famille de « propriétaires terriens » 
				(“地主”), 
				son grand-père maternel était un ancien « seigneur de la 
				guerre » (“旧军阀”), 
				sa grand-mère maternelle venait d’une très bonne famille et sa 
				mère avait été déclarée « droitière » (“右派”).
				 
				  
				Le grand-père 
				maternel était parti au Japon au tout début de la République, et 
				avait fait des études de droit pendant huit ans à l’université 
				de Waseda. A son retour en Chine, vers 1920, il avait été juge 
				d’instance au Gansu. Son fils avait étudié dans une école 
				militaire, et aurait été garde du corps de Chang Kai-chek ; 
				puis, après l’invasion japonaise, il avait été posté à Wuhan 
				avec grade de sous-officier et s’était remarié. 
				 
				  
				La mère de Ye 
				Fu avait alors changé de nom. En 1948, elle avait rejoint la 
				révolution et avait participé à la réforme agraire à Enshi ainsi 
				qu’au mouvement de « liquidation des bandits » (剿匪). 
				Elle avait rencontré là par hasard le père de Ye Fu qui était le 
				fils d’un notable du coin. En 1957, ensuite, elle avait été 
				condamnée comme droitière pour être la fille d’un « seigneur de 
				la guerre ». 
				  
				La famille de 
				son père, de son côté, a énormément souffert pendant la réforme 
				agraire. Parce que le grand-père possédait un champ de dix mus, 
				il fut classé « propriétaire terrien », persécuté et finit par 
				se pendre ; son frère aîné se jeta dans le Yangzi, son corps n’a 
				jamais été retrouvé ; le frère cadet fut condamné aux travaux 
				forcés ; quant aux deux épouses, elles se sont pendues ensemble, 
				une nuit, avec la même corde, à la même poutre. 
				 
				  
				Directeur d’une 
				mine de charbon, le père de Ye Fu a été persécuté pendant la 
				Révolution culturelle. Sa mère était comptable dans une 
				coopérative, et c’est avec son maigre salaire qu’elle 
				nourrissait toute la famille … Ye Fu et ses deux sœurs ont été 
				élevés par leur grand-mère. Lui souffrait de tuberculose et 
				avait besoin d’être soigné, ses deux sœurs n’ont pu continuer 
				leurs études. Ils habitaient dans une ruelle sans électricité 
				où, la nuit, on s’éclairait à la lueur de lampes à huile, et la 
				grand-mère racontait des histoires …. 
				  
				Avec ses 
				mauvais antécédents familiaux, la vie ne fut pas facile pour le 
				jeune Ye Fu. Pendant toute la Révolution culturelle, les autres 
				enfants le poursuivaient en lui criant les pires insultes qu’ils 
				pouvaient imaginer : « Fils de propriétaire terrien… ».  Ye Fu 
				est devenu un enfant querelleur. Même quand il est entré à 
				l’Institut des nationalités, en 1978, l’habitude lui est restée 
				d’en venir aux mains facilement. Il dit avoir gardé de 
				nombreuses cicatrices sur tout le corps, témoins des coups de 
				couteau reçus.  
				  
				Le choix de son 
				nom de plume vient de là : il est tiré d’un poème célèbre du 
				poète des Tang Liu Cha (刘叉) 
				intitulé « message incident » (《偶书》)
				
				
				: 
				   
				日出扶桑一丈高, 人间万事细如毛。野夫怒见不平处, 
				磨损胸中万古刀。
 
				                
				Sorti du mûrier, le soleil est déjà haut,  
				     
				Parmi les choses humaines aussi ténues que les poils sur la 
				peau. 
				                
				Le poète regarde avec colère les injustices,  
				                
				Fourbissant dix mille sabres en son sein. 
				
				
				 
				  
				Jusqu’à la 
				veille de sa mort, son père a gardé le silence sur 
				l’extermination de sa famille. Sa mort, suivie du suicide de sa 
				mère, a été déterminante pour Ye Fu : il s’est résolu à raconter 
				leur histoire, mais il lui aura fallu longtemps pour arriver à 
				en parler. 
				  
				Une œuvre 
				qui porte témoignage 
				  
				Tous les livres 
				de Ye Fu sont constitués de textes qui ont été publiés 
				séparément sur internet et ont ainsi attiré l’attention 
				d’éditeurs, à Taiwan et Hong Kong, où ils ont ensuite été 
				publiés en les regroupant. Certains se retrouvent plusieurs fois 
				dans des livres différents.  
				  
				Ye Fu a 
				commencé par l’histoire de sa mère, puis a continué avec 
				l’histoire de la famille de son père. Il s’agit d’une 
				composition en étoile, structurant autour d’un personnage tout 
				un univers fait de ses amis et de ses proches, et des événements 
				qui l’ont marqué, et qui finit ainsi par raconter l’histoire 
				d’une époque, dans le sud-ouest du Hubei…  
				  
				
				Mai 2009 : 
				« Ma mère sur les eaux du fleuve » (《江上的母亲》) 
				  
				Il lui aura 
				fallu dix ans pour pouvoir surmonter le souvenir de ce jour 
				terrible où sa mère s’est jetée dans le fleuve, et évoquer les 
				soixante huit ans qui l’ont précédé et y ont conduit ; il 
				commence ainsi son récit :  
				  
				
				这是一篇萦怀于心而又一直不敢动笔的文章,是心中绷得太紧以至于怕轻轻一抚就砉然断裂的弦丝,却又恍若巨石在喉,耿耿于无数个不眠之夜,在黑暗中撕心裂肺,似乎只需默默一念…。
				 
				Voici un 
				récit qui m’a hanté jour et nuit, mais que je n’arrivais 
				pourtant pas à coucher par écrit ; je sentais au fond du cœur 
				une corde si tendue que j’avais peur de la rompre même en 
				l’effleurant tout doucement, j’avais comme une énorme pierre 
				dans la gorge, une pensée obsédante qui me faisait passer des 
				nuits blanches, tourmenté dans l’obscurité, mais condamné au 
				silence ……整整十年了,身寄北国的我仍不敢重回那一段冰冷的水域,不敢也不欲去想象我投江失踪的母亲,至今仍暴尸于哪一片月光下……
 
				… dix ans se 
				sont écoulés ; de ces terres du nord où je suis parti, je n’ose 
				toujours pas revenir à ces eaux glacées, n’ose ni ne désire 
				m’imaginer ma mère disparue dans le fleuve sans laisser de 
				traces, me demandant toujours sous quelle lueur lunaire reposent 
				ses restes laissés sans sépulture… 
				  
						
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						Ma mère, remontant le fleuve |  |    
				Ces quelques 
				lignes sont la meilleure introduction à l’œuvre de Ye Fu : une 
				pensée profonde et poignante, exprimée dans une langue poétique 
				et raffinée, où affleure à chaque détour de la phrase une 
				expression recherchée, souvent puisée dans la poésie ancienne.
				 
				  
				Constitué de 
				textes relativement courts, ce livre est, outre le reflet d’un 
				pan d’histoire personnelle, une réflexion sur cette histoire, et 
				les souffrances endurées par toute une génération, et même 
				plusieurs. C’est un récit cathartique et libérateur, mais où 
				l’émotion reste cependant contrôlée et l’expression concise et 
				allusive, comme dans un poème. Le premier récit, sur la 
				disparition de sa mère, constitue une sorte de leitmotif qui 
				revient ensuite dans ses livres suivants. 
				  
				Le livre se 
				poursuit par le récit complémentaire de la vie du père de Ye Fu. 
				  
				
				Septembre 2009 : 
				« Le combat de mon père » (《父亲的战争》) 
				  
				Ce livre 
				concerne plus particulièrement l’histoire de la Chine du début 
				des années 1950 : les persécutions perpétrées dans le cadre de 
				la réforme agraire, et un mouvement très peu connu et rarement 
				abordé en littérature.  
				  
						
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						Le combat de mon père |  |    
				Il s’agit de la 
				campagne dite de « liquidation des bandits et suppression des 
				rébellions » (剿匪平乱
				jiǎofěi 
				píngluàn), 
				ou encore « liquidation des 
				bandits et lutte contre les despotes » (清匪反霸
				qīngfěi 
				fǎnbà). 
				Ye Fu part d’un souvenir que lui a confié son père avant de 
				mourir, et en profite pour relativiser l’histoire telle qu’elle 
				est contée dans les manuels, de même qu’il revisite celle de la 
				réforme agraire à partir du traitement infligé à la famille de 
				son père, annihilée pour avoir possédé une dizaine de mu. 
				
				  
				
				L’existence 
				desdits « bandits » (匪)
				est  liée 
				au chaos qui régnait dans l’empire, puis au début du vingtième 
				siècle en Chine, le gouvernement central ne parvenant pas à 
				contrôler la totalité du pays, les différentes régions étant 
				sous la coupe d’un potentat local. La déliquescence du pouvoir 
				central s’est accélérée pendant les années de guerre, avec la 
				multiplication des « seigneurs 
				de la guerre » 
				(军阀), 
				mais elle existait bien avant : on disait « là où il y a un 
				fonctionnaire il y a un bandit » (有官就有匪). 
				  
				Quand les 
				communistes sont arrivés au pouvoir, ils ont voulu éradiquer ces 
				pouvoirs locaux pour renforcer le pouvoir central, et ils ont 
				lancé cette campagne contre les « bandits » locaux. Cependant, 
				de même que les « propriétaires terriens » n’étaient souvent que 
				de pauvres bougres qui possédaient quelques arpents de terre, 
				les « bandits » n’étaient souvent guère plus répréhensibles. 
				Mais ils furent soumis à une campagne tout aussi systématique. 
				  
				Le combat fut 
				en outre mené par la population elle même, comme pour la réforme 
				agraire. Le récit de Ye Fu est révélateur des traumatismes 
				engendrés, d’autant plus pernicieux qu’ils restaient 
				nécessairement du domaine du non-dit, comme le reste. 
				  
				Son père avait 
				gardé toute sa vie ce poids sur la conscience : il avait remis 
				un « bandit » aux nouvelles autorités, et l’homme avait été 
				illico sommairement exécuté. Ye Fu élargit le propos en une 
				réflexion humaniste relativisant les idées reçues, et les 
				définitions, et brouillant les différences entre héros et 
				aventuriers, militaires et voleurs de grand chemin, entre amour 
				et haine, gouvernement et morale, justice et barbarie, et 
				finalement, bien et mal. 
				  
				Toute l’œuvre 
				ultérieure de Ye Fu est une réflexion complémentaire sur les 
				mêmes thèmes. Il lui fallait libérer d’abord la parole, mais, ce 
				premier pas effectué, ce sont dix, voire quinze ans de silence 
				qui affleurent ensuite sous sa plume. 
				  
				Dans deux 
				ouvrages plus récents, Ye Fu est revenu sur ses 
				deux principaux axes de réflexion : d’une part son pays, et la 
				recherche d’identité et de racines qui lui est liée, et d’autre 
				part la vaste notion de jianghu, qui sous-tend en Chine 
				un concept historique autant que philosophique, lié aux xia
				et à toute la littérature de wuxia, et, de façon plus 
				générale, à toute existence en marge, en marge du pouvoir et en 
				marge de la société, en marge aussi des idées reçues. 
				  
				Mai 2012 : 
				« A la recherche de mon pays natal » 
				(《乡关何处》) 
				  
				Cette 
				recherche, qui est aussi une recherche de racines, une recherche 
				des origines, est définie dans la seconde partie du titre du 
				livre : « mon pays natal, les gens et leurs histoires » 
				(故乡·故人·故事).
				C’est une histoire triste, 
				résumée en quelques caractères, comme le début d’un poème :
				 
				
				                
				
				千回百转,长歌当哭 
				
				       
				                
				mille et un tourments, un long poème plutôt que d’en pleurer 
				  
						
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						A la recherche de mon pays natal |  |    
				Ce qui ressort, 
				effectivement, au long des pages, c’est une extrême tristesse 
				née de tensions accumulées, beaucoup plus forte qu’une brusque 
				explosion de larmes. On retrouve beaucoup des textes déjà 
				publiés, mais comme mis en abyme par le texte final : 
				
				故乡,故人,故事——关于拙著几种的注脚并答谢天下同道 
				
				
				   
				                
				mon pays natal, les gens et leurs histoires –  
				modestes notes 
				et remerciements à quelques compagnons de route 
				  
				Le livre a été 
				publié en Chine continentale. 
				  
				
				Août 2012 : 
				« Invisible jianghu » (《看不见的江湖》) 
				
				  
				Avec ce livre, 
				Ye Fu semble aborder une nouvelle étape, avec une écriture moins 
				directement liée à la tragédie familiale, une écriture plus 
				réflexive. Pour une fois, le livre ne commence pas par le texte 
				commémorant le suicide de sa mère. L’auteur semble avoir tourné 
				une page. 
				  
						
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						Invisible Jianghu |  |    
				Le livre est en 
				deux parties : 1. 
				
				骊歌 
				lígē : 
				terme qui, dans la littérature ancienne, désignait les mots 
				prononcés par un hôte  pour annoncer son départ et 2. 
				
				
				尘海
				chénhǎi 
				mer/monde de poussière (d’ici-bas) 
				  
				La première 
				partie est comme un dernier hommage aux grandes figures de son 
				passé, la seconde une réflexion sur le monde actuel qui affirme 
				le rôle de la littérature comme témoin du temps présent après 
				l’avoir été du temps passé.  
				  
				Le livre se 
				termine par un dernier texte en guise de post-scriptum (代跋) : 
				se souvenir pour résister – ou la mémoire comme forme de 
				résistance (让记忆抵抗). 
				L’ouvrage a été à nouveau publié à Taiwan… 
				  
				
				Remerciements 
				Nous tenons à 
				remercier Victor Rémy de nous avoir fait connaître cet auteur 
				qu’il a rencontré à Pékin en novembre 2012. 
				Victor Rémy 
				était alors étudiant en M2 Asie Orientale Contemporaine, à 
				l’IEP/ENS de Lyon, et faisait un travail de recherche sur la 
				littérature chinoise contemporaine "indépendante", sous la 
				direction de Mme Laurence Roulleau-Berger, pour un mémoire de 
				sociologie de l'art.
				 
				  
   
				A lire en 
				complément 
				  
				Blog de Ye Fu 
				(jusqu’en 2012) : 
				
				
				http://blog.sina.com.cn/hktjyf   
 
				  
				Traduction 
				en anglais 
				  
				
				Hard Road Home, tr. A.E. Clark, Ragged Banner Press, 2014. 
				Recueil qui 
				comporte les sept textes suivants :  
				-         
				
				A Mother to the River 
				Gone 
				
				《江上的母亲》 
				-         
				
				The Watcher at Great 
				Well  
				
				《大水井的守望者》 
				-         
				
				Requiem for a 
				Landlord  
				
				《地主之殇》 
				-         
				
				An Education in 
				Cruelty 
				
				《残忍教育》 
				-         
				
				Brother Blind Ma 
				
				
				《瞎子哥》 
				-         
				
				Su Jiaqiao, a Man 
				Apart  《幽人苏家桥》 
				-         
				
				Tomb Lantern  
				
				
				《坟灯》 
				
				  
   
				Traduction 
				en français 
				  
				Ma mère 
				emportée par le fleuve 
				
				《江上的母亲》, 
				trad. Brigitte Guilbaud, éd. Picquier, 2025. 
					
					
 
 
						 
						
						 
						 
						 
						 
						
						
						 
						Selon une ancienne légende, le mûrier est l’endroit d’où 
						sort le soleil. Quant à yěfú
						(野夫), 
						yě 
						(野) 
						signifie sauvage dans son acception habituelle, mais 
						désigne aussi un homme en dehors des cercles 
						gouvernementaux, un homme qui n’a pas de fonction 
						officielle, donc pas de responsabilités publiques, comme 
						les écrivains et poètes autrefois qui abandonnaient leur 
						poste officiel par désaccord avec la politique menée à 
						l’encontre du peuple. 
						Liu Cha 
						fut actif de 806 à 820, sous le règne de l’empereur 
						Xianzong (Tang Xianzong 
						
						唐憲宗), 
						dont les succès militaires réussirent à réprimer un 
						temps les rébellions et les velléités d’indépendance des 
						gouverneurs militaires, mais ne furent pas suffisants 
						pour contrer l’affaiblissement du pouvoir impérial.
						 
						Le 
						poème entier à écouter, avec le texte :
						
						http://v.youku.com/v_show/id_XNDc0NjU5NjI4.html 
						 
						 
						
						 
				    
				  
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